L’avocate Camille Labchuk, maintenant directrice exécutive de ''Animal Justice''
L’avocate Camille Labchuk, maintenant directrice exécutive de ''Animal Justice''
L’avocate Camille Labchuk est fière du combat qu’elle a mené et qu’elle poursuit au quotidien pour nos amies les bêtes. Elle est maintenant directrice exécutive de Animal Justice, une organisation dévouée à la défense des droits et intérêts des animaux qui a célébré ses dix ans d’existence en juillet dernier.

« On travaille fort pour faire entendre la voix des animaux et faire modifier les lois fédérales pour qu’elles reconnaissent et respectent enfin leurs droits », explique à Droit-Inc Me Labchuk.

Pour cette juriste de 34 ans, les autres branches du droit n’étaient pas une option.

Tout commence à l’âge de 12 ans : l’activiste en devenir regarde un documentaire sur les conditions d’élevage et les méthodes d’abattage des bêtes destinées à la consommation en compagnie de sa mère… Voilà qui est suffisant pour qu’elle renonce à tout jamais à prendre une seule autre bouchée de viande ou de poisson.

En 2007, elle va plus loin encore : la végétarienne devient végétalienne.

« Ça fait longtemps que je voulais passer à cette étape-là, mais j’attendais de connaître des gens qui étaient passés par là et qui pouvaient me guider dans ma transition », explique-t-elle.

Questionnée quant à ce qu’on devrait à tout prix boycotter dans notre alimentation, la végane nous dit sans hésiter : le poulet. « Ils sont 800 000 à être tués chaque année au Québec de manière atroce. Vue leur petite taille, on doit en tuer une quantité énorme pour remplir les tablettes d’épiceries… Ce sont beaucoup d’animaux qui doivent souffrir pour peu de viande… »

Elle nous informe de leur durée de vie approximative de 45 jours avant l’abattoir, soit après que leurs pattes aient flanché sous leur poids qui a été décuplé par des injections stimulant leur croissance...

Plus qu’une carrière : une vocation

Petite, Me Labchuk est élevée dans une campagne du Nouveau-Brunswick. Elle est très proche de la nature, entourée d’animaux. Le sort réservé aux bêtes d’élevage la préoccupe de plus en plus et rapidement, elle comprend qu’elle veut consacrer sa vie à se battre afin que les droits de tous les animaux soient reconnus et respectés.

Jeune adulte, elle choisit d’abord de compléter un baccalauréat en psychologie à l’Université néo-brunswickoise Mount Allison. Dès l’obtention de son diplôme en 2006, elle prend la route en direction d’Ottawa, où elle découvre l’univers politique en travaillant aux côtés d'Elizabeth May, avocate élue cheffe du Parti vert du Canada. Il s’agit d’ailleurs de la première candidate du Parti à être élue à la Chambre des communes.

C’est à force de côtoyer cette grande militante pour l’environnement qu’elle trouve fort inspirante que Me Labchuk en vient à se poser la question qui sera déterminante pour son parcours professionnel: « Pourquoi ne ferais-je pas la même chose, mais pour les animaux? ».

Quand un retour sur les bancs d’école s’impose...

Depuis aussi loin qu’elle s’en souvienne, Me Labchuk ressent un dégoût immense face aux conditions dans lesquelles des centaines de milliers d’animaux sont élevés et abattus, que ce soit pour leur viande, leur fourrure ou leurs défenses.

Les conditions dans lesquelles ceux-ci sont gardés en captivité et exploités pour du simple divertissement dans des zoos, des cirques ou autre lieu d’amusement public la dégoûtent au plus haut point. « C’est une vie vécue dans des conditions exécrables avec aucune loi qui ne les protège, déplore-t-elle. Le gouvernement s’en fout, les animaux sont perçus comme de la monnaie, des unités de production. »

L’avocate précise que 99 % des animaux qui se retrouvent dans notre assiette proviennent de fermes industrielles, alors que l’industrie des fermes familiales est en perdition. Selon son expertise, la seule portion du processus qui est contrôlée est celle des normes de salubrité dans les abattoirs.

« De leur naissance à leur mort, personne ne se soucie de l’espace que les animaux doivent avoir pour bouger, des soins vétérinaires qu’ils doivent recevoir, de la stimulation neurologique nécessaire à leur développement… C’est terrible! »

Très vite, la juriste comprend à quel point Elizabeth May se servait quotidiennement de sa formation en droit dans l’exercice de ses fonctions. C’est ainsi que, résolue à défendre les bêtes, Me Labchuk décide de suivre les traces de sa mentor en allant elle aussi faire des études en droit.

De plus en plus près du but

En 2011, soit un an avant d’avoir complété son deuxième baccalauréat, la future diplômée de l’Université de Toronto se retrouve dans un festival végétarien. Alors qu’elle siège sur un conseil pour la défense des droits des animaux et qu’elle prend part à un débat sur le sujet, elle est approchée par Nicholas dePencier Wright, avocat en droit des affaires et militant politique torontois, également fondateur et président du conseil d’administration de Animal Justice. En un rien de temps, la voilà qui entame son implication bénévole dans l’organisation, incluant cinq ans de travail bénévole.

De 2012 à 2013, soit après avoir complété son baccalauréat, Me Labchuk fait son stage du Barreau chez Silver Associates, un petit cabinet qui exerce en droit criminel. Elle apprécie l’expérience, mais elle sait pertinemment que sa mission se trouve ailleurs.

Le grand saut

L’année suivante, la justicière animalière mise donc le tout pour le tout et quitte le droit criminel.

Question de mettre de quoi à manger sur sa table en attendant que l’association prenne son envol, elle pratique à son compte en droit animalier pendant un an en acceptant de défendre la cause de certains organismes qui lui tiennent à cœur. Entre temps, elle investit tout le temps qu’il lui reste à trouver du financement pour Animal Justice.

« L’organisation ne reçoit aucune subvention gouvernementale », tient-elle à souligner. Le budget provient donc strictement de dons privés et de levées de fonds dont elle a multiplié le nombre au fil des années afin de pouvoir ultimement se consacrer à l’organisation à temps plein et s’octroyer un modeste salaire à compter de 2016.

S’accrocher à une passion

Le mois dernier, Animal Justice a appris qu’un de ses cris du cœur allait enfin être entendu à la Chambre des Communes. En 2016, il avait revendiqué un projet de loi pour que la bestialité soit proscrite, ce à quoi le tribunal avait répondu que les abus sexuels infligés aux animaux n’allaient pas à l’encontre de la Loi canadienne…

« On se réjouit, car les mouvements de sensibilisation qui militent pour les droits des animaux se multiplient depuis les dernières années, dit-elle. On constate que les citoyens sont de plus en plus sensibles à la cause et que le gouvernement n’a pas le choix de commencer à nous écouter ».

Mais le combat ne fait que commencer…