L’injonction Mareva pour les pros

Natacha Mignon
2009-10-13 11:15:00
Emmanuelle Saucier : C’est un moyen de lutte contre la fraude, qui permet de geler les actifs d’une personne. À cette injonction, peuvent être jointes des ordonnances accessoires, particulièrement intéressantes. Par exemple, il peut être fait injonction à une personne de déclarer l’ensemble des biens qu’elle détient à travers le monde. Dans un contexte de fraude, cela permet de savoir immédiatement sur quels actifs agir.
En quoi cette injonction est-elle plus efficace que d’autres ?
Déjà, elle est toujours doublée d’une sanction qui est l’outrage au Tribunal. Ensuite, l’injonction Mareva ne se limite pas à la personne des fraudeurs, mais peut être étendue aux tiers, par exemple à des banques ayant reçu des fonds. Il peut leur être fait injonction de donner accès à leurs registres pour vérifier des états de compte. Une Mareva donne aussi le droit d’interroger ces tiers. On peut donc mieux suivre l’argent. La Mareva devient un complément efficace à une enquête juri-comptable. On raccourcit également nettement le processus judiciaire. Un autre avantage à la connaître et à l’utiliser est qu’elle est moins chère et moins exigeante dans ses critères que l’Anton Piller.
Justement dans votre pratique, l’avez-vous fréquemment utilisée ?
Oui. Dans un dossier où j’intervenais pour le groupe Olco Pétroleum, dans un contexte de fraude commise par une salariée, j’ai été amenée à mettre en pratique l’injonction Mareva, au point de la raffiner et de l’étendre dans toutes ses limites. J’ai constaté son efficacité et je me suis aperçue que les juges étaient ouverts à l’utiliser. J’ai ensuite voulu partager ces techniques avec l’ensemble de la communauté juridique, dans un ouvrage de référence.
Y avait-il déjà des ouvrages qui traitaient du sujet ?
L’ordonnance de gel des actifs, ainsi qu’elle était appelée auparavant, existe depuis les années 1980 au Québec. Elle s’est vraiment développée depuis une dizaine d’années, avec l’affaire Cinar notamment. Alors, certains ouvrages de procédure l’abordaient, mais surtout pour rappeler qu’elle venait de la common law. Moi, j’ai voulu écrire un ouvrage pratique, basé sur mon expérience. J’ai d’ailleurs inclus dans mon livre des modèles et des jugements de référence en la matière non publiés.
A qui s’adresse votre livre ?
Aux praticiens du droit en cabinet, mais aussi aux avocats en entreprises et aux juristes, ainsi que plus généralement aux victimes de fraude.
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L’injonction Mareva] : une arme essentielle dans un contexte de fraude de l’entreprise
Par Emmanuelle Saucier