Carrière et Formation

Que se passe-t-il au Protecteur national de l’élève?

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Un avocat a donné un nouveau cap à sa carrière en rejoignant le Protecteur national de l’élève… Mais que fait-il concrètement au quotidien?

Après plusieurs années au sein du cabinet montréalais Paquet Tellier, Me Simon Dupuis a donné un tournant majeur à sa carrière en rejoignant, à titre de conseiller juridique, un organisme tout juste créé : le Protecteur national de l’élève (PNE).

Simon Dupuis - source : Me Simon Dupuis

Depuis 2022, le PNE a pour mission de veiller au respect des droits des élèves fréquentant les établissements d’enseignement préscolaires, primaires et secondaires, tant dans les réseaux publics que privés.

L’équipe des affaires juridiques est composée de seulement deux conseillers, dont Me Dupuis, qui relèvent directement de Me Jean-François Bernier, le Protecteur national de l’élève.

Mais comment fonctionne concrètement ce jeune organisme? Quels sont les enjeux juridiques auxquels il doit faire face? Et quelle est la valeur ajoutée réelle du PNE pour les élèves et le système scolaire? On a discuté avec Me Dupuis.

Pouvez-vous nous expliquer concrètement en quoi consiste votre travail de conseiller juridique au sein du PNE?

D’abord, nous offrons des conseils juridiques internes, notamment en appui aux protecteurs régionaux de l’élève dans le traitement des plaintes. Nous les accompagnons pour nous assurer que les interventions et les décisions respectent le cadre légal applicable. Ensuite, comme le Protecteur national de l’élève est un organisme encore jeune, nous contribuons activement à la mise en place de ses outils, politiques et procédures internes.

Nous faisons également de la représentation devant les tribunaux, lorsque le Protecteur national de l’élève est mis en cause ou poursuivi, que ce soit devant les tribunaux administratifs ou de droit commun. Ce genre de dossier reste rare, heureusement, mais il mobilise beaucoup d’énergie lorsqu’il survient.

Une autre facette importante de notre travail consiste à offrir de la formation au personnel : autant pour les nouveaux employés que pour la formation continue. Nous intervenons, par exemple, sur des thèmes comme l’éthique et l’intégrité, l’utilisation de la langue française, ou encore l’exercice des pouvoirs d’enquête.

Nous participons aussi au processus législatif et réglementaire. Depuis la création de l’organisme, nous avons été invités à présenter des mémoires devant l’Assemblée nationale dans le cadre de commissions parlementaires. Enfin, nous assurons une veille juridique continue et participons à des rencontres de concertation avec d’autres organismes et acteurs du réseau, comme le ministère de l’Éducation, le Protecteur du citoyen, ou encore le Protecteur de l’intégrité en loisirs et en sport, un ombudsman encore plus récent que nous.

Qu’est-ce qui occupe la majeure partie de votre temps dans vos journées de travail?

Notre priorité, c’est toujours la mission principale du Protecteur national de l’élève : le traitement des plaintes. Dès qu’une demande de conseil juridique est liée à une plainte, c’est ce dossier qui devient prioritaire. On met de côté le reste pour se concentrer sur cette analyse, parce que c’est au cœur de notre mandat.

Concrètement, cela signifie qu’on est souvent appelés à interpréter des articles de loi liés à la plainte, à donner un avis juridique sur la recevabilité d’une plainte, ou encore à réviser les rapports de conclusion produits à la fin du processus.

Pour mieux comprendre votre travail, pouvez-vous nous donner une idée du type de plaintes auxquelles vous faites face?

Cela peut aller de questions liées au transport scolaire, à l’inscription, au choix d’école… Par exemple, dans le contexte actuel où plusieurs écoles fonctionnent déjà à pleine capacité, il arrive que certains élèves ne puissent pas fréquenter l’école de leur choix et soient dirigés vers un autre établissement, ce qui peut créer de l’insatisfaction et mener à une plainte.

Nous recevons aussi de nombreux dossiers liés à la violence et à l’intimidation. Dans ces cas-là, la Loi sur l’instruction publique impose des obligations précises aux écoles et aux directions d’établissement. Notre rôle consiste souvent à interpréter ces obligations, à déterminer jusqu’où elles s’étendent, et à examiner comment les tribunaux les ont déjà appliquées ou interprétées.

Selon vous, quelle est la valeur ajoutée du Protecteur national de l’élève?

Avant la création de notre organisme, des systèmes de traitement de plaintes existaient déjà, mais ils étaient propres à chaque établissement ou centre de services scolaires. Les protecteurs de l’élève étaient alors nommés en interne, ce qui pouvait limiter leur indépendance et impartialité.

Notre principale valeur ajoutée, c’est que nous sommes complètement indépendants des organismes scolaires. Le Protecteur national de l’élève est nommé par le ministre de l’Éducation, et non par un conseil d’administration ou un directeur général. Cela nous permet de traiter les plaintes avec objectivité et impartialité, sans parti pris.

Il est important de noter que nous ne sommes ni l’avocat du parent, ni l’avocat de l’élève. Nous agissons comme un tiers impartial, capable de reconnaître non seulement les problèmes, mais aussi lorsque l’école a bien agi. Cela permet parfois aux enseignants ou aux directeurs d’école de recevoir un retour positif sur leur travail, ce qui fait partie de notre rôle.

Pour terminer, d’un point de vue plus personnel, qu’est-ce qui vous a conduit à rejoindre le Protecteur national de l’élève?

Je connaissais le milieu scolaire surtout à travers mon implication dans la scolarité de mes filles, qui fréquentaient une école publique alternative. C’est en m’impliquant là-bas que j’ai développé un intérêt pour les enjeux éducatifs.

Pour moi, c’est, avant tout, une opportunité rare de contribuer à la création d’un nouvel organisme. Il n’est pas courant qu’un gouvernement mette sur pied un nouvel organisme administratif. Pouvoir participer directement à sa construction, à l’élaboration des directives, à l’interprétation de la loi constitutive, et à la mise en place des pratiques internes, est une expérience unique.

Chaque dossier est souvent une première, que ce soit pour rectifier un rapport, appliquer une disposition pour la première fois, ou traiter une plainte inédite, comme celles relatives aux représailles. Chaque situation implique de défricher le terrain, d’établir des processus, et de s’assurer que tout est fait correctement et conformément à notre loi. C’est un travail exigeant, mais très stimulant, parce que les décisions que nous prenons et les pratiques que nous mettons en place façonnent l’avenir de l’institution.

Il est possible de faire une plainte ou un signalement au Protecteur national de l’élève par une des voies d’accès suivantes :

Quebec.ca/droits-eleve (formulaire Porter plainte)

Appels et messages textes, sans frais : 1-833-420-5233 (assistance téléphonique disponible 24/7 pour les personnes victimes d’acte de violence à caractère sexuel) plaintes-pne@pne.gouv.qc.ca

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