Budget 2022: l’aide juridique, grande absente
Jean-francois Parent
2022-03-23 10:15:00
Les mesures annoncées hier par Québec pour injecter de l’argent frais dans le système restent modestes dans le contexte des besoins criants du système de justice.
Soutien au DPCP
Ainsi, les plus importantes augmentations se trouvent dans l'octroi de 81 millions de dollars supplémentaires pour financer la « Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer les violences sexuelles, la violence conjugale et Rebâtir la confiance ».
Ainsi, au cours des 5 prochaines années, on prévoit consacrer 36,5 millions de dollars au ministère de la Justice pour que le Directeur des poursuites criminelles et pénales puisse consacrer des effectifs–et des procureurs–aux dossiers en matière de violence sexuelle.
On prévoit également ajouter 15,2 millions de dollars pour déployer un meilleur accompagnement dans le système judiciaire aux victimes.
Enfin, 29,4 millions de dollars iront au ministère de la Sécurité publique pour soutenir l’ajout d’effectifs policiers en matière de violences sexuelle et conjugale.
Plus de ressources pour les tribunaux
À ces sommes s’ajouteront un train de mesures visant une meilleure accessibilité au système de justice. Québec entend ainsi injecter 41,8 millions de dollars sur 5 ans pour appuyer ces efforts.
Pour les trois chambres de la Cour du Québec, soit la Chambre de la jeunesse, la Chambre criminelle et pénale, qui inclut la Division spécialisée en matière de violence sexuelle et de violence conjugale, ainsi que la Chambre civile, Québec prévoit injecter 25,6 millions de dollars sur 5 ans.
Ces sommes se déclinent ainsi: 10,8 millions de dollars serviront à l’ajout de de nouveaux juges à la Chambre de la jeunesse de la Cour du Québec, et 14,8 millions de dollars seront consacrés à l’ajout de ressources afférentes aux nouveaux juges à la Cour du Québec.
Enfin, notons que le budget du ministère de la Justice augmente de 69 millions de dollars pour la prochaine année financière. Il était de 1,43 milliard de dollars, il passe à 1,5 milliard, soit une augmentation de 4,8% pendant l’année financière 2022-2023.
Le Barreau du Québec accueille favorablement les annonces faites hier, mais s’attend à mieux.
La porte-parole du Barreau Martine Meilleur explique ainsi à Droit-Inc que « le Barreau du Québec salue la légère augmentation au budget de la justice, même si les besoins sont encore plus importants ». On note « favorablement » les augmentations prévues pour la Cour du Québec.
Quant à l’injection de 424 millions de dollars supplémentaires pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, la Commission Laurent, le Barreau s’en réjouit également.
« Aussi, le Barreau prend acte de la volonté du gouvernement d’investir dans la transformation technologique de l’administration publique et souhaite que le plan de modernisation qui sera annoncé ultérieurement réponde à ses nombreuses demandes visant notamment l’administration de la justice au Nunavik », poursuit Martine Meilleur.
Rien pour l’aide juridique
Dans son mémoire déposé lors des consultations pré-budgétaires, l’automne dernier, le Jeune Barreau de Montréal s’attaquait à la problématique de l’accès à la Justice sous l’angle de la fiscalité. Notamment, on proposait à Québec d’évaluer un train de mesures, que ce soit par l'entremise de déductions fiscales ou de crédit d’impôt, pour couvrir les frais juridiques des justiciables.
Le JBM observait ainsi qu’au Québec, comparativement aux entreprises, « les personnes physiques ne bénéficient pas de beaucoup de déductions fiscales liées à leurs frais juridiques et encore moins de crédits d’impôt en ce sens. (...) Il est donc possible de supposer que la création d’un plus grand nombre de déductions fiscales ou de crédits d’impôt améliorerait l’accessibilité la justice des personnes physiques provenant de tous les paliers d’imposition ».
Dans le Budget 2022, on trouve une certaine forme de bonification dans les divers programmes d’exemptions de pensions alimentaires pour enfants, mais de l’aveu même de Québec, dans une note de bas de page, « l’impact financier pour le programme d’aide juridique est faible ».
Un constat que le Barreau ne manque d’ailleurs pas de souligner. « Le Barreau s’interroge sur l’absence d’un poste budgétaire nécessaire à la mise en œuvre des recommandations du Groupe de travail indépendant sur la réforme de la structure tarifaire de l’aide juridique dont le rapport est attendu pour le mois d’avril prochain », conclut Martine Meilleur.