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Vol de données chez Desjardins : les accusés réclament l’arrêt des procédures

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Radio Canada

2025-08-15 11:15:49

Une requête déposée par les avocats de la défense écorche le comportement du Mouvement Desjardins dans le cadre de l'enquête…

Source : Radio Canada


Les six accusés du vol de données chez Desjardins vont demander l'arrêt des procédures, alléguant qu'une série de fuites policières « systémiques » ont compromis leur présomption d'innocence et « leur droit à un procès équitable ». Pour étayer cette requête de type Babos, qui dénonce une conduite abusive de l’État, leurs avocats ont déposé une première requête en divulgation de preuve, qui écorche au passage les méthodes de Desjardins et critique la longueur de l’enquête.

Dans le document d'une centaine de pages, la défense réclame l'intervention du juge pour obtenir des informations qui appuieraient leur requête en arrêt des procédures.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a jusqu'ici refusé de transmettre les renseignements demandés, invoquant notamment le secret professionnel de l'avocat et le privilège de l'informateur.

Par exemple, les accusés veulent savoir qui étaient les policiers en possession de l'information qui s'est retrouvée dans les médias. Les fuites policières peuvent influencer les témoins, contaminer l'opinion publique, indique la requête signée par les avocats des six coaccusés.

Suspects « harcelés »

En juin 2019, le journal La Presse identifiait Sébastien Boulanger-Dorval, ex-employé du Mouvement Desjardins, comme l'auteur présumé du vol. En septembre, des mandats de perquisition ont été exécutés et, dès lors, les suspects auraient été harcelés par des journalistes, soutiennent leurs avocats. En octobre, Québecor publie une série de reportages liant les accusés au vol de données et diffusant leurs noms et photos.

À partir de ce moment, les fuites deviennent systémiques et massives, selon la défense, menant à la publication de dizaines d'articles entre 2019 et 2024.

Alors que leurs clients ne sont pas accusés, les avocats de la défense soutiennent qu'il s'agit de fuites préoccupantes ayant pour effet d'orienter l'opinion publique ainsi que d'exercer une pression indue sur les suspects.

La requête mentionne de nombreuses conséquences : enquêtes disciplinaires, fermetures de comptes bancaires, pertes financières, troubles de santé, problèmes familiaux et une présomption de culpabilité de facto. Il aura fallu près de cinq ans après le début de l'enquête pour que des accusations soient portées en juin 2024.

Délai jugé déraisonnable

Dans sa requête en divulgation, la défense demande que le DPCP lui fournisse la date à laquelle il a reçu le dossier d'enquête. Les requérants allèguent que des délais déraisonnables sont survenus entre la fin de l'enquête policière et le dépôt des accusations, peut-on lire dans la requête.

Pour la défense, les cinq années entre le début de l'enquête et le dépôt des accusations constituent un délai excessif et injustifié. Les avocats réclament d'avoir accès aux échanges entre le DPCP, les services de police et Desjardins en ce qui a trait au moment approprié pour judiciariser le dossier, ainsi qu'à la coordination médiatique, policière ou institutionnelle.

Desjardins écorché

La procédure de la défense critique aussi le comportement de Desjardins qui a mené sa propre enquête, sans collaborer pleinement avec le Service de police de Laval et la Sûreté du Québec (SQ). La Cour supérieure a dû autoriser la SQ à obtenir les résultats de l’enquête interne de Desjardins. Malgré cela, l’institution aurait continué à transmettre l’information au compte-gouttes, invoquant divers privilèges, dont le secret professionnel et le secret commercial.

Loin de se limiter à un rôle de victime ou de témoin, Desjardins a mené sa propre enquête en se livrant à des perquisitions dans des locaux sous contrôle judiciaire, peut-on lire dans la requête. Selon les avocats des accusés, l'attitude adoptée par Desjardins à la suite de la découverte de la fuite soulève des préoccupations quant à l'intégrité de la preuve recueillie ainsi qu'au rôle qu'une entité privée peut jouer dans une enquête à caractère public.

Cette enquête privée, aux dires des avocats de la défense, s'est faite sans être assujettie aux garanties constitutionnelles que doivent respecter les corps policiers, comme la préservation de la chaîne de possession et la gestion de la preuve. Les firmes KPMG et Mandiant, mandatées par Desjardins pour participer à son enquête interne, n'auraient pas collaboré à l'enquête policière, à la demande de l'institution.

Le rôle de Mandiant dans l'enquête initiale constitue une zone d'ombre significative, indique la requête. Il est difficile d'évaluer l'admissibilité et la valeur probante des éléments de preuve ayant transité par les firmes KPMG et Mandiant avant d'être remis aux policiers, allègue encore la requête.

Prochaines étapes

Le juge Jean-Philippe Robitaille a été désigné par la Cour du Québec pour trancher les requêtes préliminaires, en prévision du procès. Cinq jours d'audience sont prévus à la fin du mois de septembre pour la présentation de cette première requête.

En plus de celle en arrêt des procédures visant le comportement de l'État, une autre pour délai déraisonnable – appelée Jordan – a également été soulevée par les avocats de la défense lors des audiences préliminaires. Pour le moment, la durée estimée de ce procès, s'il devait avoir lieu, est de deux mois.

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