Carrière et Formation

L’humilité du plaideur…la sagesse du mentor

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À 75 ans, un avocat d’exception rejoint une nouvelle équipe et livre une réflexion profonde sur la pratique du droit.…



Sylvain Deslauriers - source : Renno Vathilakis


Après près de 50 ans de carrière, Me Sylvain Deslauriers entame un nouveau chapitre. À l’occasion de son 75e anniversaire, il rejoint, aux côtés de Me Frédéric Boulanger, le cabinet Renno Vathilakis.

Pour Me Karim Renno, cette intégration s’est imposée comme une évidence. « Je connais Sylvain Deslauriers depuis plus de 20 ans et j’ai toujours su que c’était un avocat exceptionnel. J’ai également eu l’occasion de collaborer avec Me Frédéric Boulanger sur plusieurs dossiers », nous confie-t-il.

Me Deslauriers rejoint le cabinet à titre d’avocat-conseil. Sa carrière, riche et variée, lui a permis d’acquérir une expertise reconnue dans de nombreux domaines du droit, notamment le droit commercial, civil, réglementaire, disciplinaire et successoral.

Plaideur respecté, il a défendu les droits de sa clientèle devant toutes les instances judiciaires, y compris la Cour d’appel du Québec, la Cour d’appel fédérale et la Cour suprême du Canada, ainsi que devant divers organismes publics. Il a également exercé les fonctions de substitut du Procureur général du Québec.


Frédéric Boulanger - source : Renno Vathilakis

Quel regard Me Sylvain Deslauriers porte-t-il sur l’évolution du litige au fil de sa carrière? Comment perçoit-il l’évolution des relations entre les avocats et leurs clients? Rencontre.

Après près de 50 ans de carrière, comment décririez-vous l’évolution de la pratique du litige?

En réalité, ça n’a pas tellement changé sur certains aspects. Une cause prenait environ quatre ans pour arriver à procès au début des années 80, et c’est encore souvent le cas aujourd’hui. Malgré toutes les tentatives de simplification et les réformes des procédures, le temps nécessaire dépend finalement surtout des avocats, pas du Code de procédure civile ni des juges.

Mais pour citer un changement plus concret, je parlerais de la diversité. À mon arrivée dans la profession, les praticiens étaient assez uniformes. Aujourd’hui, la diversité est beaucoup plus grande, ce qui apporte de nouvelles habitudes et façons de travailler, car tout le monde ne pense et n’agit pas de la même manière.

Et comment voyez-vous l’évolution des relations entre les avocats et leurs clients au fil des années?

Nous sommes avant tout une entreprise de service : le client doit sentir que l’avocat comprend son affaire et qu’il est là pour l’aider. Dire à un client « je n’ai pas le temps, j’ai un dossier plus urgent » serait inacceptable.

Chaque dossier doit être traité comme prioritaire, car pour le client, c’est son affaire. Il paie pour un service, non pour l’égo de l’avocat. L’orgueil et la vanité sont les vrais ennemis de notre métier.

Quels conseils donneriez-vous à la jeune génération pour progresser?

Karim Renno - source : Renno Vathilakis


On ne donne pas vraiment de conseils, on travaille ensemble. C’est un échange : le jeune apprend de ce que je fais, et moi j’apprends de ce qu’il fait. C’est ainsi qu’on s’améliore mutuellement.

Le mentorat n’est pas unilatéral : ce n’est pas un oiseau qui nourrit son oisillon dans le nid. C’est un travail à deux, parfois à trois ou plus... Il faut que ce soit interactif.

Ensuite, il ne faut pas avoir peur de travailler. J’ai souvent dit dans des écoles que pour réussir, il n’y a pas de secret : il faut travailler. Pas simplement pour avoir beaucoup de clients, mais pour apprendre, accumuler des connaissances et les utiliser plus tard.

Pour en revenir à votre riche carrière, y a-t-il un dossier qui vous a particulièrement marqué, que ce soit par son enjeu ou par l’expérience qu’il vous a apportée?

Il y a évidemment des dossiers que j’ai perdus, et je n’aime pas perdre… Mais il y a aussi des dossiers marquants, comme un dossier confidentiel où nous avons organisé une médiation à l’étranger pendant une semaine.

Les médiateurs venaient d’un autre pays et les avocats de l’autre côté étaient très compétents. C’était une expérience très intense qui m’a vraiment marqué.

Vous parliez de défaite… Lorsqu’un dossier est perdu, comment faites-vous pour rebondir et en tirer des enseignements?

D’abord, il faut faire un examen de conscience pour comprendre pourquoi on a perdu. C’est rarement la faute du juge. Il faut se rappeler que le litige consiste à gérer l’incertain. Aucun dossier n’est garanti à 100 % de succès, sinon, les clients n’auraient pas besoin d’avocats.

On se demande toujours : avons-nous fait tout ce que nous pouvions faire? Si certaines choses n’ont pas été faites, pourquoi? Peut-être qu’une question n’aurait pas dû être posée?

Chaque nouveau dossier est unique, et il faut en tirer les leçons de l’expérience précédente.


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Le litige a-t-il toujours été votre vocation?

Le droit a deux composantes : la science juridique et l’art. La science juridique, c’est la réflexion, la logique, la façon de raisonner un problème. L’art, c’est la communication, la persuasion, la rhétorique. Cela ne s’enseigne pas vraiment, c’est en partie inné et en partie acquis par l’expérience.

Si vous me demandez si j’aime le litige, je dirais : non, j’aime le droit, j’aime la pratique du droit, qui comprend ces deux éléments et plus encore. Si je devais ne garder qu’un aspect, je garderais la science juridique. La communication et la persuasion sont essentielles, mais pour moi, le plaisir vient de la maîtrise intellectuelle du droit.

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