Bonjour, je travaille dans un grand bureau et je suis de retour d’un congé de maternité. Je désirerais avoir un horaire de quatre jours par semaine mais le comité de gestion n’est pas très ouvert à cette possibilité.
Est-ce réaliste d’espérer trouver un autre cabinet plus flexible à ce niveau ?
Réponse :
Chère lectrice,
Pierre Arcand, recruteur juridique, répond à vos questions
Plusieurs cabinets l’offrent déjà mais il faut que la personne qui en fait la demande soit consciente qu’une équité doit être maintenue entre les avocats du cabinet. Les clients ont aussi leurs exigences ce qui complexifie également la gestion d’un horaire de quatre jours semaines.
Voici sommairement les points dont il faut tenir compte lorsqu’on envisage un horaire de quatre jours semaines :
1- Équité et rémunération
Il serait facile de calculer que quatre jours par semaine correspond à 80% d’une charge normale et donc que la rémunération devrait être fixée à 80% de ce qui est normalement versé à un avocat du même niveau. Par contre, ce calcul est erroné pour deux raisons majeures.
Premièrement l’horaire d’un avocat, surtout dans un grand bureau, n’est pas de cinq jours semaine mais ressemble plus à du cinq jours et demi ou six jours semaine. Il faut donc parler d’objectif d’heures facturables et non de nombre de jours par semaine.
Dans un bureau qui demande 1700 heures, 80% représente 1360 heures facturables. Ce qui représente environ 28 heures facturables par semaine. Ça se fait en quatre jours mais ce ne sera pas quatre petites journées et ça ne tient pas compte des impondérables de la vie de parent.
Deuxièmement, les coûts fixes (bureau, adjointe, etc,) ne sont pas diminués de 20% parce que vous travaillez quatre jours par semaine. Considérant que lesdits coûts grugent habituellement entre 20 à 30% de la production d’un avocat (montant facturé/ payé), il est clair que le calcul de la rémunération doit en tenir compte.
2- Équité et urgence
Une entente pour un horaire de quatre jours par semaine, si on veut qu’elle atteigne son but, devrait faire en sorte que vous soyez absente du bureau une journée par semaine. On sait tous que les avocats en pratique privée sont rarement maîtres de leur horaire. Que fait-on avec les urgences du vendredi après-midi ? Vos collègues, bien que très enclins à vous supporter, pourraient trouver inéquitable le fait qu’ils soient toujours les heureux élus. Heureusement les temps ont changé mais la nature humaine n’a pas vraiment changé, un gestionnaire de cabinet doit en tenir compte.
3- Qualité des dossiers
Il s’agit ici d’une conséquence indirecte découlant d’un horaire de quatre jours par semaine que certaines de mes amies ont vécu. Les dossiers stimulants et intéressants sont souvent aussi les plus exigeants. L’avocat senior en charge d’un dossier de ce type, bien que très bien intentionné à votre égard, désirera probablement s’entourer des avocats les plus disponibles afin de pouvoir palier à toutes éventualités. Comment le lui reprocher ? Il faudra vous faire à l’idée que certains beaux dossiers vous passeront sous le nez en espérant qu’ils ne seront pas trop nombreux.
4- Développement de clientèle
Ce dernier point dépend de votre statut présent et futur au sein du cabinet. Comme me le disait une amie, et je peux en témoigner personnellement, lorsqu’on a un enfant (surtout en bas âge) notre vie sociale se résume souvent au samedi soir et l’heure du lunch. Si vous avez ou souhaitez obtenir le statut d’associée, outre les objectifs d’heures, on vous demandera habituellement de développer ou entretenir une clientèle. Il peut être difficile d’atteindre cet objectif tout en respectant un vrai horaire de quatre jours par semaine. Pour un sociétaire, la problématique est .évidemment moindre mais un horaire réduit signifiera souvent le report du partnership si ce n’est pas purement la disparition de vos chances d’y accéder.
Ceci étant dit, ne vous découragez pas car si vous êtes prête à vivre avec ces irritants, vous trouverez probablement chaussure à votre pied car de plus en plus de cabinets vont faire des concessions afin de s’adjoindre les services d’une juriste de qualité.
En terminant, je vous suggère d’aborder la question sous l’angle d’une diminution de vos objectifs d’heures facturables plutôt que de parler de quatre jours par semaine, la pilule risque de mieux passer.
Je vous souhaite la meilleure des chances et une bonne semaine.
La Question au Recruteur
Chaque semaine, le recruteur juridique Pierre Arcand répond à une question posée par vous, chers lecteurs.
La Question au Recruteur de la semaine est choisie parmi toutes celles reçues sur le site. Toutes les questions sont bonnes pour autant qu’elles concernent votre carrière de juriste.
Sur l'auteur
Pierre Arcand s'est spécialisé en recrutement juridique après avoir pratiqué le droit pendant une douzaine d'années. Ayant été associé au sein de cabinets boutiques ainsi que d'un important cabinet de Montréal, il connaît bien la communauté juridique et les enjeux reliés à la pratique du droit tant en cabinet qu'en entreprise. Arcand et Associés, une entreprise spécialisée dans le recrutement de cadres et de professionnels, a été fondée en 1999. Pierre Arcand et son équipe apporte un soutien professionnel tant aux entreprises qu'aux cabinets qui cherchent à recruter les meilleurs candidats disponibles.
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