En couple avec une de ses anciennes élèves, il est poursuivi par la mère!

Radio Canada
2025-09-04 12:00:47

La mère d'une finissante de 2024 à l'école Jacques-Rousseau de Longueuil poursuit un ancien enseignant de l'établissement scolaire, Pierre Magloire, qui est en couple avec sa fille. L'homme de 61 ans a enseigné à l'époque le cours d'éthique et de religion à l'élève de 17 ans, qui est devenue ouvertement son amoureuse l'été suivant sa remise de diplôme.
Dans une poursuite déposée à la Cour des petites créances, le 23 juillet dernier, Anne Camiré prétend que Pierre Magloire lui a causé un important préjudice moral depuis qu’elle a appris que le défendeur entretenait une relation amoureuse, ou du moins une relation impliquant des rapports intimes, avec sa fille. On ne se parle plus (elle et sa fille) depuis le mois de mars, indique, les larmes aux yeux, Anne Camiré, qui dit n’avoir presque plus de contacts avec sa fille en raison de son opposition à la relation amoureuse qui dure encore à ce jour.
En entrevue, Mme Camiré se décrit comme une mère protectrice et impuissante face à une situation où elle considère que le sexagénaire, qui a 43 ans de plus que sa fille, a abusé de sa position d’autorité en tant qu'enseignant. Selon le point de vue de la mère de famille, il n'y avait pas de consentement possible entre une élève de 17 ans et son ancien professeur.
Elle dit toujours subir un préjudice moral qu'elle décrit comme du stress, de l’anxiété, une perturbation du sommeil, ainsi qu'une perte de jouissance et une altération de la qualité de vie. Dans une mise en demeure produite en mai au soutien de sa poursuite, Mme Camiré exprime l’absence de notion de consentement, par l’entremise de ses avocats.
Elle lui réclame 15 000 $ pour les dommages moraux qu’elle dit avoir subis et le remboursement de ses frais de consultations professionnelles.
Pierre Magloire rejette fermement les allégations
Dans une contestation de la poursuite intentée contre lui, déposée le 19 août dernier à la Chambre civile des petites créances, Pierre Magloire nie formellement avoir causé quelque dommage que ce soit à la demanderesse, Anne Camiré. Il affirme que les faits allégués sont inexacts et juridiquement infondés.
Il admet entretenir une relation amoureuse avec la fille de la demanderesse depuis le 5 août 2024, soit après la remise de diplôme de la fille d’Anne Camiré à l’école secondaire Jacques-Rousseau, et ajoute que cette relation est libre de consentement entre deux adultes et ne constitue en rien une faute civile. Pierre Magloire indique aussi que les préjudices d’Anne Camiré sont les fruits de ses propres décisions, notamment l’éviction de sa fille du domicile familial. Il affirme donc que le départ de la fille de Mme Camiré ne résulte en aucun cas d’influence, d’un stratagème ou d’une pression exercée de sa part.
Enfin, l’ancien enseignant affirme que le litige repose sur une mésentente familiale entre la demanderesse et sa fille, dans laquelle le défendeur (Pierre Magloire) n’est qu'un tiers impliqué. Dans un courriel envoyé à Radio-Canada, Pierre Magloire a refusé toute demande d’entrevue sur la situation. Il affirme que les démarches répétées de la mère de sa conjointe traduisent davantage une volonté d’alimenter le conflit que de rechercher une quelconque vérité.
Un cas complexe, dit un criminaliste
L’avocat-criminaliste Walid Hijazi estime que cette histoire se trouve dans deux univers juridiques différents : civil et aussi criminel, car la police de Longueuil a mené une enquête sur les faits allégués. En cour civile, le fardeau de la preuve repose sur Mme Camiré. Ça pourrait être difficile parce que, règle générale, un parent mécontent de la nature de la relation (amoureuse) d’un de ses enfants… on ne va pas devant un juge pour ça. Sinon, on n’en finirait plus. Pour démontrer un préjudice, il faut une faute, un dommage et démontrer un lien de causalité entre les deux, ce qui n’est pas si simple à faire, explique Me Hijazi.
En octobre 2024, le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL) avait confirmé avoir ouvert une enquête pour des allégations d’agression sexuelle en milieu scolaire. Depuis mai dernier, le dossier a été remis à la Direction des poursuites criminelles et pénales pour analyser la preuve et déterminer si des chefs d’accusation seront autorisés ou non.
Monsieur (Pierre Magloire) est présumé innocent ici. On peut penser ce qu’on veut (de cette situation), mais il n’a été trouvé coupable de rien, d’aucune agression sexuelle en cour. (...) Or, d’un point de vue strict du Code criminel, l’âge de consentement est de 16 ans. Sauf si on est en situation d’autorité ou de confiance (l’âge est de 18 ans), explique Me Hijazi. Comme un ou une élève peut être vulnérable, l’article 153 du Code criminel interdit le consentement en matière sexuelle lorsqu’il y a une situation d’autorité et de confiance, ajoute l’avocat-criminaliste. En matière d’agression sexuelle, il n’est pas toujours nécessaire d’avoir le témoignage d’une présumée victime.
Une notoriété publique
Pierre Magloire s'est fait connaître publiquement après avoir dénoncé la mort tragique de son frère Alain, un itinérant abattu par balles en 2014 lors d'une intervention du Service de police de la Ville de Montréal. Outre plusieurs entrevues accordées aux médias, son passage à l'émission Tout le monde en parle lui avait valu une certaine notoriété.
Quelques années plus tard, en marge de la pandémie de COVID-19, il a accordé des entrevues sur les enjeux de santé mentale à l'adolescence, en lien avec les mesures de confinement. Pierre Magloire a remis sa démission en octobre 2024 et a pris sa retraite d'enseignant, après avoir été avisé par la direction de l'école Jacques-Rousseau qu'elle avait été informée d'allégations le concernant en lien avec une ancienne élève.
La direction générale du Centre de services scolaire (CSS) Marie-Victorin avait indiqué à Radio-Canada avoir contacté la Direction de la protection de la jeunesse et le Service de police de l’agglomération de Longueuil, comme le prévoyait son protocole de protection de l’élève. Questionnée à nouveau, la direction du CSS Marie-Victorin n’a pas voulu commenter le dénouement de l'enquête administrative qui avait suivi, compte tenu du caractère confidentiel du dossier d’employé de Pierre Magloire.