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Les opposants à la Loi sur la laïcité plaident leur cause en Cour supérieure

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Radio -canada

2020-11-02 10:55:00

La Loi sur la laïcité de l'État a déjà été examinée par les tribunaux, mais c'est la première fois qu'elle l'est sur le fond. Le débat devrait durer de cinq à six semaines.

Des dizaines d'opposants à la Loi sur la laïcité sont venus manifester. Photo : Radio-Canada
Des dizaines d'opposants à la Loi sur la laïcité sont venus manifester. Photo : Radio-Canada
La Cour supérieure du Québec commence à entendre lundi les arguments de plusieurs groupes qui contestent la Loi sur la laïcité de l'État, adoptée en juin 2019 par l'Assemblée nationale.

La loi, souvent appelée « le projet de loi 21 », même si elle a été adoptée et est d'ores et déjà en vigueur, est contestée par plusieurs groupes qui veulent la faire annuler, en tout ou en partie.

Sa disposition la plus contestée est celle qui interdit le port de signes religieux aux juges, aux policiers, aux procureurs de la Couronne, aux gardiens de prison, et aux enseignants des écoles publiques du primaire et du secondaire.

Ceux qui la contestent plaident qu'elle est discriminatoire envers les minorités religieuses, dont les femmes musulmanes voilées, particulièrement visées par la loi, selon eux.

La Loi sur la laïcité a été assortie de la clause dérogatoire – souvent appelée « clause nonobstant » – pour tenter d'éviter une contestation par ceux qui feraient valoir que la loi est discriminatoire et contraire à la Charte canadienne des droits et libertés, notamment à ses articles 2 et 15 protégeant la liberté de religion et le droit à l'égalité.

Les plaignants ont cependant adopté différentes stratégies, dont celle d'utiliser d'autres moyens pour la faire invalider.

Ils vont notamment se servir de l'article 28 de la Charte – une disposition peu utilisée, portant sur l'égalité des sexes – et qui serait selon eux à l'abri de l'effet de la clause dérogatoire.

Pour cette même raison, l'article 23 de la Charte, qui protège la langue d'instruction des minorités linguistiques, sera aussi soulevé.

La Loi sur la laïcité de l'État a déjà été examinée par les tribunaux, mais c'est la première fois qu'elle l'est sur le fond. Le débat devrait durer de cinq à six semaines.

Jusqu'ici, les tribunaux se sont plutôt penchés sur des demandes visant à la suspendre en attendant que ces audiences aient lieu, afin de minimiser les dégâts dans l'intervalle.

La Cour supérieure a refusé de leur accorder une injonction en juillet 2019, puis la Cour d'appel avait fait de même, en soulignant que le débat était complexe et méritait d'être étudié en profondeur.

La Cour suprême du Canada a aussi refusé d'entendre l'appel de cette décision, sans fournir les motifs de sa décision.

Manifestation devant le palais de justice

Plusieurs personnes sont venues manifester leur appui aux demandeurs avant le début des audiences devant le palais de justice de Montréal. Ils brandissaient des pancartes exprimant leurs arguments ou leur dégoût.

Parmi eux se trouvaient des étudiants de la Faculté de droit de l'Université McGill faisant un ''sit-in'' en disant avoir l'appui de 350 étudiants et d'une vingtaine de professeurs qui ont signé une lettre ouverte appuyant leur revendication.

Ils affirment que la loi désavantage « les femmes musulmanes, les hommes juifs, et les hommes sikhs de manière disproportionnée » puisqu'ils sont plus susceptibles de porter un signe religieux.

Selon eux, empêcher des minorités religieuses d’accéder à des emplois dans la fonction publique « va à l’encontre de la neutralité religieuse de l’État, un aspect fondateur du constitutionnalisme canadien qui ne peut pas être suspendu par la clause nonobstant de la Charte canadienne ».

Le ''sit-in'' a été organisé par l'Association des étudiant.e.s musulman.e.s en droit et l'Association étudiante de droit radical de l'Université McGill.

Les opposants à la loi

Lundi, ce sont quatre demandes d'annulation distinctes qui seront entendues par le juge. Elles ont été regroupées puisque leur objectif est le même, bien que leurs arguments ne soient pas identiques.

L'une d'entre elles a été déposée par le Conseil national des musulmans canadiens, l'Association canadienne des libertés civiles et Ichrak Nourel Hak, une étudiante en enseignement qui porte le hidjab et qui ne veut pas être obligée de le retirer pour enseigner dans une école publique. Ils plaideront plusieurs arguments constitutionnels.

La Fédération autonome de l'enseignement (FAE) a déposé une autre demande d'invalidation, car elle estime que la loi brime la liberté de religion des enseignants et menace leurs conditions de travail.

Un autre contestataire est la Commission scolaire English Montreal (CSEM). Selon elle, non seulement la loi contrevient à l'égalité des sexes, mais aussi à l'article 23 de la Charte, qui protège le droit à l'instruction dans la langue de la minorité, dans ce cas, les communautés anglophones au Québec.

Selon la CSEM, cet article a évolué au cours des années jusqu'à inclure un droit de gestion exclusif accordé aux communautés minoritaires pour le bon fonctionnement de leurs systèmes d'écoles publiques.

Finalement, trois enseignantes ont aussi déposé un recours, épaulées par le comité juridique de la Coalition Inclusion Québec, une organisation qui regroupe des citoyens et des groupes communautaires opposés à la loi.

Plusieurs organisations vont présenter leur propre point de vue afin de démontrer que la loi est nuisible : parmi elles se trouvent la World Sikh organization of Canada, Amnistie internationale - section Canada francophone et l'Alliance de la fonction publique du Canada.

Québec défend sa loi

Au fil des protestations, le gouvernement caquiste a défendu sa loi. Il fera de même devant la cour.

Le premier ministre François Legault a qualifié la loi de « modérée » et d'« équilibrée », rappelant à maintes reprises qu'elle a été adoptée par l'Assemblée nationale et qu'elle reçoit un large appui de la population québécoise. Pour lui, elle ne contrevient pas à la liberté de religion, car tous les citoyens sont libres de pratiquer la religion de leur choix.

Le ministre de l'Éducation Jean-François Roberge a soutenu que la loi n'est « ni raciste ni sexiste », car elle s'applique aux hommes comme aux femmes. Et le gouvernement du Québec a aussi des alliés.

Des citoyens et des groupes veulent que la loi soit préservée dans son intégralité et vont appuyer le gouvernement du Québec.

Lors du débat en cour, interviendront donc le Mouvement laïque québécois (MLQ), qui veut défendre le droit des élèves et des parents, et l'organisation Pour les droits des femmes du Québec (PDF).
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1 commentaire

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 3 ans
    Masbourian et RadioCan pris la main dans le sac
    À l'émission du matin sur "Icitte" (marque de RadioCan au Qc), Masbourian a introduit la chronique de Chantal Hébert de ce matin en déclarant que cette dernière parlerait de "cette loi mal aimée", ce à quoi elle a répliqué dès le début en expliquant que cette loi recueillait un fort appui dans la population.

    Pour Masbourian (et l'éco-système médiatique RadioCanadien), tout ceux qui se situent hors du terrain idéologique multiculturalilste n'existent pas!

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