Demande d’action collective contre le Diocèse de Québec
Radio -canada
2020-08-24 10:23:00
La demande a été déposée vendredi matin au palais de justice de Québec par les cabinets Arsenault Dufresne Wee Avocats et Bellemare Avocats au nom de deux victimes d’abus sexuels de la part du clergé.
Gaétan Bégin et Pierre Bolduc affirment avoir été agressés sexuellement par des prêtres du Diocèse de Québec lorsqu’ils étaient adolescents. Les gestes remontent aux années 1950 et 1960.
Selon les avocats Alain Arsenault et Marc Bellemare, des centaines de victimes, voire davantage, pourraient se joindre au mouvement.
« Ça risque d'être un des recours collectifs les plus importants en termes de nombre de victimes », soutient Me Arsenault.
L’avocat de Montréal a mené des actions collectives pour agressions sexuelles contre plusieurs organisations religieuses, dont la congrégation de Sainte-Croix et l’Oratoire Saint-Joseph.
Il a indiqué que, statistiquement, 10 % des prêtres au sein de l’Église catholique commettent des abus. Sachant qu’il y avait en moyenne 1000 prêtres en activité sur le territoire du Diocèse de Québec au cours de la période visée par la demande d’intenter une action collective, le nombre de victimes pourrait être très élevé, prévient l’avocat.
« En moyenne, il devrait y avoir 100 prêtres [agresseurs] et facilement, on peut trouver 40 à 50 victimes qui dénoncent par prêtre. Ça commence à faire beaucoup de gens », souligne Me Alain Arsenault.
Abolition du délai de prescription
L’enclenchement d’une telle démarche a été rendu possible par l’adoption, le 12 juin dernier, de la loi annulant le délai de prescription de 30 ans qui était fixé pour pouvoir intenter une poursuite au civil contre un présumé agresseur.
« Je pense que c'est un moment historique pour les victimes. C'est un outil dont les victimes vont pouvoir bénéficier à partir de maintenant », a déclaré l’avocat Marc Bellemare en point de presse.
Lui et Me Arsenault ont invité toute personne qui aurait été victime d’abus par un membre du Diocèse de Québec entre le 1er janvier 1940 et aujourd’hui à se manifester.
« Il est important de dire à ces gens-là que vous allez être traités avec respect et considération, qu'on va protéger votre anonymat et qu'on va faire les procédures nécessaires pour que justice vous soit rendue », insiste Me Arsenault.
Vers un règlement à l'amiable?
Le processus d’action collective se déroule en deux étapes. Il y a d’abord la demande d’autorisation, qui, si elle est acceptée, est suivie du procès.
Les deux avocats espèrent cependant ne pas avoir à en arriver là. Ils invitent le Diocèse de Québec et son archevêque, Mgr Gérald Cyprien Lacroix, à négocier un règlement à l'amiable pour éviter aux victimes un procès long et douloureux.
« Évidemment, la preuve reste à faire, il faut qu'il y ait des gens qui soient capables de raconter leur histoire, il faut convaincre le juge que tout ça est arrivé, mais évidemment, avec la bonne collaboration de Mgr Lacroix, on pourrait en arriver éventuellement à des ententes correctes et acceptables pour l'ensemble des victimes », plaide Marc Bellemare.
Dans l’éventualité où l’action collective irait de l’avant et que des indemnités seraient versées par le Diocèse de Québec, leur montant varierait d’une victime à l’autre.
Les avocats qui pilotent le dossier espèrent obtenir un montant maximum par demandeur pouvant atteindre 600 000 $, soit 300 000 $ en dommages moraux, 150 000 $ de pertes monétaires et 150 000 $ de dommages punitifs.
Enquête interne
S’exprimant au nom de l’Archidiocèse de Québec, l’évêque auxiliaire Marc Pelchat, qui coordonne le plan d’action diocésain visant à protéger les personnes mineures et vulnérables, a réagi brièvement au dépôt de la demande d’exercer une action collective.
« Nous avons entrepris une enquête interne et collaborerons avec la justice pour faire la lumière sur ces allégations. Nous ne commenterons pas davantage à ce stade du processus judiciaire », a réagi Mgr Pelchat dans un communiqué publié en début d’après-midi par l’Archidiocèse.
L’organisation a tenu à rappeler qu’elle avait mis en place, depuis les années 1990, « plusieurs mesures pour la prévention des abus, l’accueil et l’accompagnement des victimes, et la collaboration avec les instances judiciaires et civiles ».