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Une armée d’avocats sur une action collective

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Didier Bert

2025-08-04 15:00:52

La Cour supérieure autorise partiellement une action collective alléguant qu’il est trop facile de voler des véhicules automobiles au Québec. Combien d’avocats sur le dossier?

Les attaques-relais sont-elles trop faciles à réaliser par les voleurs de véhicules au Québec?

Éric Bouchard, Elhadji Madiara Niang, Jean Rhéaume et Rose-Marie Fillion (source : Bouchard + Avocats)

C’est ce qu’allègue une action collective, que la Cour supérieure du Québec a autorisé à l’encontre de Toyota, Honda, Hyundai, Nissan, Mazda, Fiat Chrysler, Ford, Audi, Kia, Mitsubishi, Subaru, Volkswagen et Volvo.

Le juge Clément Samson a toutefois exclu Porsche, Jaguar Land Rover, Mercedes-Benz, BMW et General Motors de l’action collective.

Le juge Samson a nommé le demandeur, André Lacroix, représentant du groupe composé de « toute personne physique, consommatrice au sens de la Loi sur la protection du consommateur, domiciliée ou résidant au Québec, victime du vol, d’un ou de plusieurs véhicules à compter du 2 mai 2021 équipés d’un système d’accès et de démarrage avec une clé électronique personnelle « key fob » (exception faite de celle dotée de la technologie Ultra-Wide Band), et fabriqués ou importés et commercialisés au Québec par l’une des défenderesses. »

Plus de 30 avocats

Le demandeur est représenté par Me Éric Bouchard, Me Elhadji Madiara Niang, Me Jean Rhéaume et Me Rose-Marie Fillion du cabinet Bouchard + Avocats.

Les avocats des défenderesses sont respectivement :

  • pour Toyota, Me Guillaume Boudreau-Simard, Me Julien Demers Poitras et Me Melis Celikaksoy du cabinet Stikeman Elliott;
  • pour Honda, Me Sidney Elbaz, Me Yassin Gagnon-Djalo et Me Laura Hamdan de McMillan;
  • pour Hyundai et Kia, Me Margaret Weltrowska et Me Érica Shadeed de Dentons Canada;
  • pour Nissan, Me Kristian Brabander et Me Stéphanie Gascon d’Osler Hoskin & Harcourt;
  • pour Mazda, Me Alexis Leray de BLG;
  • pour Fiat Chrysler (FCA), Me Patrick Plante et Me Antoine Gamache de BLG;
  • pour Ford, Me Pascale Dionne-Bourassa et Me Francesca Taddeo de Bennett Jones;
  • pour Mitsubishi, Me Andrei Pascu et Me Simon Paransky de McMillan;
  • pour Subaru, Me Emmanuelle Rolland et Me Marc-André Grou du cabinet Audren Rolland;
  • pour Volvo, Me Francis Rouleau de Delegatus.
  • pour Audi, Volkswagen et Porsche, Me Alexandra Hébert de Torys;
  • pour Jaguar Land Rover, Me Gabriel D’Addona de Gowling WLG;
  • pour Mercedes-Benz, Me Laurent Nahmiash et Me Josée Cavalancia du cabinet INF;
  • pour BMW, Me Sébastien Richemont et Me Mirna Kaddis de Fasken;
  • pour General Motors, Me Stéphane Pitre de BLG.

Vol par attaque-relais


Sidney Elbaz, Yassin Gagnon-Djalo et Laura Hamdan (source : McMillan)

L’affaire commence le 26 juin 2018, quand André Lacroix achète un véhicule Toyota Highlander 2018 chez un concessionnaire de Québec. « Le manuel du propriétaire ne le met nullement en garde en ce qui concerne la sécurité reliée aux clés intelligentes associées à ce véhicule », précise la demande d’action collective.

Or, le 17 avril 2022, André Lacroix réalise qu'il s'est fait voler son véhicule, qu'il avait stationné la veille dans la cour avant de la résidence de sa fille, située à Boucherville. Il avait pourtant verrouillé son véhicule après l’avoir stationné. Il n'a jamais retrouvé son automobile.

Le juge Clément Samson considère que « les présomptions sont suffisamment graves, précises et

concordantes pour conclure au vol par attaque-relais du véhicule de Monsieur Lacroix ». Il juge également que « le mode d’opération par les voleurs fut le même que celui utilisé par plusieurs autres voleurs, dont certains captés par des caméras de surveillance et qui démontrent une certaine aisance à le faire ».

Le véhicule était doté d’un système de verrouillage sans contact, actionné par une clé intelligente appelée « key fob ». L’action collective allègue qu’un voleur n’a qu’à capter et copier le signal de la clé intelligente pour s’introduire dans le véhicule, le faire démarrer et s’enfuir.

Une prise de connexion électronique, appelée port OBD, peut servir à programmer de nouvelles clés. Les équipements nécessaires pour capter le signal ou se brancher sur le port OBD peuvent être achetés sur Internet.

Rejet du vol avec effraction

Outre l’attaque-relais par copie du signal de la clé, le voleur peut aussi forcer une portière, puis une fois à l'intérieur, il n'a qu’à brancher un équipement sur le port OBD, pour faire démarrer le moteur.

Cependant, le juge Samson exclut le vol avec effraction de l'action collective, soulignant que « le demandeur lui-même ne prétend pas avoir été victime d’un tel type de vol ».

Patrick Plante et Antoine Gamache (source : BLG)

La Cour supérieure écarte aussi les constructeurs Jaguar Land Rover, Mercedes-Benz, et BMW de l’action collective, car ces manufacturiers utilisent, qui montre un niveau de sécurité bien plus élevé, selon une étude de l’ADAC, une association regroupant 21 millions d’automobilistes européens.

Le tribunal rejette également Porsche et General Motors de l’action collective, car ces manufacturiers ne sont pas visés par l’étude européenne, produite par le demandeur pour faire la démonstration que les attaques-relais sont aisément réalisables.

Sécurité sous-estimée?

Le demandeur allègue que la défenderesse Toyota « n’aurait pas pris les mesures pour rendre les clés intelligentes sécuritaires à l’abri des vols, ou du moins ne l’en aurait pas informé, ou bien la défenderesse Toyota n’aurait pas pris les moyens pour éviter un branchement trop facile au port OBD. Ces failles de sécurité seraient connues des fabricants — dont la défenderesse Toyota — depuis plusieurs années et ceux-ci n’auraient pas, malgré les risques associés pour les consommateurs, modifié les mesures de sécurité de leurs véhicules. »

Selon le demandeur, l’action collective peut concerner plus de 10 000 consommateurs québécois, victimes des vols de véhicules équipés de clés intelligentes qui auraient eu lieu au Québec au cours de chacune des trois années qui ont précédé le dépôt de la demande d’autorisation du 2 mai 2024.

L'action collective reproche aux défenderesses d’avoir, depuis des années, « commercialisé une technologie sans se soucier du niveau de sécurité approprié contre le vol ». Il invoque la responsabilité des fabricants qui connaissaient ce vice de sécurité et qui l’auraient passé sous silence.

D'une part, le manuel d’instruction de Toyota ne mentionne pas que le signal de la clé intelligente du véhicule peut être capté et copié, ni que quelqu’un puisse reprogrammer une clé en ayant accès au port OBD.

D’autre part, les constructeurs BMW et Tesla auraient mis au point une nouvelle clé sécuritaire ou auraient pris d’autres moyens, limitant les vols.

Une déclaration, des dommages, un rappel

Laurent Nahmiash et Josée Cavalancia (source : INF)
Le demandeur réclame que les fabricants automobiles fassent une déclaration de responsabilité « pour avoir commis une faute contributive de conception, permettant le vol des véhicules des membres du groupe et pour ne pas avoir au moins prévenu les consommateurs d’un défaut de sécurité de leurs clés ».

Il demande également au tribunal de condamner les défenderesses à verser 1 500 $ en dommages compensatoires aux victimes de vols de véhicules, ainsi que des dommages punitifs de 1 500 $ pour chaque véhicule commercialisé au cours des trois années précédant le dépôt de la demande d’autorisation. Les dommages punitifs seraient destinés à un organisme à but non lucratif de protection des droits des consommateurs dans le monde automobile.

Enfin, il demande que les défenderesses effectuent des rappels de véhicules pour apporter des corrections les rendant plus sécuritaires.

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