Attentat à Québec: terrorisme, folie, et prison à vie

Une fusillade a éclaté, dimanche soir, dans une mosquée de Québec faisant six victimes et 19 blessés. Un suspect a été arrêté : Alexandre Bissonnette, un jeune étudiant de l’Université Laval.

Particulièrement touché par les événements, Me Daniel Rock conseille au suspect de plaider coupable : « Il n’y a rien d’autre à faire. Qu’il plaide coupable et se fasse oublier. Il a commis un crime à la face de tout le monde. Pour moi, plaider la déficience mentale n’est même pas une option, puisque l’attaque semblait être planifiée ».

Ce n’est d’ailleurs pas un dossier que lui-même ou son cabinet prendraient en charge: « J’ai un gros problème avec les gens qui commettent des actes racistes comme celui-là. Les immigrants sont un atout pour notre société. Cet homme s’est attaqué à un fondement universel ».

Me Marie-Hélène Giroux du cabinet Monterosso Giroux Avocats n’est pas de cet avis : c’est un dossier qu’elle pourrait prendre sans problème. « Tout le monde a droit à une défense pleine et entière donc le cabinet pourrait prendre un tel dossier. »

Le plaideur de Québec Me Didier Samson considère quant à lui « qu’avant de prendre un dossier comme ça, ça mérite une très grande réflexion ». Il n’a pas voulu se prononcer davantage sur le sujet, invoquant l’émotivité qui entoure les événements, fraîchement survenus.

Terrorisme ou maladie mentale ?

Selon Me Giroux, s’il est encore trop tôt encore pour se prononcer sur l’affaire, il est clair que l’auteur du crime encourt des peines sérieuses et lourdes en raison des crimes graves commis. Va-t-il être accusé de terrorisme? Va-t-il plaider des facteurs atténuants comme la maladie mentale ou l’intoxication? Tout est encore possible.

Le criminaliste Didier Samson pense qu’il « est certain que dans le contexte politique actuel, la Couronne va invoquer plusieurs partie des articles 83.01 et 83.18 sur le terrorisme. Soutenait-il une cause? Y a-t-il un groupe derrière lui? Au nom de quoi a-t-il fait ça? C’est ce que la preuve nous dira ».

Ces accusations risquent de survenir plus tard dans le dossier, croit cependant Me Samson. D’une part, elles sont difficiles à documenter rapidement. Mais aussi, « il y aura des chefs de meurtre au premier degré, en plus de la possession d’armes prohibées, et d’une panoplie d’autres chefs, qui feront en sorte qu’Alexandre Bissonnette ne sera pas relâché avant procès. »

Quelle défense?

Pour Me Danièle Roy, présidente de l’Association québécoise des avocats et avocates de la défense, deux questions se posent : quelle est la preuve d’une part? Et était-il sain d’esprit? Dans le cas où l’individu serait sain d’esprit, il risquerait l’emprisonnement à vie.

Pour le plaideur québécois Jacques Larochelle, il ne fait aucun doute « que la poursuite va dire que c'est un meurtre au premier degré ». Me Larochelle estime « ce sera une cause difficile à plaider en défense. Je vois mal comment on peut faire autrement qu'en plaidant un problème de santé mentale ».

Me Didier Samson estime que Bissonnette ne sera pas facile à défendre. « La défense va certainement invoquer tous les états de santé mentale, mais c’est loin d’être gagné: on dit qu’il a des remords, on présume qu’il aurait voulu se suicider… cela cadre mal avec l’idée qu’il aurait souffert une psychose pendant la commission de l’acte ».

Forte préméditation

Me Samson remarque que la préméditation est forte dans le cas d’Alexandre Bissonnette. « Un Ak-47, on n’achète pas ça au Dollarama! Et il a visé les hommes et l’imam », constate Didier Samson.

Quant aux peines encourues, Me Rock explique qu’en l’état actuel des choses, le suspect, s’il est jugé coupable, pourrait techniquement écoper de peines consécutives: « La loi le permet aujourd’hui, mais c’est à l’avocat de contester pour que cela soit déclaré inconstitutionnel ».

L’équipe intégrée de sécurité nationale (GRC-SQ-SPVM-SPVQ) ainsi que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) ne se sont quant à eux pas avancés quant aux possibles accusations, au moment de publier ce texte.

Alexandre Bissonnette comparaîtra au Palais de Justice de Québec en fin de journée, lundi.