Sauver Éloïse de la peur de Dieu
Sophie Bérubé
2016-10-15 09:14:00

Moi, j'étais toujours curieuse de l'enfant qui accompagnait les "pèlerins". Je sentais toujours une petite gêne chez eux, un malaise d'enfant qui préférerait être un enfant et jouer, plutôt que d'annoncer la fin de monde aux gens et d'inviter à craindre la colère de Dieu.
Cette semaine, Éloïse Dupuis, 27 ans, est morte après avoir refusé une transfusion sanguine en raison de ses croyances religieuses.
L'état actuel du droit ne nous permet pas de sauver cette jeune mère de la mort ni de l'imbécilité qui a conduit à sa mort. On ne peut tout simplement pas obliger quelqu'un à recevoir des soins si la personne qui les refuse est en mesure de prendre une décision éclairée. Parfois, ça ne fait pas de sens et le mot "éclairé" n'a rien de bien lumineux.
Heureusement, dans les cas d'enfants de moins de 14 ans, si les parents témoins de Jehovah refusent une transfusion, la Cour permet à l'hôpital de prendre la garde temporairement des enfants pour leur administrer les soins nécessaires.
Et aujourd'hui, les hôpitaux ont trouvé des moyens plus subtils, sans avoir recours à la DPJ et aux tribunaux, de convaincre les parents d'accepter des transfusions en leur donnant un avis à l'effet qu'ils vont tout faire pour respecter leur croyance et éviter une transfusion, mais que si l'état de santé de l'enfant l'exige, ils le feront. La plupart des parents acceptent et leur principale préoccupation n'est pas la damnation éternelle de leur enfant mais la confidentialité de leur dossier pour pas que les autres témoins Jehovah s'en mêlent.
La société l'a abandonnée
La situation est malheureusement différente pour les adolescents et les adultes.
En fait, quand une jeune femme comme Éloïse Dupuis, cette semaine victime d'une hémorragie en accouchant, refuse une transfusion sanguine, il est déjà trop tard pour intervenir et la sauver. Il est trop tard pour arrêter le train de la connerie qui file à toute vitesse vers la catastrophe. Les wagons sont trop chargés.
À mon avis, cette jeune femme, nous l'avons déjà abandonnée, il y a longtemps. Le "nous" c'est le Québec, la société et la petite communauté dans laquelle a grandi cette jeune femme.
Nous ne l'avons pas protégée de la secte qui l'empêchait, enfant, de jouer à la récréation avec les autres enfants, de chanter, de fêter l'Halloween ou tout simplement d'être en congé le samedi.
Nous ne l'avons pas protégée lorsque, toute petite, Eloïse s'est mise à craindre Dieu plus que la mort.
Nous avions une responsabilité d'éduquer convenablement cette petite fille, de manière égale aux autres petits Québécois, de tout faire pour développer son sens critique, et surtout, lui donner tous les outils pour fuir la secte et l'idéologie qui l'ont contrôlée au point de lui faire abandonner son nouveau-né.
Il est facile de juger ceux qui ne pensent pas comme nous ; ceux qui suivent une religion quelle qu'elle soit au-delà de la falaise comme des petits moutons inconscients. Mais ayons l'honnêteté d'admettre que s'ils sautent au bout de la falaise, s'ils se tuent au nom de la religion, c'est aussi parce que nous avons échoué à leur transmettre une éducation digne de ce nom.
Ces enfants brainwashés depuis la tendre enfance, par des parents brainwashés eux aussi, aujourd'hui, deviennent de plus en plus dangereux pour eux-mêmes et leurs enfants.
Nous avons abandonné la petite Éloïse bien avant qu'elle ne décide de refuser des soins à Lévis cette semaine.
Combien d'enfants abandonnons-nous chaque jour au Québec ? Combien d'enfants laissons-nous se faire anesthésier le cerveau, cet organe qui pourrait les sauver et leur faire profiter de la vie ? Nous avons une responsabilité collective envers tous les enfants, ne l'oublions pas.
On dit que ça prend un village pour élever un enfant. Qu'est-ce qu'on attend pour se mettre encore plus au boulot ?
Réveillez-vous ! comme disent les témoins de Jehovah.
Sur l'auteure
Sophie Bérubé est avocate, médiatrice familiale, auteur et collaboratrice dans différents médias.
www.sophieberubeavocate.com
Partager cet article:
Anonyme
il y a 9 ansQu'en est-il de ces gens qui se fondent sur des croyances alternatives (ou carrément disprouvées) pour refuser des traitements, par exemple de chimio ou des vaccins? On légifère aussi?
SBS
il y a 9 ansCette jeune femme de 27 ans a choisit de ne pas recevoir le traitement qui l'aurait sauvé- Fin de la discussion.
Il n'y a rien de complexe et il n'y a aucune raison pour que l'état se mêle de sa décision.
On peut trouver sa décision stupide mais à la fin de la journée, c'est sa décision.
Anonyme
il y a 9 ansFumer. Quand est-ce que l'on empêche les gens de le faire?
Boire trop d'alcool: on limite la quantité quotidienne par législation?
Malbouffe?
VItesse: voiture ou motos qui défoncent les limites de vitesse de nos autoroutes sans même passer en 3e vitesse. Alternativement, les versiosn survitaminées de ces voitures pcq 400 chevaux ne suffisent pas
Le saut en parachute
Vaccins: on les impose?
SBS
il y a 9 ansQue voulez-vous au juste?
Un état qui se mêle de la vie des gens et qui impose un certain mode de vie? Et ce mode de vie, qui le déciderait au juste, les instances religieuses, celles politiques ou les scientifiques?
tant qu'à y être, On pourrait habiller tous les garçons en habit et les filles en robe. Il faudrait s'assurer que tout le monde mange la même chose au même moment. On bannit les activités extrêmes, la danse, l'alcool. Les femmes reste au foyer et enfante
Une autre solution est simplement d'éduquer nos enfants, passer du temps avec eux et leur inculquer nos valeurs et surtout leur expliquer les conséquences de leur choix.
La mort de cette jeune femme est d'une tristesse incroyable mais il n'y a eu aucun crime
Anonyme
il y a 9 ansVotre propos est exactement ce que je cherchais à démontrer avec ces exemplesIL y a pleins de comportements qui sont discutables et peuvent mener à des conséquences tragiques. Pourtant on ne s'en mèle pas...
Moi
il y a 9 ansJusqu’où faut-il que l’État se mêle de la vie privée des gens? Jusqu’où doit-on s’attendre à ce que des adultes deviennent responsables de leurs actes et pas l’État? Jusqu’à quel point l’État doit protéger les gens contre eux-mêmes? Faut-il légiférer pour chaque suicide commis par un adulte?
On parle d’une adulte qui choisit de ne pas recourir aux soins gratuits dont elle dispose car la peur de son Dieu est plus forte que son amour pour son enfant. Peu importe ses raisons, c’est son choix. Je suis contente que les enfants soient protégés par la loi actuelle et je souhaiterais que l’on repousse le consentement aux soins à 16 ans, l’âge auquel on peut légalement se passer de tuteur.
Personnellement, je viendrais hanter quiconque se mettra entre moi et ma décision de me laisser mourir advenant le cas, car je suis adulte et c’est mon privilège!
Carole
il y a 8 ansSophie Bérubé avocate et médiatrice familiale est une perle. Ses réflexions sur le sujet sont très pertinentes et profondes. Si le gouvernement se réveillait, elle serait fortement appuyée et les décès de ce genre seraient évités. J'ai un frère TJ depuis plus de 25 ans, il a 3 fils, mariés et pères d'enfants eux-mêmes. Quelle tristesse quand je pense à tous ces petits coeurs qui sont brainswahés par des parents brainwashés... quelle vie de mensonges les attend. Bravo Sophie, je vous lis et vous écoute souvent à Denis Lévesque!
Carole
il y a 8 ansJe répondrais par la bande qu'il faut être lâche pour traiter quelqu'un de lâche et par ailleurs, ne pas écrire son véritable nom : Anonyme
Anonyme
il y a 8 ansNon mais faut être de mauvaise foi et chercher des poux: la famille, comme dans parenté, peut-être? Un oncle, une cousine ...?
Sinon, sur le fond du sujet - soit les enfants endoctrinés par leurs parents sans qu'ils aient leur mot à dire - quelqu'un a envie de se prononcer là-dessus?