Quelles solutions contre les notaires à rabais ?

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Delphine Jung

2017-09-28 14:00:00

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La concurrence accrue entre notaires serait à l’origine du problème des notaires à rabais qui tirent vers le bas l’ensemble de la profession.
Roberto Aspri, président de l’Union des notaires
Roberto Aspri, président de l’Union des notaires
D’après Roberto Aspri, président de l’Union des notaires, cette tendance existerait depuis les années 90, « avec l’abolition du tarif obligatoire », décidé par le gouvernement Bourassa.

En effet, depuis le 31 décembre 1990, les tarifs des notaires sont soumis aux règles du libéralisme et donc de la libre concurrence. Depuis, « les honoraires sont réglementés par le Code de déontologie des notaires. Ce Code prévoit que les honoraires doivent être justes et raisonnables selon certains critères, notamment le temps et l’effort consacrés au dossier, la complexité du dossier ainsi que l’expérience et l’expertise du notaire », peut-on lire sur le site de la Chambre des notaires du Québec.

Pour Roberto Aspri, il en résulte une guerre des prix entre notaires. « Ce sont surtout les jeunes, avec peu de dossiers, qui ont commencé à baisser leurs tarifs pour se faire une clientèle », explique-t-il en ajoutant qu’il est impossible de justifier des tarifs très bas, surtout lors de grosses transactions.

Dans l’immobilier résidentiel, certains notaires boucleraient une transaction pour seulement 850 $.

L’année dernière, le cas de Jean-Manuel Estrela avait fait couler beaucoup d’encre. Ce désormais ancien notaire offrait des services à très bas pris, dès le début de sa pratique en 2013. Son cabinet était peu à peu devenu une usine de production d’actes notariés.

La responsabilité du client

François Bibeau, président de la Chambre des notaires ajoute que les gens sont désormais habitués à magasiner et à chercher les meilleurs prix au détriment de la qualité du service. « Il y a un manque de connaissance du métier. Les gens devraient s’informer sur ce qu’est vraiment le travail d’un notaire », dit-il.

François Bibeau, président de la Chambre des notaires
François Bibeau, président de la Chambre des notaires
Il conseille aussi au public d’y aller par référence et de ne pas avoir peur de demander aux notaires qu’elle sera exactement leur tâche.

Pour répondre à cette situation, la Chambre a mis en place des formations qui doivent permettre à ses membres de mieux calculer les coûts. Il s’agit de formations sur la gestion d’études, sur la mise en place d’honoraires justes et raisonnables.

Elles ne sont en revanche pas obligatoires, « mais déjà 500 notaires sur les 3800 y ont participé », précise Me Bibeau.

Alors évidemment, le notaire chargera de toute façon ce qu’il veut en fin de compte, « mais on veut qu’il comprenne qu’il ne doit pas dévaluer son travail », ajoute Me Bibeau.

Effet pervers du fonds d’indemnisation

De son côté, Roberto Aspri souligne l’effet pervers que peut avoir le fonds d’indemnisation. « Le public ne porte pas d’attention sur le fait que le travail puisse être bâclé puisqu’ils se disent que s’il y a un problème, ils seront indemnisés par la Chambre des notaires », avance-t-il, en ajoutant que souvent, les clients ne se rendent pas compte qu’une telle démarche ne se résume pas à la signature d’un papier.

Me Bibeau ne suit pas du tout son confrère sur ce point. « On ne me fera pas croire que les gens choisissent un notaire pas cher en se disant qu’il y a le fonds d’indemnisation. La plupart d’entre eux ne savent même pas qu’une telle procédure existe. L’hypothèse de M. Aspri est saugrenue. »

Le cheval de bataille du président est surtout celui de la communication. Pour lui, la profession souffre encore trop d’idées reçues. « Beaucoup pensent qu’on ne fait que signer des documents. Ce n’est pas vrai. »

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33 commentaires
  1. Ha Bon
    Ha Bon
    il y a 8 ans
    Le fonds d'indemnisation
    « On ne me fera pas croire que les gens choisissent un notaire pas cher en se disant qu’il y a le fonds d’indemnisation. La plupart d’entre eux ne savent même pas qu’une telle procédure existe. L’hypothèse de M. Aspri est saugrenue. »

    Me Bibeau, à moi, ce qu'on ne fera pas croire, c'est que les gens, sans pour autant connaître le nom du régime de protection concerné, ne savent pas pour autant que les notaires sont ultra-responsables des erreurs qu'ils peuvent commettre et qu'ils ont toutes les assurances requises et les fonds spéciaux requis pour couvrir ces erreurs.

    On choisit son médecin en espérant qu'il soit compétent; on est là en matière de vie ou de mort. Et ils sont bien couverts en assurances les médecins. Mais ça n'est pas aisé du tout de les poursuivre pour tout et pour rien et de gagner.

    Un client ne mourra pas de l'erreur d'un notaire, mais il sait qu'il aura toute la vie pour le poursuivre ce notaire assuré jusqu'au bout des cheveux. Alors pourquoi chercher le plus dispendieux, puisque bon ou pas bon, il devra et pourra compenser s'il fait des erreurs. Et bien des intervenants enseignent ça aux gens qui ne le savaient pas encore.

    Conclusion: Ces notaires, mettons-les en concurrence, forçons les à baisser au maximum leurs prix, exigeons et obtenons le meilleur produit et les meilleurs conseils, exigeons qu'ils soient couverts au maximum en assurances et s'il y a erreur ou défaillance on pourra poursuivre et être indemnisé d'une façon ou d'une autre. C'est pas beau ça. Et on voudrait se passer des notaires ?

    • pas si simple...
      pas si simple...
      il y a 8 ans
      pas si simple
      Votre théorie est bien jolie. Sauf qu'il ne s'agit pas d'un "no fault". Le client devra prendre des procédures et les soutenir pendant des années avant d'espérer gagner quelque chose. Et tout ce temps-là, c'est son avocat qui s'enrichira. Ce que vous dites ne tiens pas la route en pratique...

  2. ? !
    Médecin/ notaire/avocat
    Ha Bon,

    Le médecin enterre ses erreurs et le notaire les enregistre. Du bonbon pour l'avocat !

  3. découragé
    découragé
    il y a 8 ans
    membre du public
    Félicitations pour votre concision. J'ai rarement vu quelqu'un démontrer son ignorance en aussi peu de mots. Les notaires ont plus d'études en droit que les avocats. L'impossibilité réside ailleurs. Il faudrait en effet que les notaires renoncent à leur honnêteté fondamentale et à la confiance que le public a en eu pour pouvoir devenir des avocats.

  4. Me Stéphane Lacoste
    Me Stéphane Lacoste
    il y a 8 ans
    Nos amis les notaires
    Les notaires sont des professionnels. Ils ont fait le bac en droit comme les avocats et avec eux.

    Comme avocat, j'ai toujours été triste de voir ou entendre des confrères qui considèrent les notaires comme des professionnels moins importants ou moins méritants. Les notaires ont un rôle particulier à jouer et il sont utiles à notre société. Il y a très certainement des notaires incompétents ou malhonnêtes, comme il y a des avocats qui le sont. La bêtise est généralement bien distribuée.

    S'il est vrai que nos amis du reste du Canada ne connaissent pas la profession de notaire, je ne crois pas que ce soit un modèle à suivre. Ce sont plutôt ces autres juridictions qui devraient s'inspirer de notre régime.

    Il est d'autre part choquant que les acheteurs et vendeurs d'immeubles acceptent, sans sourciller, de payer des milliers ou dizaines de milliers de dollars en commission à des agents immobiliers mais rechignent à payer mille ou mille cinq-cent dollars à leur notaire pour la même transaction. Le travail du notaire étant plus important que celui de l'agent immobilier. Pour ajouter l'insulte à l'injure, c'est le notaire instrumentant qui doit faire le chèque à l'agent immobilier.

    Il est aussi possible pour les notaires d'ajouter de la valeur à leurs services en pratiquant différemment. J'ai moi-même retenu les services d'un notaire brillant, me Paul Germain, pour l'achat de ma maison et il utilisait très bien les nouvelles technologies (il projetait sur un écran la propriété, le certificat de localisation et l'acte de vente) et remettait à chacune des parties un cartable dans lequel se trouvait l'acte de vente et une foule d'information. Son coût de reviens pour cela était sûrement minimal, mais c'était très apprécié des parties. Il est possible d'innover et de ne pas pratiquer le notariat comme au XIXe siècle.

  5. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    euh
    "Y a-t-il des juridictions non anglophones qui ont choisi la common law au dépend du droit civil ? La common law se limite-t-elle aux pays du Commonwealth ?"

    Euh, la common law est d'origine britanique. Il serait donc surprenant que des juridictions autres adoptent un système qui tire ses sources et origine de la couronne britanique, non?

  6. Torrente
    Torrente
    il y a 8 ans
    DSP ne méprise pas le Québec
    DSG est la seule raison pour laquelle je viens sur Droit Inc. J'ai eu l'occasion de lire la plupart de ses commentaires. Je ne crois pas qu'il méprise le Québec, mais fait le constat que l'interventionisme d'état n'a pas que du bien.

  7. Anonyme
    Anonyme
    il y a 8 ans
    La solution exigerait que le gouvernement ait des couilles, mais il n'en a pas.
    La situation des notaires est simple à comprendre: les institutions financières canalisent l'essentiel des commandes d'actes d'hypothèques à travers un guichet unique. Cette machine bien huilée est un quasi-monopole qui dicte ses conditions, et elle a transformé une bonne partie de la pratique notariale en immense machine a saucisses.

    Pour mettre fin à ça, il faudrait que les ordres professionnels ou le gouvernement porte leur culottes devant les "grandes" banques. Ce n'est pas près d'arriver.

  8. Notaire
    Notaire
    il y a 8 ans
    Notaire
    Notre formation est plus longue puisque nous devons savoir plus de chose que vous pour bien conseiller nos clients, comparativement à vous. Ce ne sont pas tous les professionnels qui doivent jongler avec du droit agricole, municipal, fiscal, corporatif, etc, et ce, dans un même dossier. Je vous excuse, cela doit être par déformation professionelle que vous vous penser meilleur que les autres. Ou peut être par manque d’éducation. Une chance que vos confrères ne sont pas tous comme vous, pas grand monde ne se parlerais dans votre milieux, vous êtes dont tous plus meilleur que les autres.

  9. Anonyme
    Anonyme
    il y a 7 ans
    C'est ce que ca vaut...
    Ce metier a ete rationalisé et informatisé.

    Les notaires exploitent le copier coller et on ne se rendra compte d'une erreur eventuelle qu'en cas de litige, ce qui est assez rare pour qu'on ne le sache jamais.

    On paye pour ce que ca vaut. Et l'intelligence artificiel fera tres bientot un meilleur travaille qu'eux.

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