Nouvelles

Être en cour : «complètement stupide!», dit Mike Ward

Main image

Radio -canada

2019-01-17 10:10:00

Deux avocats s’affrontent en Cour d’appel pour déterminer entre autres les limites de la liberté d’expression. Qu’a dit la Cour?

Mike Ward faisait hier face à la Cour d'appel.
Mike Ward faisait hier face à la Cour d'appel.
Les arguments de l'humoriste Mike Ward ont été entendus mercredi par la Cour d'appel, lui qui conteste la décision du Tribunal des droits de la personne du Québec qui l'a condamné à verser à Jérémy Gabriel 35 000 $ en dommages-intérêts moraux et punitifs, et 7000 $ à sa mère, pour avoir fait des blagues sur son handicap.

Devant un comité de trois juges, l'avocat de l'humoriste, Julius Grey, a plaidé que les blagues sur Jérémy Gabriel n'étaient pas discriminatoires, mais plutôt offensantes, et que les propos offensants doivent être protégés dans une société libre et démocratique.

« La discrimination l'aurait été s'il n'avait pas été admis quelque part ou s'il avait été évalué différemment, a soutenu l'avocat devant les juges. Il ne suffit pas de se moquer de lui pour créer une discrimination. »

« Vous ne pouvez pas humilier une personne ou violer sa dignité. Jérémy Gabriel a été ciblé parce qu'il avait un handicap. (…) La nuance, c'est que l'exercice de la liberté d'expression ne doit pas violer les droits fondamentaux d'une autre personne », a pour sa part répliqué Stéphanie Fournier, l’avocate représentant le Tribunal des droits de la personne.

Les juges ont pris la cause en délibéré.

Le Tribunal des droits de la personne a conclu en 2016 que Mike Ward avait tenu des propos discriminatoires sur Jérémy Gabriel lors de spectacles entre 2010 et 2013, en se moquant du fait qu’il est atteint du syndrome de Treacher Collins, une maladie congénitale caractérisée par des déformations du crâne et du visage.

Dans ses spectacles, Mike Ward affirmait que les gens étaient gentils avec « le petit Jérémy » parce qu'ils croyaient que le garçon allait mourir bientôt. Il disait aussi qu'après avoir réalisé que le garçon n'allait pas mourir, il avait essayé de le noyer.

Le juge a statué que la blague violait le droit du jeune homme handicapé à la dignité, à l'honneur et à la réputation, ainsi que son droit à l'égalité et à la protection contre la discrimination.

Dans sa plaidoirie, Julius Grey a plutôt affirmé mercredi que son client avait voulu de cette façon souligner que parler contre Jérémy Gabriel était considéré comme un tabou dans la société.

« Dans ce cas particulier, si le jugement est maintenu, personne ne pourra plus oser être un humoriste, parce que normalement on se moque de choses controversées. Sinon, ce n'est pas drôle. Si tout ce qui suscite la controverse peut autoriser quelqu'un à dire : ''J'ai été blessé, je vais au tribunal'', alors nous sommes finis », a ensuite déclaré l'avocat aux journalistes présents au palais de justice de Montréal.

« L’humour n’est pas un crime »

Sur Facebook, après la plaidoirie, Mike Ward a publié un message visant à expliquer le pourquoi de son appel.

Il écrit que « la seule raison pourquoi je me bats encore » est la peur de voir le verdict du Tribunal des droits de la personne nuire aux autres humoristes.

« Ça aurait été tellement plus simple [de] payer l'amende, mais je ne voulais pas créer un précédent », dit-il.

Mike Ward qualifie de « ridicule » le fait d’être en cour contre la Commission des droits de la personne « pour une blague que j'ai écrite il y a 10 ans ».

« C'est ça que je fais dans la vie, des blagues de mauvais goût. C'est comme mon trademark. J'ai gagné de nombreux prix et fait le tour du monde avec ces blagues de mauvais goût. Amener Mike Ward en cour pour une joke de mauvais goût ça serait comme donner un ticket à Vin Diesel parce qu'il conduisait vite dans The Fast and the Furious. C'est complètement stupide », soutient-il encore.

L’humoriste affirme qu’il n’est pas une mauvaise personne, mais bien quelqu’un « qui vit son rêve, une joke louche à la fois ».

De la « propagande », dit Jérémy Gabriel

Quant à Jérémy Gabriel, il considère « qu'on exagère un peu la portée que peut avoir ce jugement-là sur la liberté d'expression ».
« C'est un cas particulier et je pense qu'il faut le voir dans son contexte et avec les impacts que cette situation-là a eu sur moi et sur ma famille », affirme-t-il.

Jérémy Gabriel, qui est maintenant âgé de 22 ans, a raconté que quand il était encore à l'école, des enfants se moquaient de lui en répétant les blagues de Mike Ward, et que le monologue de l'humoriste l'avait amené à remettre en question sa valeur en tant qu'être humain et à lui donner des pensées suicidaires.

Le jeune homme dit avoir hâte de mettre toute cette histoire derrière lui, mais il souhaite que le jugement du Tribunal des droits de la personne soit maintenu.

« Ces démarches-là visent à rétablir justice. Mais aussi, ça se veut un appel pour aider d'autres personnes qui sont dans la même situation que moi », indique-t-il.
6082

16 commentaires

  1. Legal Counsel
    Legal Counsel
    il y a 5 ans
    Well...
    I'm incredibly interested in the outcome of this case. In many ways, it's a litmus test for what kind of society we're electing to become.

    The joke itself was very dark and morbid. Granted. And anyone can debate whether or not they think it was funny or warranted. But to drag a comedian before the courts and require that they pay damages for offending the target of their joke is, quite frankly, ridiculous.

    Comedians say the awful, often horrible things that we've all thought about, but are afraid to utter in polite conversation. That is literally their function in society. They act as an outlet for all of us, so that we may collectively express these feelings.

    In Medieval society, the King's fool/court jester used to make fun of the Crown constantly. They were arguably the only people in the Royal Court who used to tell the truth. And if the King was so thin-skinned that they had their own fool executed for making fun of them, then everyone knew that the King was an evil tyrant. And that's what we're becoming as a society today. We engage in this form of "victimhood Olympics" and take the jester out into the public square and hang them in front of everyone. It's sickening.

    This is a slippery slope. We're going to become a dour, humorless society if we keep this up. People don't have a fundamental right to not be insulted or offended. And even if such a stupid right were to exist, it would always be secondary in importance to the freedom of expression and speech. I can't believe this case even made it this far...

  2. Pirlouit
    Pirlouit
    il y a 5 ans
    Hola
    L'arrêt va être intéressant. Je souhaite franchement que Ward gagne autrement ça sera toujours un peu plus de rectitude politique à l'encontre de la liberté d'expression.

    Jérémy Gabriel doit être le seul au Québec à ne pas voir la portée de ce dossier ... Qualifier le tout de "propagande" pour balayer le sérieux du dossier, c'est lamentable. On va faire un peu de discrimination et mettre ça sur le compte de son âge.

  3. Anonyme
    Anonyme
    il y a 5 ans
    Charte
    N'élargissons pas le débat... Il y a une forme spécifique de blagues qui a été sanctionnée, on ne dit pas que toute personne peut se plaindre des blagues d'un humoriste...

    Expliquez-moi pourquoi on adopte des lois visant à contrer l'intimidation, si après, on va permettre à des gens de faire leur carrière en intimidant publiquement, devant des milliers de personnes, un enfant (à l'époque) qui a droit à la protection contre la discrimination en vertu de la Charte?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Huh?
      Laws against intimidation are about threats of physical violence. Was Mike Ward threatening Jeremy? And you know perfectly well that the Charter applies to governments, not private persons.

      Mike Ward made a cruel, disgusting joke that should have ended his career because no one would ever give him a dime ever again. But to make it illegal to be a jerk is an insanely dangerous road to go down.

    • Pirlouit
      Pirlouit
      il y a 5 ans
      Statue public
      Un des arguments les plus fort est que Jérémie Gabriel s'est servi lui-même de son infirmité pour obtenir une certaine notoriété publique.

      De plus, en devenant un personnage public, il s'expose à l'humour ou à la critique. Pensez à la machoire croche de Jean Chrétien ou la jambe de bois de Lucien Bouchard. Pas nécessairement la grande classe mais c'est ça la liberté d'expression.

      Donnez raison à Jérémie Gabriel, c'est mettre les caricaturistes à la porte et bien d'autres choses. Les tribunaux n'ont pas à être les arbitres du bon goût.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Huh?
      How am I supposed to know that the Charter applies only to governments, exactly? The Charter in question is the Quebec Charter, hence the fact that he was sued by the CDPDJ... And intimidation includes psychological intimidation, not only physical, by the way. Always nice to know people are well-informed about the debate they are commenting on.

    • Legal Counsel
      Legal Counsel
      il y a 5 ans
      Wow
      Don't get into an argument about nonsense. The judgement rendered against Mike Ward by the CDPDJ was not because his joke "intimidated" Jérémy Gabriel. Nor did it have to do with discrimination, because, well...in what way did the joke discriminate against him? Rather, judgement was rendered against Ward for a joke that supposedly struck at Jérémy Gabriel's dignity. His dignity. This is the definition of a slippery slope. The analysis will inevitably involve a review of the "victim's" subjective state of mind in reaction to the joke. Something like a "thin skull" rule for insults and being offended. That seems like a very unreasonable restriction on free speech, in my view. If you're offended, then simply do not listen to the source or cause of your offense. But society does not have a corresponding right to limit what you can say.

    • Me
      Tout à fait d'accord
      En exposant Jeremy Gabriel au public, ses parents (M. Gabriel était un peu jeune à l'époque pour saisir les conséquences d'une telle exposition), ses parents devaient ou auraient du savoir qu'il serait l'objet de moqueries. Je peux comprendre le désir des parents de voir leur enfant aller au bout de ses rêves et faire abstraction de son handicap. Mais d'un point de vue purement objectif, nul besoin d'être un critique musical pour constater que M. Gabriel a une voix qui n'est pas toujours juste ou agréable à entendre, pour être plus poli que Mike Ward. N'eut été de son handicap et de l'admiration que son courage et sa persévérance ont suscité, il en serait à chanter dans des bars de karaoke. Les parents ont pris un risque dont les conséquences auraient du être prévisibles.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Mais encore?
      Si je comprends bien, quand on est handicapé (ou gai, ou noir, ou une femme, ou musulman, ou tout autre motif qui est un motif de discrimination prohibé), il faut s'assurer de vivre notre vie bien caché, à l'abri de l'oeil du public, si on veut pouvoir bénéficier de la protection de la Charte?

      Ward n'a pas été condamné pour avoir rit du manque de talent de Gabriel. Il a été condamné pour avoir ridiculisé son physique (qui est le résultat d'un handicap), pendant 2 ans, devant des milliers de personnes.

    • Me
      Réponse à anonyme
      Mike Ward ne s'est pas limité à commenter le physique de Me. Gabriel. Il répétait à plusieurs reprises dans ses spectacles qu'il chantait mal. Les humoristes rient des gens, de leurs travers, leurs caractéristiques et de leurs propos. Ça fait partie de leur description de tâches. Même si leurs propos sont parfois de mauvais goût (i.e. les spectacles de M. Ward en sont une belle illustration), je préfère ravaler de travers que de vivre dans une société où nos humoristes perdent leur liberté d'expression. Personnellement, je n'ai jamais ri de M. Gabriel et j'admire son courage, même si je n'aime pas son oeuvre musicale.

  4. GBS
    intéressant
    Je n'aime pas Mike Ward l'humoriste. Je le trouve insignifiant. Ses jokes sont stupides et personnes ne devraient se soucier de ce qu'il pense car l'impact qu'il devrait avoir sur notre société, en tant qu'humoriste, est un gros zéro. Je ne sais pas comment il est en tant que personne car je ne le connais pas du tout. Pour ce qui est de Jérémy, ses parents auraient du gérer ça différemment. Ils auraient du, avec l'aide de l'école, faire arrêter l'intimidation que subissait leur fils. Ceux qui intimidaient Jérémy aurait du être puni. J'espère seulement qu'ils n'ont pas grandi en pensant que Mike Ward, l'humoriste, est un modèle à suivre.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Show à MP
      Moi je le trouvais très drôle dans son show à Musique Plus. Comment ça s'appelait ? C'était deux gars de Longueuil. C'était très drôle.

  5. Anonyme
    Anonyme
    il y a 5 ans
    Juste une question comme ça
    Combien de personnes qui commentent ici ont lu la décision du Tribunal des droits de la personne, relu la Charte, pris connaissance des faits au soutien du dossier, avant de donner leur "opinion" sur le débat?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Réponse
      7845.

      Ça vous avance à quoi ?

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      Hahaha
      Cette réponse a suscité chez moi un éclat de rire très sincère. Chapeau!

      Mon point, c'est juste que c'est vraiment ridicule de voir une gang d'avocats dire des sottises au sujet d'une décision qu'ils n'ont pas lue.

      Le TDP ne se prononce pas de la manière dont les gens le rapportent ici. Le TDP évacue la question concernant les blagues sur l'absence de talent du Petit Jérémie, etc. et se prononce sur une question bien définie. Il ne fait pas le procès de l'humour noir ou du bon goût de Mike Ward, comme les commentateurs le laissent entendre.

      Avant de laisser entendre qu'une décision est mal fondée, encore faut-il savoir de quoi il en retourne. Je trouve ça dommage qu'une gang d'avocats se laisse autant aller dans la démagogie!

      J'espère que nos petits amis ici ne se fondent pas sur ce qu'ils lisent dans les journaux quand ils donnent des opinions à leurs clients, c'est tout.

  6. Urbain
    Urbain
    il y a 5 ans
    Ne pas exagérer
    On est pas à la Cour non plus ... On a le droit de donner notre opinion basée sur l'actualité rapportée et nos connaissances en droit.

Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires