Comment être un allié de la communauté 2ELGBTQ+ dans sa pratique?
Marie-ève Buisson
2023-04-14 11:15:00
Durant l’année 2020-2021, le Barreau du Québec avait près de 774 membres sur 30 000 qui ont indiqué appartenir à la communauté. « Si seulement une fraction des avocats du Québec en font partie, la responsabilité d’inclusion et de bienveillance face à la communauté 2ELGBTQ+, elle, devrait interpeller et être adoptée par l’ensemble des professionnels du milieu juridique », rappelle la Financière des avocates et des avocats.
Établir une relation de confiance
Comme avocat, pour fournir d’excellents services juridiques, il faut être en mesure d’établir une relation de confiance avec nos clients. Cela peut être difficile lorsqu’on ne comprend pas la réalité de ce qu’ils vivent, qu’ils soient défavorisés, handicapés, d’une identité de genre ou d’une orientation sexuelle différente de la nôtre. L’ouverture d’esprit et le respect seront la base d’une relation de confiance.
S’éduquer et s’intéresser aux enjeux
Une chose importante pour offrir un espace sécuritaire à la communauté 2ELGBTQ+ est de s’intéresser au sujet et d’aller chercher de l’information, que ce soit en parlant avec différents alliés ou en suivant des formations.
L’Association du Barreau Canadien offre des formations à l’interne pour les membres et la magistrature. C’est une formation de deux heures sur l’histoire sociale et juridique de la communauté et de la diversité. Ces formations vont éventuellement être données au public et aux autres avocats qui ne sont pas membres de l’Association.
Il y a aussi plusieurs autres organismes qui offrent de la formation, de la démystification, de la vulgarisation et une sensibilisation aux réalités de la communauté. Pensons à Inclusion 2ELGBTQ+ qui offre un répertoire des activités de formation et de sensibilisation aux réalités de la communauté 2ELGBTQ+ au Québec.
L’authenticité et la bienveillance
Quand on fait une démarche pour mieux comprendre la réalité d’une personne, l’authenticité est essentielle. Il faut que cette démarche soit véritable et remplie de bienveillance, c’est-à-dire de garder une ouverture d’esprit, d’accueillir la différence de l’autre et de ne pas faire de jugement.
On peut parfois ne pas partager les valeurs de notre client ou ne pas comprendre son parcours de vie. Mais l’avocat n’est pas là pour juger, il est là pour conseiller et représenter son client dans une situation juridique précise. Il doit être son meilleur allié et son défenseur dans la situation pour laquelle il est allé consulter.
Inclure les membres de la communauté dans les activités de formation au bureau
Si un bureau d’avocats veut mettre en place une formation sur les réalités de la communauté 2ELGBTQ+, il ne doit pas oublier d’inclure des membres de la communauté dans cet espace-là. Si on a des gens à l’interne qui font partie de la communauté, il faut les consulter, s’assurer qu’ils sont inclus et voir avec eux s’ils sont intéressés à faire partie de la formation.
Si on est bien intentionné comme président d’un cabinet et qu’on met en place quelque chose sans avoir consulté les gens concernés, on risque de ne pas avoir leur adhésion et de faire des erreurs. On peut faire fausse route lorsqu’on inclut pas les gens de la communauté.
Équilibre entre éducation et divertissement
Dans les milieux de travail, il faut atteindre un équilibre entre éducation et divertissement. Si vous faites des activités sociales avec une drag queen, par exemple, ça peut être bien, mais il ne faut pas faire que ça. Il faut équilibrer cette activité avec des ateliers de sensibilisation et des exercices de vulgarisation. Cela va permettre aux gens du cabinet de poser des questions dans un environnement sécuritaire où l’on peut offrir des réponses adéquates.
Inclure les alliés
Il est très important d’impliquer et d’engager des alliés. Ce sont des gens qui sont déjà sensibilisés, qui ont des membres de la communauté dans leur famille ou leurs amis ou qui sont tout simplement intéressés par le sujet.
Les alliés ont un rôle fondamental puisqu’ils peuvent atteindre un auditoire et partager une réalité que quelqu’un dans la communauté ne peut pas nécessairement partager. Le point de vue de quelqu’un qui est à l’extérieur de la communauté est différent de la personne qui en fait partie.
Respecter le niveau de confort des gens
Que ce soit un client ou un collègue, ce n’est pas parce qu’il fait partie de la communauté qu’il a envie d’être le porte-parole. Il faut respecter ça. On peut aussi faire partie de la communauté et ne pas connaître son histoire et son contexte juridique.
Une erreur serait d’assumer qu’une personne gay dans un bureau d’avocat est prête et intéressée à donner une formation sur le sujet. Ce n’est pas toujours le cas et il faut respecter le niveau de confort de cette personne-là.
Les activités de formation doivent provenir de la direction
Quand on a des activités de diversité et d’inclusion, pour qu’elles soient efficaces, il faut qu’elles viennent du plus haut niveau dans la direction du cabinet ou au département juridique. Ça envoie un message de légitimité et de sérieux dans la démarche.
Inclure vos pronoms dans vos courriels
Plusieurs tribunaux au Canada obligent les avocats, les témoins et toute personne qui interagit avec la cour d’informer le tribunal de ses pronoms préférés. C’est le cas en Colombie-Britannique, mais pas au Québec.
Pourquoi inscrire ses pronoms? Ça permet de sortir de la marginalité. Certaines personnes peuvent avoir des pronoms qui peuvent différer avec leur présentation physique. C’est aussi un signe d'ouverture et de sensibilité. Ça démontre qu’on comprend qu’il n’y a pas que des hommes et des femmes dans notre société, qu’il y a en fait tout un éventail de diversité de genre.
Pour engager une relation avec un client, vous pouvez lui dire par courriel: « Bonjour, je m’appelle Steeve Bujold, mes pronoms sont il/lui. Et vous? ». De cette façon, le client aura le choix de dévoiler son identité de genre ou non avec l’avocat, sans se sentir mal à l’aise. C’est une bonne façon d’engager une relation de confiance avec le client.