Les détaillants poursuivent Bell pour 200 millions $

L'équipe Droit-Inc
2008-10-22 08:30:00
"Ces poursuites résultent de la détérioration de nos relations, laquelle s'est accélérée au cours des trois dernières années, sous la direction actuelle de Bell", a déclaré Doris Ronca, présidente de l'ACDIC et propriétaire de deux magasins Espace Bell à Montréal, au Québec.
"Des années de mauvaise gestion à Bell ont conduit à l'abandon de la marque par les clients et les investisseurs de même qu'à la chute de la société de la première à la troisième place sur le marché du sans-fil. Aujourd'hui, Bell s'en prend à son propre réseau exclusif de détaillants en ne respectant pas ses engagements contractuels et en détruisant de façon systématique la compétitivité, la réputation et la valeur de nos commerces, que certains possèdent depuis plus de 20 ans."
Dans deux poursuites identiques, intentées aujourd'hui devant la Cour supérieure de l'Ontario et la Cour supérieure du Québec, on prétend que Bell n'a pas respecté son propre engagement contractuel avec les détaillants, et ce, sous trois aspects importants :
1. La société a fait fi d'un engagement adopté en mars 2008 en vertu duquel les honoraires et les commissions des détaillants ne seraient pas modifiés avant juin 2009. Bell refuse maintenant de verser une rémunération aux détaillants chez qui les clients achètent de l'équipement de remplacement et renouvellent leur contrat de service, et réduit le montant d'autres commissions pour nouveaux clients pendant le quatrième trimestre, le plus important de l'année. Ces honoraires sont essentiels à l'exploitation normale des commerces par les détaillants.
2. Bell continue de proposer de meilleures mesures incitatives, et plus lucratives, à ses détaillants non exclusifs, comme Wireless Wave, Cabine Téléphonique, Best Buy et Future Shop, au détriment de la compétitivité de ses propres détaillants exclusifs, le tout en violation du contrat la liant à ces derniers.
3. Le marketing direct de Bell offrait et continue d'offrir aux clients de meilleures mesures incitatives et de meilleures offres que son réseau de détaillants, ce qui érode encore plus la compétitivité de ces derniers et la loyauté de leur clientèle.
200 millions
Plus de 200 millions de dollars en dommages-intérêts, l'annulation de toutes les mesures incitatives décrites dans les poursuites ainsi qu'un engagement à respecter le contrat en cours sont exigés dans les poursuites contre Bell. Celles-ci visent aussi à permettre aux détaillants de tenir en stock et de vendre des produits de concurrents comme Telus ou Rogers, ou ceux des nouveaux venus sur le marché des télécommunications au Canada.
"Offrir d'autres marques représente une des rares options que nous ayons pour conserver un peu de compétitivité, maintenir nos revenus afin de payer nos employés et conserver la valeur de nos commerces", a déclaré Rick Umbrio, vice-président de l'ACDIC et détaillant Bell, propriétaire de trois magasins en Ontario.
"C'est malheureux que nous en soyons arrivés là, mais si Bell continue de renier ses engagements et de prendre de mauvaises décisions commerciales, nous n'avons que peu de choix."
A titre de principal lien entre Bell et ses clients d'affaires ou particuliers, les membres de l'ACDIC sont choqués par le fait que la société a laissé leur relation se détériorer, compte tenu tout particulièrement de la prise de contrôle prochaine, en décembre, de la société par le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario.
"Nous croyons que les membres de la haute direction de Bell pourraient toucher de grosses primes personnelles à la prise de contrôle si certains objectifs financiers sont atteints", a affirmé M. Umbrio.
"Pour améliorer le bénéfice net, existe-t-il de meilleures méthodes que de réduire illégalement les commissions et les honoraires des détaillants et de congédier des milliers d'employés, comme Bell l'a fait au cours des derniers mois? C'est difficile de ne pas faire le rapprochement."
Malgré tout, les détaillants affirment qu'ils n'agissent qu'à contrecoeur.
Nous n'avons pas intenté ces poursuites à la légère, a insisté Mme Ronca.
"Depuis plus de trois ans, nous demandons aux responsables de Bell, de tous les niveaux, de nous écouter, de négocier de bonne foi, de respecter leurs engagements, de prendre du recul et de constater comment les affaires de la société et sa réputation auprès des consommateurs se détériorent. Mais dans tous les cas, ils nous ont ignorés, ont esquivé le sujet et nous ont traités avec mépris, essentiellement parce que nous représentons un réseau de distribution "captif" pour eux."
"En dernière analyse", a ajouté Mme Ronca, "nous devons tout faire pour protéger nos commerces, nos employés et les relations que nous avons bâties avec nos clients pendant plus de 20 ans de partenariat avec Bell. Et si, pour ce faire, nous devons traîner Bell devant les tribunaux, alors nous sommes déterminés à gagner."