Procès Norbourg : A qui la faute ?

Natacha Mignon
2010-01-27 13:13:00
Alors, à qui la faute et comment faire pour que ce fiasco ne se reproduise pas ?
Rien à chercher, semble-t-il, du coté des jurés. Eux sont ressortis totalement blanchis de la procédure, avec même, les plus vives félicitations du Juge Wagner.
«Mais vous avez fait de votre mieux, et vous pouvez sortir la tête haute», a-t-il dit.
Personne ne leur en veut, pas même les victimes.
«Les jurés avaient une tâche impossible, dit-il. Je les félicite. Ils ont donné de leur temps, ils ont été séquestrés, ils n'ont pas vu leur famille. Si on me demandait de faire ça, je refuserais », a dit Jean-Guy Houle, victime au procès, sur le site de La Presse Affaires.
La Couronne pointée du doigt
L’ensemble des observateurs du procès et experts en droit criminel critiquent en revanche ouvertement la Couronne.
Si ce n’est pas le choix initial du jury qui est remis en cause, c’est en revanche l’acte d’accusation qui est critiqué et ce à deux égards.
D’une part, les 702 chefs d’inculpation apparaissent comme beaucoup trop nombreux, et, d’autre part, la qualification des infractions est perçue comme trop complexe.
Pour le criminaliste, Jean-Claude Hébert interrogé sur le site des Affaires, la Couronne aurait pu atteindre son but, en déposant un acte d’accusation plus simple.
« Peut-être que l’erreur de la Couronne a été d’avoir présenté un acte d’accusation trop considérable pour les besoins de la cause. Sans le vouloir, ce faisant, la couronne a multiplié les chances de confusions et les pommes de discordes entre les jurés, a-t-il dit. Au lieu de prendre un acte d’accusation à 700 chefs, la couronne aurait pu présenter un acte d’accusation à seulement 4 ou 5 chefs d’accusation simples. »
Selon lui, la seule circonstance qui viendrait atténuer la responsabilité de la Couronne dans ce dossier serait la déclaration surprise de culpabilité de Vincent Lacroix, laquelle est venue semée encore plus de confusion parmi les jurés.
Les Procureurs dans le dossier, Serge Brodeur et Julie Riendeau, n’ont souhaité faire aucun commentaire de la décision.
La Couronne n’est pas seule dans l’affaire
L’échec de ce procès fait engager une réflexion plus profonde sur un besoin de réforme du système criminel québécois, selon le journaliste de La Presse Martin Vallières.
Questionnement étouffé dans l’œuf et contesté aussitôt par la Ministre de la Justice, Kathleen Weil.
«La justice fonctionne très bien au Québec. Je n'ai pas d'inquiétude du tout par rapport à ça. Mais Norbourg, c'est un dossier complexe, je l'admets», a –t-elle dit à l'occasion d'un point de presse improvisé, à Québec.
L’opinion de la Ministre laisse quand même planer les inquiétudes.
Le chroniqueur Yves Boivert, dans La Presse, appelle à une réforme législative pour que le droit s’adapte à la complexité des nouveaux procès.
Pour lui, la solution tiendrait en trois points, que la Couronne simplifie les dossiers, qu’Ottawa légifère et que les juges dirigent les procès avec plus de fermeté.
On attend désormais de savoir si la Couronne demandera un nouveau procès et sous quelles modalités. La prochaine date dans ce dossier est fixée au 8 mars.