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Décès d'un ancien juge de la Cour supérieure

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Didier Bert

2024-02-16 10:15:54

René Hurtubise est décédé... Source: SC Mont-Royal
Le premier président de la Commission des droits de la personne, qui a aussi été juge de la Cour supérieure, est décédé. Qui était-il?

René Hurtubise s’est éteint à l’âge de 90 ans.

Natif de Montréal, René Hurtubise a été admis au barreau du Québec en 1958.

Deux ans plus tard, Me Hurtubise était nommé professeur à la faculté de droit de l'Université de Montréal. Il a été un des fondateurs de l'Université du Québec à Montréal (UQAM), dont il a été le vice-recteur à l'enseignement et à la recherche.

Président de la Ligue des droits de l’homme dans les années 1960, René Hurtubise a été le premier président de la Commission des droits de la personne du Québec en 1975.

L’avocat combattait l’injustice et le racisme. En 1980, il avait été invité à prendre la parole devant 300 policiers. Il avait alors mis en garde contre les idées racistes qui étaient répandues dans la police, selon lui. « Il vous faudra analyser l'image souvent négative que vous vous faites des minorités visibles et combattre tous les préjugés que vous entretenez », avait-il lancé, rapportait alors La Presse.

René Hurtubise avait aussi appelé les médias à dénoncer les injustices, et à promouvoir les droits de la personne. Il s'indignait de la discrimination dont ont été victime les femmes au travail.

Juge d’un procès fleuve

René Hurtubise a été nommé juge de la Cour supérieure en 1980. Dix ans plus tard, à l’issue d’un procès fleuve qui aura duré six ans - qui en faisait à l’époque le plus long de l’histoire judiciaire canadienne - le juge Hurtubise rejetait toutes les plaintes dans l'affaire de la MIUF (mousse d'urée formaldéhyde).

Six citoyens poursuivaient le gouvernement du Québec dans le cadre d’une action collective, pour avoir accordé des subventions afin d’isoler leurs résidences avec de la MIUF, ainsi que pour avoir autorisé ce produit. La MIUF était accusée d’être dangereuse et nocive pour la santé des personnes. Des compagnies d'assurance, des fabricants et des installateurs du produit étaient également poursuivies. Le jugement a eu une large portée puisque 5 000 citoyens avaient isolé leur logement avec de la MIUF.

Le jugement de 1 100 pages écartait les plaintes par manque de preuves. Dans sa décision, le juge Hurtubise critiquait la panique entretenue par les groupes de pression, les médias et les politiciens à propos de la MIUF, à propos de laquelle aucune preuve ne permettait alors d'établir sa dangerosité réelle pour la santé humaine.

Lors du procès, la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) avait souscrit une police d’assurance sur René Hurtubise, d’un montant d’un million de dollars. La SCHL craignait que, s'il arrivait quelque chose au juge avant la fin du procès, elle ait des montants importants à dépenser.

Quatre ans plus tard, les juges Louis LeBel, Jacques Delisle et Thérèse Rousseau-Houle de la Cour d'appel du Québec confirmaient la décision du juge Hurtubise. Ce n'est qu'en 2004 que le formaldéhyde sera déclaré cancérogène par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), à l'issue de plusieurs années de recherches internationales. En 2005, la Cour fédérale rejetait le dernier recours intenté contre le gouvernement fédéral concernant la MIUF. Entre-temps, Ottawa avait financé un programme pour extraire la MIUF des maisons.

René Hurtubise a été le président du Conseil de direction du Centre de recherche en droit public. Il a siégé à la Commission Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme. Il a été le directeur général de la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec. Il a co-présidé une Commission d'études sur les relations entre les universités et le gouvernement.

Il a été invité à plusieurs colloques sur les Droits de l’Homme organisés par les Nations-Unies.

« C’est avec regrets que j’ai appris le décès de notre collègue retraité, l’honorable René Hurtubise, dont l’annonce a été communiquée aux collègues de la Cour supérieure », indique la juge en chef de la Cour supérieure, Marie-Anne Paquette, Sur la page de l’avis de décès.

« Je garde un bon souvenir de mon dernier procès devant lui au moment de sa retraite où ma collègue était la regrettée Eva Petras. Un procès harmonieux, dans le respect et conduit avec tout son doigté et son humanisme », écrit Me Nadine Marchi.

« La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse tient à saluer l’importante contribution de l’honorable juge René Hurtubise, premier président de la Commission des droits de la personne, à l’implantation d’une véritable culture des droits de la personne au Québec », salue la Commission par communiqué, qui rend hommage à un « juriste d’exception ».

« L’importance de sa contribution au milieu juridique en général et à celui de la recherche en droit en particulier ne saurait être sous-estimée », écrit le Centre de recherche en droit public.

Passionné de tennis, de poésie et de théâtre, René Hurtubise est le père de Patrice Hurtubise, lui-même nommé juge de la Cour du Québec en 2007.

René Hurtubise laisse dans le deuil son épouse Jani Pascal, ainsi que ses trois enfants, ses neuf petits-enfants et ses six arrière-petits-enfants.

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