Nouvelles

Séance ciné : pression et conviction

Main image

Céline Gobert

2012-05-04 17:00:00

A l’affiche cette semaine, le pape pète les plombs et une femme combat au nom de la liberté. Deux sources d’inspiration possibles pour les avocats…
P comme Pape

Pour les avocat(e)s qui pensent que l’on peut rire de tout

Rome. Le Pape est mort, le Conclave élit un successeur. Avant l’officialisation de la nouvelle, un cri de détresse lancé par le nouveau souverain pontife vient enrayer la machine bien huilée des coutumes vaticanes : l’occasion rêvée pour le trublion Moretti d’insuffler du burlesque et de la mélancolie dans un univers a priori froid et intouchable.

Michel Piccoli incarne ce Pape au désespoir, renvoyé à la plus banale humanité : ce dernier stresse, angoisse, doute de ses capacités et sombre, comme un homme lambda, dans une dépression nerveuse. Dans quel état j’erre ?, se demande-t-il au fin fond de sa solitude, superstar chrétienne attendue par tous, messie en proie aux maux modernes.

Rien ne semblant pouvoir lui apporter des réponses (ni la foi, ni la religion, ni la psychanalyse), le Pape décide de s’enfuir, et de trouver dans les rues romaines, matière à guérir. Le film est-il à la hauteur des attentes engendrées par son pitch ? Pas vraiment.

Le point de départ, bien qu’absolument invraisemblable, avait de quoi séduire mais Moretti ne va jamais au-delà, offrant une réflexion inutile car sans enjeu. La critique de la rigueur des rituels, conventions et autres hypocrisies de l’Eglise reste gentillette- le cinéaste noyant ses piques sous un humour un peu désuet.

P comme Prix Nobel

Pour les avocat(e)s qui admirent les personnages de femmes fortes et engagées

Après l’affreux Adèle Blanc-Sec, la série noire continue pour Besson. S’emparant d’un sujet fort (le combat de la révolutionnaire Aung San Suu Kyi contre la dictature birmane) qui offrait des possibles gigantesques (tant au niveau du point de vue que de la dimension humaine ET politique), le cinéaste piétine son propos : son film est ennuyeux, impersonnel, et complètement à côté de la plaque. Pire : son esthétisme de publicité massacre tous les enjeux de l’histoire.

Son héroïne, auréolée du Prix Nobel de la Paix en 91 et symbole de la lutte pour la liberté et la démocratie, reste à l’état d’image glacée, icône de papier sacrifiée par un emballage outrancier et un choix de narration superficiel.

Besson veut nous parler de l’amour indéfectible qui alliait cette femme forte avec son mari british (David Thewlis), il veut nous parler du dilemme d’une combattante, tiraillée entre l’amour pour sa famille et celui qu’elle porte à son peuple, du destin d’exception d’une dame d’exception, une Gandhi au féminin, passionnée, passionnante, engagée. Au final, il n’y a rien de tout cela à l’écran.

A la place: une succession de scènes et de faits inhabités, un catalogue propret et coloré à la place du grand film politique attendu.

Du contexte socio-politique trouble, Besson n’en saisit jamais la complexité, les rouages. Il fige la Birmanie dans des dates, réduit le peuple à des figures de livres d’histoires, les personnages secondaires à de simples étiquettes (le mari patient – les gamins souriants – la mère malade – le père mort), et, passe les années comme on tourne des pages.

3 ans d’assignation à résidence sont énoncées en quelques secondes. Une grève de la faim est réglée en 5 minutes. La décision d’entamer le combat d’une vie, en moins d’une seule. Les impacts? Les raisons? Les racines? Besson zappe tout au profit d’un biopic lisse, hollywoodien, noyé sous les violons omniprésents, et follement irritants, d’Eric Serra.

Même Michelle Yeoh traverse le film transparente, écrasée par le style Besson, pompier, systématique, faux. Cette fois c’est sûr : la belle époque est loin.
3281
Publier un nouveau commentaire
Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires