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Une loi vieille de 5 ans jugée inconstitutionnelle

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Stéphane Tremblay

2023-01-30 12:00:00

Une loi adoptée par le gouvernement du Québec, en 2017, dans l’industrie de la construction est jugée inconstitutionnelle et invalide…

Me Claude Tardif. Source: Rivest Schmidt
Me Claude Tardif. Source: Rivest Schmidt
C’est la Cour supérieure qui s’est penchée récemment sur la loi spéciale adoptée par le gouvernement du Québec, le 30 mai 2017, afin que les travailleurs de la construction retournent au travail.

Le juge Frédéric Pérodeau conclut que la « Loi 2017 » était « inconstitutionnelle et invalide parce qu’elle porte atteinte aux libertés d’association et d’expression garanties par la Charte canadienne et par la Charte québécoise ».

On se souviendra qu’il s’agit de la loi spéciale qui avait été adoptée pour assurer la reprise des travaux alors que les quelque 170 000 membres de l’industrie étaient en grève, perturbant de nombreux chantiers de construction au Québec, en 2017.

Les procureurs des demandeurs, Me Claude Tardif et Me Catherine Massé-Lacoste de Rivest Schmidt, et Me Pascale Racicot de Poudrier Bradet, Avocats, pour la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) ont également soulevé la problématique du règlement des différends pour le renouvellement des conventions collectives.

De nombreux groupes sont parmi les demandeurs : La Fédération des travailleurs du Québec (FTQ-Construction), le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International), le Syndicat québécois de la construction (S.Q.C), la Fédération de la CSN-Construction, de même que les individus Emmanuel Lacoste, Martin Bélanger, Matthew Fortin, Michel Joseph, Pascal Corriveau et David Lessard.

Les avocats pour la mise en cause sont aussi nombreux : Me Marc Bergeron, service juridique de l’APCHQ, (Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec), Me Guy Tremblay et Me Marc-André Groulx, BCF, (Association de la construction du Québec), Me Jean-François Bélisle, Bourque, Tétreault, Bélisle et ass., pour l’ACRGTQ, (Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec).

Me Guy Tremblay. Source: BCF
Me Guy Tremblay. Source: BCF
Une atteinte aux libertés fondamentales

Le jugement stipule que la Loi de 2017, qui interdit aux travailleurs de l’industrie de la construction d’exercer leur droit de grève légal, constitue sans aucun doute une entrave substantielle à la négociation collective qui porte atteinte aux libertés fondamentales garanties par l’al. 2 d) de la Charte canadienne et par l’article 3 de la Charte québécoise.

L’exercice de la grève est désormais considéré comme un élément essentiel d’un processus véritable de négociation collective. « Il ne fait aucun doute non plus que cette interdiction perturbe l’équilibre des rapports de force entre les travailleurs et les employeurs et qu’elle interfère de façon substantielle avec un processus véritable de négociation collective ».

Contrairement à ce que plaident les avocats du procureur général du Québec, Me Bruno Lepage, Me Mathilde Bhérer et Me Anne-Sophie Ouellet de Beauvais, Truchon, il ne s’agit pas ici que de « suspendre temporairement l’exercice du droit de grève » après quelques jours de grève. Il est plus juste d’affirmer qu’on coupe rapidement court à l’exercice légal par les travailleurs de la « composante indispensable » de leur droit à la négociation collective et qu’on néantise du même coup un outil puissant et essentiel à l’exercice du rapport de force que les syndicats préparaient alors méticuleusement depuis des mois.

Les avocats du PGQ soulignent que cette atteinte se justifie dans une société libre et démocratique. Rappelons que la reprise des travaux avait comme but d’éviter les conséquences économiques, humaines et sociales causées par une grève générale illimitée.

La décision mentionne que le PGQ n’a pas établi que la mesure attentatoire ne porte pas atteinte de façon disproportionnée au droit à la liberté d’association.

Les effets préjudiciables de la mesure attentatoire outrepassent ses effets bénéfiques en ce que la mesure retire aux 170 000 travailleurs de la construction la composante indispensable du droit à la négociation collective protégé par la liberté d’association, et ce, après quelques jours de grève seulement.

Me Mathilde Bhérer. Source: Beauvais, Truchon
Me Mathilde Bhérer. Source: Beauvais, Truchon
Donc, la totalité de la Loi de 2017 est donc déclarée inconstitutionnelle et invalide, sans effet pour l’avenir. Une loi composée de sections difficilement dissociables et dont il est impossible de préserver l’application de certains de ses aspects qui seraient constitutionnels, le cas échéant.

Les demandeurs ont également demandé des dommages-intérêts compensatoires et punitifs. Une demande rejetée.

Même refus pour invalider l’article 48 de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’oeuvre dans l’industrie de la construction (la Loi R-20), qui prévoit l’absence de rétroactivité des conventions collectives, et de déclarer que l’absence de dispositions qui interdisent le recours à des briseurs de grève dans cette même loi entrave leur droit d’association et de négociation ainsi que celui des travailleurs.

En raison du sort mitigé de l’affaire, le tribunal a décidé que chaque partie supportera ses frais de justice, incluant les frais d’expertise.
5000

1 commentaire

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Un jugement inutile
    Quand ce genre de résultat survient 5 ans plus tard, ceux qui ont obtenus le retour au travail immédiat des travailleurs rigolent discrètement, et se promettent de recommencer si nécessaire.

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