Action collective contre le procureur général du Québec
Didier Bert
2021-08-30 13:15:00
La demanderesse, Raven Gordon-Kawapit, avance que les victimes d’actes criminels du Nunavik ont approximativement quarante fois moins de chances d’être indemnisées que celles qui résident ailleurs au Québec.
La demande s’appuie sur des chiffres obtenus auprès de la CNESST, en réponse à une demande d’accès à l’information.
« Entre 2013 et 2020, la Direction de l’IVAC a versé un total de 86 indemnités pour les 40 868 crimes contre la personne qui ont été rapportés sur ce territoire (le Nunavik, ndlr), relève la demande. À titre de comparaison, la Direction de l’IVAC a versé 45 743 indemnités pour les 559 617 crimes contre la personne qui ont été rapportés au Québec entre 2013 et 2019. »
Au Nunavik, ce sont donc environ deux crimes pour mille qui font l’objet d’une indemnisation sur cette période, alors que le taux d’indemnisation s’élève approximativement à 8 % au Québec.
La demanderesse affirme également que le procureur général du Québec « qui est au courant du traitement injuste et discriminatoire subi par les Victimes du Nunavik, ne fait rien pour y remédier », peut-on lire sur la demande d’autorisation de l’action collective.
Elle-même victime à quatre reprises d’actes criminels, la demanderesse indique n’avoir jamais été informée de l’existence du régime d’indemnisation.
La demande rapporte qu’en 2018, dans un document déposé devant la Commission Viens, la direction de l’IVAC a admis que le nombre de demandes d’indemnisation en provenance des communautés autochtones du Québec était « peu significatif » par rapport au nombre total de demandes reçues.
En 2019, le rapport de la Commission Viens dénonçait les pratiques discriminatoires subies par les Premières nations par les inuit au Québec en matière d’accès aux services publics. Le premier ministre du Québec avait alors présenté des excuses officielles, et il s’était engagé à agir rapidement et concrètement.
« Deux ans plus tard, le Défendeur n’avait toujours pas pris de mesure concrète afin de rencontrer ses obligations à l’égard des Victimes du Nunavik, tel qu’il appert des réponses du MJQ et de la Direction de l’IVAC à des demandes d’accès à l’information datées du 30 juin 2021 », pointe la demande d’autorisation de l’action collective.
La demande souhaite que le Procureur général du Québec soit condamné à payer à chaque membre du groupe un montant de 1 000 $ par crime subi à titre de dommages-intérêts moraux, ainsi qu’un montant de 10 000 $ à titre de dommages punitifs pour sanctionner l’atteinte à leurs droits fondamentaux garantis par les articles 7 et 15 de la Charte canadienne ains que par les articles 1 et 10 de la Charte québécoise.
Le groupe désigne « toute personne qui, après avoir été victime, directement ou indirectement, d’un crime contre la personne commis au Nunavik, n’a pas été soutenue par l’État et ses représentants afin de bénéficier du régime d’indemnisation public prévu à la Loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels. »