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Exclusif - De l'aide d'un organisateur libéral pour devenir juge

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Vincent Larouche - Ruefrontenac.com

2010-11-24 10:15:00

Incroyable! Un ancien commissaire à l'immigration affirme qu'un organisateur libéral l'a référé au bureau de Jean Charest pour obtenir un poste de juge. Lisez la suite...
Nouvelles allégations troublantes sur l'organisateur libéral Georges Boudreault, accusé lundi d'avoir arrangé le versement de liasses d'argent au candidat David Grégoire.

Dans une entrevue exclusive à Rue Frontenac, un ancien commissaire à l'immigration affirme que le vieux routier du PLQ l'a référé au bureau de Jean Charest pour obtenir un poste de juge et lui a fait miroiter une «récompense» dans le futur s'il acceptait de se présenter pour les libéraux dans un comté perdu d'avance.

Comme les allégations de financement illégal rapportées par Radio-Canada lundi, ces nouvelles accusations contre Georges Boudreault concernent le comté de Masson, sur la Rive-Nord près de Montréal.

En septembre 2004, alors que des postes de juge sont ouverts à la Cour du Québec, le commissaire Stéphane Handfield (photo) soumet sa candidature par les voies officielles.

Son mandat de juge administratif fédéral à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié doit prendre fin trois mois plus tard, et il souhaite joindre les rangs de la prestigieuse magistrature québécoise.

«On va regarder ce qu'on peut faire»

Pour aider sa cause, des proches le mettent en contact avec l'organisateur libéral Georges Boudreault, à l'aube de l'année 2005. M. Boudreault, organisateur politique chevronné, a été salué comme un «bénévole exemplaire» par Jean Charest la semaine dernière.

«J'ai dit à M. Boudreault: Écoutez, on me réfère à vous, j'ai soumis une candidature pour un poste de juge», raconte Me Handfield.

Selon lui, Georges Boudreault lui aurait alors répondu «On va regarder ce qu'on peut faire» et lui aurait dit de faxer son CV à Chantal Landry, responsable des nominations au bureau du premier ministre Jean Charest.

Il s'agit de la même Chantal Landry qui a témoigné devant la commission Bastarache et qui a dit ne pas s'occuper de nominations de juges, tout en avouant qu'elle soulignait parfois au premier ministre la présence de sympathisants libéraux dans la liste de candidats.

Me Handfield prétend avoir ensuite rencontré un autre militant libéral influent, qu'il refuse toutefois d'identifier, et qui lui aurait aussi conseillé de faxer son CV à Mme Landry. Ce dernier lui aurait même fourni le bon numéro de télécopieur. Peine perdue, sa candidature n'est pas retenue.

Une demande pour être candidat

Le juriste retourne donc à sa pratique d'avocat spécialisé en immigration. Une carrière en pleine ascension qui l'amène à récolter plusieurs gros dossiers. Il est même invité à l'émission Tout le monde en parle, à l'hiver 2008. Puis, le 4 août 2008, Georges Boudreault lui laisse un message. Il veut lui parler. Stéphane Handfield soutient que les deux n'avaient eu aucun contact depuis la discussion sur le poste de juge.

Ils se rencontrent le 13 août à la permanence du Parti libéral du Québec à Montréal, au 7240, rue Waverly, puis sortent dîner dans la Petite-Italie.

«À ce moment-là, il me parle de Mascouche, où j'habite, et des élections provinciales qui s'en viennent. Il me dit qu'il est responsable de trouver des candidats pour le Parti libéral», relate Me Handfield.

«Il m'indique qu'il veut m'avoir comme candidat libéral dans Masson et me dit que mon nom a été "discuté" à Mascouche», ajoute l'avocat.

Stéphane Handfield aurait alors dit à l'organisateur qu'il était inquiet pour les suites de sa carrière après une défaite électorale qui était presque certaine.

«Je lui ai dit je suis avocat. Si je me présente comme candidat, ma pratique va en prendre un coup. Et se présenter libéral dans Masson, c'est perdu d'avance.» Depuis sa création en 1988, la circonscription a été détenue en permanence par le PQ, sauf pour un bref épisode adéquiste en 2007-2008.

Georges Boudreault lui aurait alors indiqué de ne pas s'inquiéter pour sa carrière.

«Il a dit Stéphane, tu sais qu'on prend soin de notre monde», raconte l'avocat, convaincu qu'il s'agissait d'une référence à sa vieille demande d'aide pour devenir juge.

«Je ne peux pas le prouver. Mais ça ne prenait pas la tête à Papineau pour comprendre. C'était clair. Je lui avais parlé de devenir juge et il savait fort bien que je n'avais pas eu le poste», insiste-t-il.

Un appui pour le dénonciateur David Grégoire

Stéphane Handfield a finalement refusé l'offre et n'a plus jamais parlé à Georges Boudreault par la suite. S'il a décidé de déballer son sac aujourd'hui, c'est d'abord parce qu'il a été agacé d'entendre Chantal Landry, devant la commission Bastarache, affirmer qu'elle ne s'occupait pas de la nomination des juges. Mais c'est aussi parce qu'il veut appuyer les dénonciations de David Grégoire, celui qui a été recruté par Georges Boudreault pour porter les couleurs du PLQ dans Masson après le refus d'Handfield.

Lundi, David Grégoire a affirmé à Radio-Canada qu'il a reçu à deux reprises des milliers de dollars d'argent comptant dans le cadre de sa campagne électorale en 2008. Il laissait entendre que ces versements illégaux auraient été orchestrés par Georges Boudreault.

Joint par Rue Frontenac, M. Boudreault a explosé lorsqu'informé des nouvelles allégations à son endroit.

«Non, non, non, non, non! C'est ben niaiseux de sortir mon nom comme ça! Je ne comprends pas ces maudites patentes-là!» s'est-il exclamé, en référence aux propos de MM. Grégoire et Handfield.

M. Boudreault confirme avoir proposé à Me Handfield d'être candidat et l'avoir rencontré au restaurant. Mais il assure n'avoir jamais discuté d'un poste de juge avec lui et ne pas lui avoir promis de récompense en cas de défaite dans Masson. «Je cherchais des candidats, c'est tout. Je n'ai jamais rien négocié avec lui», ajoute-t-il. Il nie aussi avoir référé quiconque à Chantal Landry pour faire avancer sa candidature à un poste de juge.

Au bureau du premier ministre Charest, le porte-parole Hugo d'Amours nie tout aussi vigoureusement les allégations selon lesquelles Chantal Landry se faisait envoyer des CV d'aspirants juges. «La réponse est non, elle ne s'occupe pas de la nomination des juges», martèle-t-il.

Note
Cet article a été publié sur RueFrontenac.com. Il est reproduit ici avec l'autorisation de l'auteur.
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