Sextos envoyés à sa cliente : un avocat radié
Camille Dufétel
2022-12-12 15:00:00
C’est un total de près de 76 messages textes que la cliente a constaté avoir reçus au cours d’une nuit.
La cliente avait retenu les services de ce Barreau 2012 en 2018, afin de la représenter dans le cadre d’un dossier familial, puis d’un autre litige l’année suivante.
Soutien amical
Au long de l’exécution de ces mandats, la décision du 21 octobre décrit « une relation qui ‘migre’ d’une relation strictement professionnelle à une relation d’aide et de soutien amical mutuel ».
Tous deux échangent sur un réseau social « en dehors des heures normales de bureau ». La cliente a, selon la décision, « fait preuve d’empathie et d’écoute envers l’intimé ».
Ils se rencontrent la journée du 7 juin 2019 pour discuter des deux dossiers en cours. Lors de cette rencontre, l’intimé constate que sa cliente est « fragile et vulnérable ». Lui vit « une forte pression au travail ».
Beaucoup d’alcool
Ce même jour, l’intimé quitte son travail, et arrivé chez lui, « consomme une quantité importante d’alcool » en plus d’un médicament.
Pendant la soirée, il communique avec sa cliente et reçoit de sa part une invitation à la rejoindre avec son groupe d’amis dans un bar. Il se rend au bar, s’installe seul à une table et ne la rencontre pas.
D’après la décision, il consomme encore de l’alcool jusqu’à la fermeture de l’établissement. Il envoie ensuite des messages textes à la cliente, « à caractère sexuel », « dont certains la visent directement ».
« En plus de lui lancer une invitation à participer à une activité sexuelle avec lui », que la plaignante qualifie de « partouze », la décision précise que les propos de l’intimé « réfèrent à sa libido, ses fantasmes, la façon dont il ‘baise’, de son désir de la serrer dans ses bras, ‘qu’il la veut maintenant’ et de la ‘condition à offrir’ s’ils deviennent un couple ».
Il lui transmet alors un lien de visionnement donnant accès à une vidéo provenant d’un site pornographique.
« C’était du délire »
En plein milieu de la nuit, l’avocat lui réécrit par messages textes et lui présente « ses sincères excuses ».
Il mentionne « avoir trop bu », précise être « maintenant sobre » et dit réaliser ce qu’il a fait, qu’il a « accumulé beaucoup de stress et de pression », que « c’était du délire » et qu’il a « perdu les pédales ». Il dit tenir à s’excuser de vive voix.
C’est au matin du 8 juin 2019 que la cliente constate avoir reçu ces messages. Quelques jours plus tard, elle l’informe qu’elle met fin à ses deux mandats. Elle déposera une demande d’enquête au Barreau du Québec.
Regrets
L’intimé a exprimé, selon le jugement, regretter énormément ses agissements, être « honteux », « triste ». « Sans minimiser sa responsabilité », il a indiqué, toujours selon la décision, vivre des difficultés qui « contextualisent ses gestes ».
Il dit aussi avoir suivi des formations et consulté des professionnels. Il a quitté la région où il travaillait et n’exerce plus depuis le mois de novembre 2019.
Interrogé par le Conseil, il a affirmé « ne pas consommer de drogue et ne pas avoir de dépendance à l’alcool ». Le Conseil précise pour sa part qu’il apparaît de la preuve « que sa consommation lui a causé des problèmes dans le passé ».
Durée de la radiation
La plaignante a recommandé « les sanctions prévues par la loi, soit une période de radiation d’une durée de cinq ans sous chacun des chefs à être purgée concurremment et l’amende minimale de 2 500 $ pour chaque chef ».
Le premier concerne « la présence de propos abusifs à caractère sexuel » alors que le deuxième implique « un geste à caractère sexuel, soit la transmission d’un lien qui donne accès à une vidéo pornographique ».
Dans sa décision, le Conseil a estimé que « la transmission de ces messages ainsi que de cette vidéo pornographique constituent un grave manque de jugement » et que ces « messages abusifs » ont été envoyés par l’intimé alors qu’il était à même de constater « l’état de vulnérabilité » de sa cliente.
Le Conseil a ajouté que l’état de l’intimé découle d’une consommation volontaire d’alcool, ce qui n’est pas considéré en l’instance « comme un facteur atténuant ».
Il a aussi précisé que « bien qu’il s’agisse de gestes de graves, ceux-ci ne se situent pas parmi les plus graves dans l’échelle de gravité en matière d’inconduite sexuelle ».
Il a également retenu la bonne collaboration de l’intimé à l’enquête de la plaignante, le fait qu’il plaide coupable sans réserve sous les deux chefs d’infraction et qu’il exprime des regrets qu’il estime « sincères ». De quoi militer en faveur d’une radiation de moins de cinq ans.
Au regard de la jurisprudence, le Conseil a jugé que les infractions commises par l’intimé, à chacun des chefs de la plainte, justifiaient l’imposition d’une période de radiation de 12 mois et d’une amende de 2 500 $.
Le Conseil a tenu à rappeler que « l’inconduite à caractère sexuel n’a plus sa place dans la société, à plus forte raison dans le cadre d’une relation professionnelle qui, par nature, repose sur la confiance ».
Contacté par Droit-Inc, Me Giuseppe Battista, l’avocat de l’intimé, a indiqué qu’il ne ferait aucun commentaire.
A
il y a un anÇa lui a donné quoi de porter plainte?
Anonyme
il y a un anC'est comme ça que ça marche. Il faut que quelqu'un porte plainte pour que les agissements qui sont contraires à la loi puissent être punis.
pigeon dissident
il y a un anÇa lui a donner espoir que d'autres femmes ne subiront pas ce genre de comportement déplacé et anti- déontologique.
Anonyme
il y a un anQuand quelqu'un porte plainte pour des gestes répréhensibles posés par quelqu'un à son endroit, c'est supposé être pour en retirer quelque chose?
Anonyme
il y a un anElle aurait dû avoir une raison particulière de porter plainte? Parce que je ne me souviens pas que la loi en exige une, à partir du moment où il y a infraction. Ou bien, vous allez nous sortir comme c'est de règle par icitte, qu'il s'est excusé donc il n'a pas à subir les conséquences de ses actions?
Pirlouit
il y a un anElle a détruit sa vie pour quelques textos envoyés par son ami saoûl qui s'est excusé le lendemain.
Ce n'est pas parce qu'elle peut porter plainte qu'elle le doit.
J'espère pour elle qu'elle ne fera jamais d'erreur dans sa vie.
Anonyme
il y a un an1. Elle n'a pas détruit sa vie.
2. Il n'a pas envoyé quelques textos, mais 76 au cours de la nuit.
3. C'était peut-être son ami, mais c'était surtout une relation professionnelle.
4. Ce n'est pas parce qu'elle peut porter plainte qu'elle le doit. Évidemment. Et alors ?
5. Si elle fait des erreurs, quelqu'un portera peut-être plainte contre elle et c'est très bien ainsi.
Pirlouit
il y a un an1. Radier un an c'est pas mal une destruction de vie professionnelle. Et ça va se répercuter partout. Il vie encore mais bon;
2. Quelques textos, 76 textos... ce sont des textos, pas des lettres de menaces de mort;
Pour le reste, je vous souhaite de ne jamais faire une erreur, aussi insignifiante soit-elle, et d'en subir les conséquences disproportionnées. Entre recevoir quelques messages indésirables un soir et radier quelqu'un, il y a un monde. Un peu comme lorsqu'il pendait ceux qui volaient une bûche pour se réchauffer l'hiver.