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Une poursuite d’1,5 million $ contre la DPJ Mauricie-Centre-du-Québec

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Radio Canada

2025-07-11 13:15:03

Une poursuite d’1,5 million $ a été intentée par un parent qui estime avoir été lésé par l’organisation. Les avocats?

Marie-Sandrine Bélanger du cabinet Cain Lamarre


La Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) de la Mauricie-Centre-du-Québec, représentée par Me Marie-Sandrine Bélanger du cabinet Cain Lamarre, fait face à une poursuite civile d’1,5 million $ intentée par un parent qui estime avoir été lésé par l’organisation. Le parent réclame un million $ en dommages punitifs, 165 000 $ pour des pertes de salaire, des frais d’avocat et de psychologue. La poursuite réclame également 400 000 $ en dommages moraux pour la perte de relation avec les enfants et le traitement dont le parent a été victime.

Le parent n’a pas vu ses enfants depuis décembre 2024. La poursuite allègue que la DPJ a fait preuve de négligence grossière. Elle lui reproche d'avoir bâclé son travail et qu’il s’agit d’une faute tellement lourde qu’elle demande compensation. La partie demanderesse affirme que la DPJ à Trois-Rivières a une culture organisationnelle pathologique.

Afin de respecter le processus judiciaire en cours et les règles de confidentialité protégeant l'identité des enfants, la DPJ a préféré ne pas commenter et déposera des éléments en réponse à la poursuite.

Un conflit entre les parents

En 2017, la DPJ intervient dans un conflit entre deux parents en séparation. L’affrontement était si grave que les enfants se trouvent au beau milieu d’un conflit de loyauté qui les place à risque de mauvais traitements psychologiques. Après une année d’intervention, quelques mois après avoir reconnu que la situation était très grave, la DPJ ferme le dossier, sans donner de raison. La partie demanderesse affirme que c’est alors qu’elle commence à connaître des problèmes.

Elle croit que l’autre parent a réussi à manipuler les intervenants pour les convaincre qu’elle est un parent aliénant. Elle estime que les intervenants manquent de formation pour s’occuper des cas comme le sien. Dans la poursuite, il est indiqué qu’elle était systématiquement discréditée, rejetée, mise de côté, dévalorisée devant les enfants.

« La DPJ faisait un portrait indigne et inexact de [la partie demanderesse] devant les enfants et devant le tribunal, sans oublier devant l’école des enfants, le camp de jour des enfants et des professionnels gravitant autour de la famille », est-il indiqué. Le parent a l’impression que la DPJ a brisé la confidentialité de son dossier.

Vivan Nguyen

L’avocate de la partie demanderesse, Me Vivan Nguyen, estime que la DPJ a épousé la cause d’un parent, au détriment de l’autre. Dans la poursuite, on peut lire que des notes de travail d’intervenants de la DPJ indiquent que les enfants n’aiment pas la partie demanderesse en raison des commentaires de l’autre parent. Malgré cela, les signalements pour conflit de loyauté et comportement aliénant sont fermés sans explication.

La partie demanderesse allègue que des intervenants ont été témoins de comportements violents de la part de l’autre parent et que la DPJ a reçu des signalements de tiers neutres qui n’ont pas été retenus. Tout le monde a signalé et ils s’acharnent à dire que c’est moi qui n’est pas correct, déplore-t-elle. Le parent estime avoir perdu sept années irrécupérables avec ses enfants et qu’une partie de la relation cristallisée avec eux est difficilement remédiable. « Je suis traumatisé », affirme-t-il.

Allégation de faux diagnostics

La poursuite allègue que la DPJ a émis des faux diagnostics de santé mentale à son sujet. Dans le dossier, il était indiqué que le parent souffrait de trouble de la personnalité et de trouble anxieux. Il affirme ne souffrir nullement de troubles mentaux. Il a demandé une expertise privée auprès d’un psychiatre qui a confirmé qu’il ne souffre d'aucune pathologie. Le parent affirme que les intervenants ont refusé de consulter ce rapport d’expertise. Le fait de conserver des informations mensongères dans le dossier a influencé le tribunal, croit la poursuite. « S'ils ne veulent pas écouter la parole des experts, je ne sais pas à qui se fier, mais ce n’est pas à eux », affirme la partie demanderesse.

La partie défenderesse affirme qu’un des enfants a de sérieuses difficultés à l’école. Les bulletins scolaires confirment des échecs à répétition et des problèmes de comportement. Le parent demande à l’autre de placer l’enfant dans une école spécialisé, ce qu’il refuse. La partie demanderesse fait un signalement pour de la négligence éducative. La DPJ et le centre de services scolaire du Chemin-du-Roy soutiennent que l’enfant a un très bon cheminement scolaire et que tout va bien, alors que les documents démontrent le contraire.

Des démarches ardues

En juin 2025, le parent a fait une démarche pour demander à la DPJ de payer ses frais juridiques parce qu’il affirme qu’il n’a plus les moyens de le faire. Cette requête a été rejetée par le juge, mais les actions de la DPJ lors de l’audience lui ont laissé un goût amer. Le père de la partie demanderesse a contribué à financer une partie des frais d’avocats. Il est âgé de 81 ans, a une condition cardiaque et est en phase terminale d’un cancer.

Dans le but de confirmer cette information devant la cour tout en ménageant l’homme âgé, l’avocate a produit un document notarié dans lequel le père reconnaît que son enfant a une dette envers lui. La DPJ a refusé d’accepter le document et a réclamé que l’homme en fin de vie vienne témoigner en cour, même s’il habite à plus de deux heures de route du palais de justice.

Lors de cette audience, pendant une heure, la DPJ Mauricie-Centre-du-Québec a refusé de reconnaître le fait qu’elle est sous tutelle, pour ensuite reconnaître qu’elle est effectivement sous tutelle, mais pas spécifiquement dans le dossier de la partie demanderesse.

La DPJ a l’immunité

La loi confère à la Direction de la protection de la jeunesse l’immunité contre les poursuites civiles. Or, l’avocate de la partie demanderesse, Vivan Nguyen, croit qu’il est possible de démontrer que dans ce dossier, la DPJ a agi de manière tellement incompétente que l’immunité doit être levée. Elle croit que la DPJ doit être imputable, parce qu’en ce moment, la DPJ fait ce qu’elle veut, dénonce-t-elle.

À deux reprises par le passé, des jugements ont condamné la DPJ à payer des dommages, mais ces jugements ont été cassés en appel. Me Nguyen croit que cette cause pourrait se rendre jusqu’en cour suprême puisqu’il est d’intérêt public de déterminer si la DPJ a effectivement l’immunité complète, même lorsqu'elle agit avec grossière incompétence. La partie demanderesse sait que le combat sera difficile, mais elle souhaite le faire pour tous les parents qui estiment que la DPJ a commis des fautes graves.

Une organisation sous tutelle

Cette poursuite intervient dans un contexte difficile pour la DPJ Mauricie-Centre-du-Québec. Le ministre Lionel Carmant l’a mise sous tutelle le 9 octobre 2024, à la suite de révélations contenues dans un rapport de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Dans un passage du rapport, on fait état que dans plusieurs dossiers, des informations sont omises, manipulées ou inventées afin de prendre les parents en défaut, et que dans la majorité des cas, les intervenants n'ont utilisé aucun outils cliniques pour appuyer leurs décisions et s'assurer qu'elles soient objectives. La partie demanderesse soutient que les mauvaises pratiques de la DPJ Mauricie-Centre-du-Québec se perpétuent même sous la tutelle. Il n’y a rien qui change, c’est encore pire, soutient-elle.



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