Un hôpital poursuit un cabinet d’avocats!

Radio -Canada
2020-08-04 12:00:00

Le recours en justice a été déposé devant la Cour du Banc de la Reine du Manitoba le 16 juillet et allègue que la firme d'avocats a fait preuve de négligence en ne déposant pas de poursuite contre les compagnies responsables de la construction de l'Institut Asper dans les délais prévus.
L'Hôpital demande une somme non déterminée pour dommages et le remboursement de ses frais de justice.
Problèmes de pénétration d'eau
En 2002, l'Hôpital de Saint-Boniface a embauché PCL Constructors of Canada pour la construction du bâtiment, un contrat de 17 millions de dollars.
La construction du bâtiment, situé sur l'avenue Taché, s'est achevée en 2003. Depuis 2009, il connaît des problèmes de pénétration d'eau, selon des documents de cour.
À l'origine, le bâtiment devait service de centre de recherche, mais il est demeuré « la plupart du temps » vide pendant les années qui ont suivi. En 2006 et en 2008, deux étages ont été transformés en espace à bureaux et, en 2012, ils sont devenus l'unité de soins cardiaques, a appris la Cour.

En 2015, l'Hôpital a embauché un expert indépendant pour faire une enquête sur la source des problèmes d'infiltration d'eau qui touchaient des fenêtres, des plafonds, et des murs. Celui-ci a remis un rapport intermédiaire en juin 2015. Il y note, entre autres, que l'enveloppe du bâtiment permet une importante pénétration d'air froid de l'extérieur.
Délai de prescription raté
Au Manitoba, les propriétaires d'un bâtiment ont un an après la réception d'un rapport définissant des vices de construction pour déposer une plainte.
L'énoncé de la plainte contre les avocats explique que, en 2016, l'Hôpital a retenu les services de la firme MLT Aikins, afin qu'elle lui fournisse des conseils juridiques quant à un éventuel recours en justice contre PCL Constructors of Canada et son sous-traitant Ferguson Corporation pour conception défectueuse ou vice de construction.
Selon l'énoncé de la plainte, les avocats embauchés par l'Hôpital auraient dû déposer une demande en vertu de la Loi sur la prescription du Manitoba demandant le report de l'échéance pour déposer un recours en justice contre les entreprises responsables de la construction de l'édifice.
Aucune de ces allégations n'a encore été prouvée en cour.
Une demande déposée, mais rejetée
Les avocats de MLT Aikins ont déposé une demande en novembre 2016, mais le juge chargé du dossier a déclaré que celle-ci n'avait pas été déposée dans les délais prévus.
La cause a été entendue par la Cour d'appel qui, dans sa décision rendue en 2019, a confirmé celle de la cour de première instance. Pendant l'audience, les avocats de l'Hôpital ont soutenu que le rapport intermédiaire ne donnait pas la cause exacte des problèmes de pénétration d'eau.
La Cour d'appel a déclaré que le rapport intermédiaire de l'expert donnait toute l'information voulue pour déposer les documents nécessaires pour entamer une poursuite en justice contre les responsables de la construction et qu'il n'était pas nécessaire d'attendre le rapport final.
Dans la décision de la Cour d'appel, la juge Jennifer Pfuetzner a toutefois noté que la loi manitobaine qui prescrit une limite de 12 mois pour entamer une poursuite en justice aurait besoin d'être revue. « Les lois sur les délais de prescriptions adoptées par d'autres provinces sont beaucoup plus simples », a-t-elle noté dans la décision.
« En général, elles (les autres provinces) prévoient que le délai de prescription ne s’enclenche pas tant que le demandeur n’a pas eu une connaissance, réelle ou par interprétation, du fait qu’il a une réclamation », a-t-elle ajouté.
Les parties avares de commentaires
L’Hôpital de Saint-Boniface a refusé la demande d’entrevue de CBC/Radio-Canada et a refusé de dire si les fuites ont, depuis, été réparées ou non.
Un porte-parole de MLT Aikins a affirmé que le cabinet ne commentera pas une cause qui est toujours devant la justice.
Les entreprises PCL et Ferguson ont également refusé de réagir. Un résumé de la cour en rapport à la demande de 2016 affirme que les deux entreprises déclinent toute responsabilité pour les fuites d’air ou les infiltrations d’eau.