Le maquilleur spécialisé en horreur est acquitté
La Presse Canadienne
2012-12-22 21:02:00
"Je suis soulagé. C'est comme si j'avais 400 livres de moins sur les épaules", a-t-il déclaré samedi soir à la sortie de la salle d'audience du palais de Justice de Montréal.
Il venait de recevoir le verdict des sept femmes et cinq hommes chargés de le juger, après près de deux journées de délibérations. Les membres du jury devaient ajourner leurs délibérations à 17 h 30, samedi, dans l'éventualité où ils n'avaient pas été en mesure de s'entendre. Cependant, ils ont demandé de prolonger le tout pendant au moins une heure. Leur décision a finalement été annoncée vers 18 h.
"Même si l'opinion publique, la plupart des gens (...) étaient vraiment derrière moi, et que tout le monde disait 'Ben non, c'est impossible que tu sois déclaré coupable', la possibilité était tout le temps là. Pour moi, ce n'était pas acquis que j'allais m'en tirer", a affirmé Rémy Couture.
Pour l'une des rares fois dans l'histoire judiciaire canadienne, un jury devait déterminer si une oeuvre artistique enfreignait les limites de l'expression artistique en vertu des lois canadiennes sur l'obscénité. Les procès en lien avec cette question concernent habituellement des cas de pornographie juvénile.
Les avocats de Rémy Couture ont évidemment accueilli le verdict avec beaucoup de satisfaction.
"On est contents de la décision, c'est certain. On pense que c'était une question évidemment importante. Pas facile, par contre, parce que les images étaient difficiles à voir", a réagi l'une des avocates de l'accusé, Me Véronique Robert.
"Je pense qu'on a droit d'avoir une opinion en faveur ou en défaveur de la chose, mais ici, c'était un procès criminel, a-t-elle poursuivi. La question était de savoir si Rémy Couture a agi comme un criminel en produisant et en diffusant ces images-là, et le jury a décidé que non."
La Couronne, qui dispose d'un délai d'un mois pour interjeter appel, s'est montrée vague en ce qui a trait à ses intentions à ce chapitre.
"Nous avons, comme vous le savez, 30 jours pour y penser. C'est une question de droit, nous prendrons notre décision sur des points de droit. Nous verrons dans 30 jours", s'est contentée de mentionner Me Geneviève Dagenais en quittant la salle d'audience samedi soir.
Rémy Couture et ses avocats ont défendu son travail comme étant une oeuvre d'art. Témoignant pour sa propre défense, le maquilleur spécialisé en horreur a expliqué au jury que son site Internet, qui met en vedette un tueur psychopathe qu'il a créé, n'est pas la pornographie violente décrite par la Couronne.
Le matériel en question inclut des centaines de photos et deux vidéos de fiction qui montrent des meurtres sordides, de la torture, des agressions et de la nécrophilie. Tous ces actes mettent en scène des jeunes femmes qui apparaissent partiellement ou complètement nues.
Il n'y a aucune victime impliquée dans l'affaire. Toutes les productions de Couture étaient des mises en scène et les actrices qui y participaient étaient consentantes. Du faux sang, du latex et du silicone ont été utilisés pour créer des images terrifiantes et réalistes.
"Je crée de l'horreur. Je ne suis pas un pornographe", a déclaré Rémy Couture au jury pendant son procès, disant que le but de ses films était de dégoûter et non d'exciter.
Il a élaboré en expliquant qu'il était inspiré par des films d'horreur et de la littérature et qu'il avait simplement créé un tueur en série et un univers pour lui. Il a décrit son travail comme étant "le faux journal intime d'un tueur en série".
Le maquilleur a argumenté que la nature sexuelle de certaines des photos est secondaire, la décrivant comme accessoire. Il a dit que les effets spéciaux et la valeur artistique étaient ce qui l'intéressait le plus.
Il a également indiqué au jury que certaines personnes ne croyaient pas que les images étaient fausses et lui écrivaient pour lui dire. Rémy Couture dit leur avoir alors répondu avec des images illustrant le processus de création pour prouver que tout était faux. Il a également confié au jury avoir reçu des menaces relativement à son travail.