Le rôle stratégique de l’avocat face à la Loi 25

Sonia Semere
2025-07-11 15:00:59

Face aux exigences croissantes de la Loi 25 en matière de protection des renseignements personnels, un cabinet prend les devants. DS Avocats annonce le lancement, dès août 2025, de programmes d’accompagnement mutualisés pour soutenir les entreprises dans leur démarche de conformité.
À la tête de cette initiative : Me Natacha Boivin, avocate associée, qui mettra à profit une vaste expertise acquise auprès de plus de 500 organisations, tant au Québec qu’à l’international.
L’objectif : outiller les entreprises de manière proactive, dans un cadre collectif, accessible et encadré par une experte reconnue en protection des données personnelles.
Mais en quoi consiste concrètement ce programme? Comment l’approche préventive, et plus particulièrement la prévention stratégique, peut-elle faire une réelle différence pour les organisations? On a jasé avec Me Boivin.
En quoi ce nouveau programme d’accompagnement se distingue-t-il des services habituellement offerts par DS Avocats? Est-ce une approche plus proactive, plus opérationnelle?
Ce qui rend cette initiative unique, c’est son format mutualisé, par cohorte. Plutôt que d’offrir un accompagnement individuel, souvent plus onéreux, nous proposons un parcours structuré où plusieurs organisations du même type avancent ensemble vers la conformité à la Loi 25.
Il ne s’adresse pas seulement aux PME, mais à toute entreprise privée, qu’elle soit à but lucratif ou non. Chaque cohorte est définie selon le profil des participants, par exemple, des organisations à but non lucratif, des entreprises privées ou encore des cabinets professionnels, ce qui permet d’adapter les contenus à leur réalité terrain. Il s’agit d’un programme hybride, à mi-chemin entre la formation continue et le conseil juridique, avec des dates fixes et une structure qui permet aux participants de s’inscrire en ligne.
Pour l’instant, ces cohortes sont offertes au secteur privé, mais nous prévoyons également des parcours adaptés au secteur public. Toute organisation qui emploie du personnel ou traite des renseignements personnels est visée par la Loi 25, et notre objectif est de leur offrir un accompagnement accessible, concret et collectif.
Pourquoi lancer ce programme maintenant, en période estivale? En quoi l’été représente-t-il un moment de vulnérabilité accrue pour les entreprises sur le plan de la cybersécurité?
Les périodes de vacances, comme l’été ou le temps des Fêtes, sont particulièrement sensibles en matière de cybersécurité. Les cybercriminels savent que les effectifs sont réduits, que la vigilance est souvent en baisse et que les mécanismes de réponse sont moins efficaces. Cela crée un terrain propice aux attaques. Statistiquement, on observe d’ailleurs une hausse des cyber incidents durant ces périodes. Or, une cyberattaque peut rapidement devenir un incident de confidentialité, nécessitant une déclaration à la Commission d’accès à l’information.
C’est souvent à ce moment-là que les organisations réalisent qu’elles n’avaient pas mis en place les mesures exigées par la Loi 25. Lancer ce programme maintenant permet donc aux entreprises de se préparer durant l’été, de poser les premiers gestes, et de démarrer plus concrètement en août. C’est aussi une période où plusieurs en profitent pour mettre en place des programmes de formation internes. Le calendrier est donc stratégique : il tient compte à la fois des risques accrus et de la capacité des entreprises à amorcer une démarche structurée avant la rentrée.
Quel rôle jouez-vous concrètement dans le cadre de ce programme? Comment intervenez-vous auprès des entreprises participantes?
Je dirige les webinaires interactifs, j’assure les sessions de questions-réponses, et surtout, je fournis toute la documentation nécessaire à la mise en conformité avec la Loi 25. La production de ces documents, politiques, gabarits, procédures, registres, est un volet essentiel du programme. Je les conçois en fonction des contenus abordés, puis j’accompagne les participants pour qu’ils puissent les adapter à leur propre réalité organisationnelle.
L’objectif, c’est qu’à la fin du parcours, chaque entreprise reparte avec une boîte à outils complète, prête à être utilisée en toute autonomie. Mon intervention repose donc autant sur la pédagogie que sur le soutien pratique. Comprendre la Loi 25 est fondamental pour identifier ses obligations, mais aussi pour choisir les moyens techniques et organisationnels appropriés. C’est cette compréhension active qui permet une mise en conformité durable.
Comment est née l’idée de développer ce programme? Répond-il à une demande spécifique des entreprises?
Cette idée a émergé au fil des années. J’ai commencé à intervenir auprès de regroupements d’entreprises, comme des associations, et je me suis rapidement aperçue qu’il existait une forte demande pour un accompagnement à la mise en conformité avec la Loi 25. Cependant, le coût d’un accompagnement individuel était un frein important pour de nombreuses entreprises, surtout pour les plus petites, qui avaient du mal à le financer. Il y a donc deux raisons qui expliquent la création de ce programme.
La première est budgétaire : en proposant un format mutualisé, on permet à chaque entreprise de bénéficier du même service qu’un accompagnement individuel, mais à un coût bien moindre. La deuxième raison, tout aussi importante, est l’échange. Permettre aux entreprises de partager leurs expériences, leurs défis et leurs solutions concrètes est un levier extrêmement puissant. Ce partage crée une dynamique d’entraide qui enrichit le processus d’apprentissage, car les solutions viennent souvent des échanges entre pairs.
Avec ce programme, peut-on dire que le rôle de l’avocat évolue vers un accompagnement plus stratégique, orienté vers la prévention?
Absolument. Ce programme illustre bien l’évolution de notre rôle. L’accent est mis sur la prévention et sur l’optimisation des processus internes. L’objectif n’est pas seulement de garantir la conformité à la Loi 25, mais aussi d’améliorer l’efficacité organisationnelle. Nous allons au-delà de la simple réponse juridique : nous proposons un accompagnement qui aide les entreprises à réfléchir à leurs pratiques et à se doter des outils nécessaires pour fonctionner de manière plus efficiente.
L’accompagnement devient donc plus stratégique, et moins réactif aux incidents. Bien sûr, nous continuons à gérer les situations de crise lorsque cela est nécessaire, mais l’objectif principal est de préparer les entreprises à être autonomes, capables de gérer ces défis par elles-mêmes.