Quelle vie après Blakes?

Élisabeth Fleury
2025-09-05 15:00:02
Il y a une vie après Blakes… et elle est florissante, si l’on en croit le fondateur de ce cabinet boutique…
Après 15 ans chez Blakes, Me Livius Kaufman a ouvert son propre cabinet boutique spécialisé en droit des marchés publics et en litige commercial. C’était en 2020, en pleine pandémie de COVID-19.

Cinq ans plus tard, Julius Légal s’est imposé comme une référence en droit des marchés publics. Me Kaufman a fondé le cabinet afin de rendre ses services accessibles à une plus grande variété d’entreprises, explique l’avocat sur son site internet.
Son expertise couvre tous les aspects légaux entourant les marchés publics au Québec, particulièrement dans le secteur de la santé. Il est régulièrement appelé à conseiller des fabricants et des fournisseurs de produits médicaux et pharmaceutiques dans leurs relations avec les services d’approvisionnement du réseau de la santé.
Auteur prolifique, ses publications sont souvent citées par les tribunaux. Parfaitement trilingue, Me Kaufman prononce également des conférences pour le Barreau du Québec et l’Autorité des marchés publics.
Droit-inc s’est entretenu avec lui pour dresser le bilan de ces cinq premières années et discuter de son offre de services unique.
Qu’est-ce qui différencie Julius Légal d’autres cabinets?
Plusieurs avocats travaillent en droit des marchés publics, mais souvent du côté des ministères, organismes publics ou municipalités qui attribuent des contrats. Mon approche est différente : je représente exclusivement les fournisseurs des différents paliers de gouvernement, avec une spécialisation marquée dans le secteur de la santé.
Chez Blakes, j’étais plaideur en litige commercial. Là où plusieurs juristes de marchés publics se limitent à la rédaction contractuelle et aux négociations, activités très importantes en elles-mêmes, je peux plaider devant les tribunaux, déposer des injonctions, introduire des recours en dommages pour des soumissionnaires qui estiment avoir été écartés à tort, ou encore intenter un recours en révision judiciaire, par exemple lorsqu’une décision de l’Autorité des marchés publics est problématique pour un de mes clients.
Vous êtes seul chez Julius Légal. Comment y arrivez-vous?
Les outils numériques et l’intelligence artificielle offrent aujourd’hui des possibilités immenses pour un avocat qui choisit d’exercer seul. Je fais mes recherches et gère mes dossiers moi-même, et cette efficacité bénéficie directement à mes clients. Moins de temps requis pour une tâche signifie des honoraires plus accessibles pour mes clients.
Quitter un grand cabinet m’a également permis d’offrir des taux compétitifs, malgré mes 20 ans de pratique. J’accompagne ainsi des multinationales de premier plan, mais aussi des PME qui cherchent à faire leur entrée sur le marché et à remporter des appels d’offres.
Vous avez fondé votre cabinet en pleine pandémie. Quel impact la COVID a-t-elle eu?
La COVID a changé les mentalités. Elle a permis de démontrer que la qualité du service ne dépend pas d’un bureau au centre-ville, mais du contenu juridique livré. Pendant cette période, tout le monde travaillait à distance, et cela a levé les stigmates qui pouvaient exister envers l’avocat qui exerce de chez lui.
Mes clients, eux aussi, ont évolué. Là où certains exigeaient autrefois l’appui d’un grand cabinet, ils n’ont plus d’hésitation à me confier leurs dossiers directement.
Mais vous aviez déjà une solide réputation…
Oui, mais rien n’était acquis. Passer d’un grand cabinet à une pratique individuelle signifiait moins de ressources et plus de responsabilités. Mais mes clients m’ont fait confiance et m’ont suivi. La gestion des conflits est également tout autre en pratique privée, et après cinq ans, j’ai considérablement augmenté mon bassin de clients. Je considère que c’est un réel accomplissement.
Quelle place occupe la technologie dans votre cabinet?
Une place centrale. Mon bureau est entièrement numérique et sécurisé. Je n’ai pas de dossiers physiques : tout est dans le cloud. La gestion du compte en fidéicommis ou des obligations administratives est simplifiée au maximum. Une fois les bons outils en place, la gestion interne de mon cabinet ne représente qu’une fraction de mon temps.
Comment l’IA vous aide-t-elle concrètement?
L’IA agit comme un véritable assistant. Elle me permet d’effectuer rapidement des recherches préliminaires, de retrouver des documents, ou encore de résoudre des problèmes techniques. Elle constitue un levier précieux pour un cabinet agile comme le mien.
Les grands cabinets adoptent aussi ces outils, mais à un rythme plus lent, en raison des enjeux très sérieux que leur utilisation soulève. Dans un cabinet indépendant, la flexibilité est totale : je peux intégrer immédiatement les technologies qui me semblent utiles.
Le centre-ville ne vous manque pas?
Non. Mais je dois reconnaître que les 15 années passées chez Blakes ont été déterminantes. C’était une école exceptionnelle, qui m’a permis d’acquérir un degré de sophistication et une compréhension du milieu des affaires hautement complexifié. Cela me permet aujourd’hui d’aborder une clientèle sophistiquée et de bien comprendre ses enjeux.
Sans cette expérience préalable, lancer Julius Légal aurait été presque impossible. Elle m’a donné les outils, la discipline et le langage des affaires nécessaires pour être efficace auprès de cette clientèle.
Comment qualifieriez-vous le droit des marchés publics?
C’est un domaine hautement complexe. Avec la création de l’Autorité des marchés publics, la charge réglementaire s’est intensifiée. Même pour un avocat spécialisé qui suit chaque jugement, chaque réglementation et chaque projet de loi, il est ardu de tout maîtriser.
Les risques d’erreurs sont réels, et cela crée des enjeux importants, autant pour les organismes publics que pour les entreprises.
Les autorités devraient-elles simplifier les processus?
Absolument. Trop souvent, la réponse du gouvernement aux problèmes rencontrés consiste à ajouter de nouvelles couches de réglementation plutôt que de simplifier. Résultat : chaque semaine, je dois consacrer une part importante de mon temps à suivre l’évolution législative et jurisprudentielle.
La gestion contractuelle au sein d’un organisme du domaine de la santé est devenue si complexe qu’elle mène très souvent à un immobilisme qui devient un frein à l’innovation. Il s’agit d’un enjeu assez majeur dont on discutera à une prochaine occasion!
Admirateur
il y a une heureJe me dois d'ajouter que Me Kaufman entre dans ses années Clooney.