Me Raymond Clair pratique chez Clair Nilsson Gagnon Avocats à Drummondville.
Me Raymond Clair pratique chez Clair Nilsson Gagnon Avocats à Drummondville.
Décidément, rien ne va plus. La médiation devant le juge Rolland a échoué, le Barreau et la bâtonnière Lu Chan Khuong préfèrent s’affronter devant le tribunal, des informations confidentielles circulent, et la ministre de la Justice Stéphanie Vallée déclare qu’il n’y aura pas d’enquête à l’égard de cette fuite.

L’affrontement devant le tribunal laissera le vainqueur profondément blessé. Et dans quel état sera le vaincu ? Il me semble que la solution doit maintenant venir des membres qui doivent mettre fin à ce dérapage.

Nous sommes confrontés à un dilemme sérieux : soutenir la bâtonnière ou les administrateurs du Barreau.

Soutenir la bâtonnière : cela implique que nous passons l’éponge sur un geste pour lequel les policiers « auraient » porté plainte, sans que nous connaissions les faits précis, tout en sachant que notre représentante doit être inattaquable lorsqu’elle s’adresse à la magistrature, au public, au gouvernement, bref, cela implique que nous tenons pour acquis qu’elle conserve la crédibilité et la légitimité nécessaires pour jouer son rôle de bâtonnière.

Cela signifie aussi que nous désapprouvons la conduite des administrateurs qui se retrouveront alors en position de faiblesse face à la bâtonnière, et que la gestion des affaires du Barreau sera conflictuelle pendant le règne de la bâtonnière.

Soutenir la décision du Conseil : cela implique que nous passons par-dessus le fait que l’information confidentielle concernant la bâtonnière a été divulguée à l’encontre de règles destinées à protéger une telle information, que nous oublions les résultats de l’élection, que nous escamotons le rôle du syndic, bref, nous acceptons une sanction sans audition.

Dans les deux cas, nous sommes perdants, et chaque solution laisse une zone d’ombre dommageable pour les deux parties.

Que faire ? Retournons en élection, puisque le résultat de l’assemblée générale spéciale convoquée pour le 24 août prochain, quel qu’il soit, ne pourra avoir pour effet d’assainir le climat pour une bonne gouverne des affaires du Barreau.

Que le Barreau et Mme Khuong acceptent de baisser les armes et de se soumettre à la décision des membres par le déclenchement d’une nouvelle élection au Bâtonnat.

Si Mme Khuong se représente, elle aura à affronter avec dignité et transparence les questions qui lui seront posées en regard des faits allégués, puisqu’ils ont maintenant franchi la barrière de la confidentialité. Elle devra décider d’en débattre ou non, et elle devra convaincre les membres que ces derniers avaient raison de lui faire confiance et qu’ils sont encore justifiés de l’élire à ce poste. Si elle est élue, elle aura toute la légitimité de représenter fièrement le Barreau, et malheur à ses interlocuteurs qui voudraient lui rappeler « l’incident ».

Si Mme Khuong ne se représente pas, c’est qu’elle aura sans doute évalué qu’il est préférable d’agir ainsi pour le bien du Barreau, cette décision l’honorant tout autant que celle de se présenter à nouveau.

Si Mme Khuong se représente mais n’est pas réélue, elle aura alors compris que les membres ont trouvé que le risque d’atteinte à la crédibilité du Barreau était trop élevé.

Quant aux membres, si Mme Khuong va en élection, ils auront alors eu à évaluer cette délicate question, à considérer les états de service de Mme Khuong, son programme, à pondérer le tout, à faire de même à l’endroit de son ou ses adversaires, et tous devront vivre avec les résultats qui parleront d’eux-mêmes, les membres ayant clos le débat.

Vite, que les membres décident ! Retournons en élection afin de mettre fin aux dommages déjà trop lourds que la présente situation cause au Barreau et à l’ensemble des membres.

Sur l’auteur
Me Raymond Clair pratique chez Clair Nilsson Gagnon Avocats à Drummondville. Avocat Émérite, reconnu par ses pairs, il a exercé plusieurs fonctions au sein du Barreau. Bâtonnier de la section d’Arthabaska en 1980-1981, il a siégé au Conseil général du Barreau du Québec puis au Comité administratif pour présider par la suite pendant plusieurs années le Comité d’inspection professionnelle.