Protestez, vous êtes filmés !

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Dominic Jaar

2010-06-30 13:15:00

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En marge des coûteux sommets G8 - G20, Dominique Jaar dénonce dans une chronique au vitriol le flicage vidéo croissant des citoyens.
Hormis le budget titanesque de 1,2 milliards $ de cet exercice ''démacrotique'', que nous payerons sans doute encore plus longtemps que le parc Olympique, ce qui me semble le plus troublant est la façon dont les droits les plus fondamentaux des torontois sont brimés sans vergogne mais de surcroit sans susciter beaucoup de réactions.

Jusqu’à ce que je sorte de la faculté de droit, j’étais sous l’impression que le canadien possédait un droit à l’image, enchâssé dans son droit à la vie privée.

Lors d’études en France et de vacances en Angleterre, où pour la première fois j’ai vu ce qu’étaient des états policiers, j’ai constaté à quel point la « simple » omniprésence de gendarmes pouvait porter atteinte à diverses libertés.

C’était il y a plus de 10 ans …

Que sont nos libertés devenues?

Depuis, nous avons donné raison nombre de fois à James F. Byrnes (« Too many people are thinking of security instead of opportunity. They seem more afraid of life than death. ») en implorant nos bourreaux, explicitement, implicitement et tacitement, de sans cesse accroître les limites imposées à nos droits.

Or, avec l’avancée des technologies, s’il y a un droit qui devrait être protégé, c’est bien celui à l’image.

En effet, grâce aux logiciels de reconnaissance faciale ou de plaque d’immatriculation, il est désormais aisé de suivre les citoyens au pas mais aussi d’emmagasiner cette information ...

67 caméras de vidéo surveillance d'appoint

Pourtant, dans le cadre de l’expropriation urbaine que se sont offerts nos maîtres, à nos dépens, l’un des exercices les plus ahurissants a été l’installation d’une quantité impressionnante de caméras de vidéosurveillance en circuit fermé :

View OpenFile's Toronto G20 CCTV camera locations in a larger map

Bien que l’on promette dans le communiqué de presse de retirer celles-ci suite à la fiesta, je parie qu’il s’agit d’un héritage éternel.

Heureusement, au prix que nous avons payé !

J’espère recevoir ma part des 6 km de clôture installés pour l'occasion incessamment : superbe pour faire grimper de la vigne me dit-on...

D’ailleurs, pourquoi avoir choisi le centre-ville de Toronto? Probablement parce que la pose de caméras sur des arbres est moins pérenne.

Si cela n’était pas clair, je suis totalitairement en désaccord avec l’état policier électronique dont on constate béatement la naissance.

Il est temps de revoir les libertés individuelles et collectives à l’aune des technologies.

À défaut, pourquoi s’offusquer de la prise de nos empreintes digitales ou de notre photo par les corps policiers si nous acceptons silencieusement d’être filmés et suivis en temps réel en permanence? Pourquoi parle-t-on encore de la théorie du « plain view » alors que tout est actuellement fait au vu et su des autorités? Tout, à l’exception des négociations entre élus qui transigent à huis clos à propos de sujets qui ont et auront des impacts sur nous tous. En fait, les forces de répressions, constitués de citoyens et qui sont au service de ces derniers, devraient faire tomber les barricades anti-démocratiques qu’on érige actuellement. Il en est de même des avocats.

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18 commentaires
  1. 71058
    Les caméras à Québec
    Lors du Sommet des amériques à Québec, on avait installé aussi une multitude de caméras de surveillance. Je me souviens d'avoir lu qu'ils aillent rester et j'en ai revu une récemment. J'ignore si elles y sont toutes encore.

  2. GBS
    GBS
    Me Jaar, pourquoi êtes-vous contre les caméras qui filment dans des endroits publics?

    Je crois que vous y allez un peu fort sur les termes "d'état policier" lorsqu'on fait référence à de la surveillance d'endroits publics!

  3. Dominic Jaar
    Dominic Jaar
    il y a 15 ans
    Erratum
    Chers lecteurs,

    Permettez-moi de vous offrir la conclusion de mon billet :

    "À défaut, pourquoi s’offusquer de la prise de nos empreintes digitales ou de notre photo par les corps policiers si nous acceptons silencieusement d’être filmés et suivis en temps réel en permanence? Pourquoi parle-t-on encore de la théorie du « plain view » alors que tout est actuellement fait au vu et su des autorités? Tout, à l’exception des négociations entre élus qui transigent à huis clos à propos de sujets qui ont et auront des impacts sur nous tous. En fait, les forces de répressions, constitués de citoyens et qui sont au service de ces derniers, devraient faire tomber les barricades anti-démocratiques qu’on érige actuellement. Il en est de même des avocats."

    Notez aussi que dans la phrase "J’espère recevoir ma part des 6 km clôture installés pour l'occasion incessamment", il manque un "de" et se lisait auparavant: "J’espère recevoir ma part de clôture incessamment". J'avais, à tort semble-t-il, présumé que tous savaient que le centre-ville de Toronto s'était vue assiégée d'une ceinture de chasteté de ferraille.

    Dj)
    [http://ledjit.com|Ledjit]

  4. natacha
    natacha
    il y a 15 ans
    Re : Erratum
    Rectifié et désolée Me Jaar ...

    > Chers lecteurs,
    >
    > Permettez-moi de vous offrir la conclusion de mon billet :
    >
    > "À défaut, pourquoi s’offusquer de la prise de nos empreintes digitales ou de notre photo par les corps policiers si nous acceptons silencieusement d’être filmés et suivis en temps réel en permanence? Pourquoi parle-t-on encore de la théorie du « plain view » alors que tout est actuellement fait au vu et su des autorités? Tout, à l’exception des négociations entre élus qui transigent à huis clos à propos de sujets qui ont et auront des impacts sur nous tous. En fait, les forces de répressions, constitués de citoyens et qui sont au service de ces derniers, devraient faire tomber les barricades anti-démocratiques qu’on érige actuellement. Il en est de même des avocats."
    >
    > Notez aussi que dans la phrase "J’espère recevoir ma part des 6 km clôture installés pour l'occasion incessamment", il manque un "de" et se lisait auparavant: "J’espère recevoir ma part de clôture incessamment". J'avais, à tort semble-t-il, présumé que tous savaient que le centre-ville de Toronto s'était vue assiégée d'une ceinture de chasteté de ferraille.
    >
    > Dj)
    > [http://ledjit.com|Ledjit]

  5. Anonyme
    Anonyme
    il y a 15 ans
    Pendant ce temps de l'autre côté de l'atlantique
    Les policiers ne se privent pas de filmer, mais quand c'est monsieur et madame tout le monde qui prend des images, ils ne le prennent pas.

    Voir l'histoire d'un bloke, mineur, photojournaliste amateur, qui prenait des images d'une parade de cadets.

    La conversation entre le policier et le photographe est enregistrée, et l'appréciation que fait le policier de la situation vaut vraimement le détour. Toutes les raisons y passent (de "tu n'as pas la permission de tes parents" à la loi anti-terrorisme)

    http://www.bjp-online.com/british-journal-of-photography/news/1719526/photojournalist-detained-army-cadet-pics

    http://julesmattsson.wordpress.com/2010/06/28/the-romford-incident/


    Autre article amusant, sur la police de Londres, condamnée à payer des dommages et intérêts à un acteur détenu et fouillé pendant une manifestation. Motif de la police : "One officer recorded in writing that he was suspicious of Mr Thomas because of his "over-confident attitude"

    http://news.bbc.co.uk/2/hi/uk_news/england/london/8632038.stm

  6. GBS
    GBS
    Il est inutile de soulever les abus de la police pour nier l'utilité des caméras filmant des endroits publics.

    Pourrait-on mettre des policiers dnas ces endroits publics pour en faire la surveillance? Oui.

    L'avantage de la caméra est qu'elle coûte moins cher, on peut faire "rewind", elle travaille 24/7, et la preuve sera solide.

    Je suis 100% pour la protection de la vie privée, et du droit à l'image même dans les lieux publics, mais sérieusement, je ne vois aucun problème à ce que les agissements des gens dans des lieux publics soient soumis à la surveillance, passive de surcroît, des forces de l'ordre.

  7. Dominic Jaar
    Dominic Jaar
    il y a 15 ans
    État Policier
    GBS,

    Merci pour votre commentaire.

    D'abord, j'aimerais connaître la description que vous faites d'état policier.

    Quant à mon opinion, il se fonde sur le terrain glissant de ce que l'on appelle les "lieux publics" à l'ère des technologies. L'internet est-il un lieu public? Selon l'interprétation que je lis entre les lignes de votre commentaire, il appert que oui. Vous n'aurez donc aucune hésitation à accepter qu'on "filme", pour ainsi dire, vos moindres furetages sur la toile? Moi, si!

    Par ailleurs, sans endosser la logique selon laquelle les gouvernements peuvent surveiller leurs sujets comme bon leur semblent, je m'inquiète de la dérive des forces de répression qui succombent de plus en plus, pour des motifs économiques et de relations de travail, au chant de sirènes des services de sécurité privés. Alors que les corps policiers sont soumis à un vaste cadre législatif, dont la Charte canadienne, les entreprises privées lui échappent. À l'heure où les lieux publics sont surveillés par de telles entreprises qui peuvent faire à peu près ce qu'elles désirent des informations emmagasinées, je trouve que le principe de précaution, bien maîtrisé en Europe (sans doute à cause de leurs expériences totalitaires et fascistes), dicte une remise en question des fins réellement visées mais aussi du contexte dans lequel cette surveillance a lieu.

    D'ailleurs, je m'explique mal comment, d'un côté, on justifie l'expansion des espaces publics alors que de l'autre, les services du même nom fondent à vue d'œil pour encore une fois faire place au privé...

    De plus, bien que j'utilise l'exemple des caméras et de l'espionnage constant auquel sont soumis les honnêtes citoyens, ce que je cible plus généralement est la réduction constante de nos libertés: parlez-en à vos aïeux ou selon votre âge, rappelez-vous l'époque où vous pouviez conduire sans être attaché, que les enfants n'avaient pas besoin de banc d'auto, etc. À quand un couvre-feu selon l'âge? Le fait de sans cesse déresponsabiliser davantage le citoyen justifie la limitation de ses libertés et c’est là un cercle vicieux.

    Pour terminer, je ne tolère pas la légifération par exception en vertu de laquelle on punit ou nuit à tous sous prétexte de contrôler une minorité. Un bon exemple d'une telle pratique se constate aux aéroports où on emmerde tout le monde avec la sécurité alors que nous savons tous que la journée où quelqu’un décidera de commettre un acte de terroriste grâce à l’aviation, il réussira! De toute façon, il faudrait être vraiment stupide pour tenter un autre 911 alors qu’il y a tant d’autres façons d'en arriver aux mêmes fins.

    Dj)

  8. Anonyme
    Anonyme
    il y a 15 ans
    Agents provocateurs
    Un article très intéressant sur le comportement des policiers lors du G20.

    http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/291854/g20-la-police-aurait-utilise-des-agents-provocateurs

  9. Anonyme
    Anonyme
    il y a 15 ans
    Re: État Policier
    bien dit !

    DJ comme ministre de la sécurité publique !

  10. Dominic Jaar
    Dominic Jaar
    il y a 15 ans
    Ministre de la sécurité publique
    Merci pour le vote de confiance! :-)

    Par contre, pour moi, les mots "sécurité" et "publique" sont antinomiques. Leur union fait très [http://fr.wikipedia.org/wiki/Novlangue|novlangue] lorsqu’on sait que la notion de sécurité s’entend de la « confiance, tranquillité d’esprit qui résulte de l’opinion, bien ou mal fondée, qu’on n’a pas à craindre de danger ». Les ministères et agences gouvernementaux, au Canada et ailleurs, qui se sont rebaptisés de ce néologisme sont incidemment ceux-là même qui, depuis quelque temps, nous martèlent les sens des pires craintes que nous devons entretenir! Paradoxalement, je suis d’avis que le public se sentirait davantage en sécurité en leur absence… Ainsi, m’intéressant sincèrement au peuple, je déclinerai l’invitation.

    Dj)

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