L'ex-juge Pierre Dalphond
Ainsi, des 98 cabinets d'avocats qui ont présenté au moins une demande d'autorisation depuis 1998, une quinzaine se partagent plus de 75 % des 596 demandes inscrites au registre.
De ce nombre, les dix plus importants cabinets, de Siskinds Desmeules à Belleau Lapointe en passant par Trudel Johnston & Lespérance, ont ainsi inscrit 366 demandes d'autorisation pendant cette période. C'est donc dire que 10% de tous les cabinets demandeurs sont à l'origine de 61 % de toutes les demandes inscrites au registre, tenu par la Chambre des actions collectives de la Cour supérieure.
On y dénombre un total de 596 demandes d'autorisation déposées depuis 1998, soit presque deux décennies.
Les tribunaux québécois ouverts aux recours
Que seuls quelques cabinets soient présents au sommet n'étonne pas l'ex-juge Pierre Dalphond : « Je ne crois pas qu'on puisse parler d'un marché de niche, mais il est normal de retrouver souvent les mêmes noms. L'action collective exige des ressources et une expertise particulière », dit-il.
Aujourd'hui chez Stikeman, l'ex-juge de la Cour d'appel concède que les conditions québécoises ont facilité l'autorisation d'une pléthore de recours. « Au Québec, on a eu tendance à dire que le seuil d'autorisation est plus bas encore qu'ailleurs au Canada: par exemple on n'a pas besoin du rapport d'expertise » lors de la certification. Tout au plus doit-on avoir une chance raisonnable de remporter sa cause.
Me Dalphond signale qu'il est un de ceux qui sont à l'origine de l'éclosion des actions collectives. « On se disait on veut que ça parte, après on verra », dit-il.
On remarque ainsi une explosion de recours depuis 2009, selon les données inscrites au registre. C'est l'année où la barre des 50 demandes était franchie. Jugé plus « coulant » que bien d'autres juridictions, le Québec serait aussi l'un des endroits où les actions collectives sont relativement faciles d'accès.
Le Registre des actions collectives révèle ainsi que le cabinet le plus important en matière de demande d'autorisation est Siskinds Desmeules, une boutique de Québec affilié à Siskinds, de Windsor en Ontario. Le cabinet compte 77 demandes inscrites au registre.
Par ailleurs, trois avocats de ce cabinet se hissent dans le top 10 des demandeurs, alors que Barbara Ann Cain, Simon Hébert et Samy Elnemr comptent respectivement 25, 18 et 15 demandes d'autorisation.
Siskinds Desmeules n'a répondu à nos demandes d'entrevue.
Premier arrivé, premier servi
Joey Zukran, aujourd’hui chez LPC Avocats
« En faisant de la recherche sur les pratiques prohibées par la Loi sur la protection des consommateurs, j'ai constaté que plusieurs entreprises en violaient de façon presque systématique les articles », explique Joey Zukran, qui a déposé pas moins de 21 demandes d'autorisations en action collective.
Assermenté en 2016, il a également hérité de requêtes déposées en 2015, ce qui fait de lui le demandeur le plus prolifique de tous les avocats d'action au Québec, selon notre analyse : ses 21 demandes d'actions depuis 2015 lui donne une moyenne de sept par année.
Jeff Orenstein, du Consummer Law Group
Une observation que partage Roch Dupont, qui a lui-même 23 demandes à son actif au Québec, soit presque la moitié des demandes déposées par son cabinet (58), Merchant Law Group. L'avocat, basé à Regina en Saskatchewan, explique que sa firme dépose systématiquement une demande au Québec dans le cas de causes à portée nationale.
Roch Dupont de Merchant Law Group
Un processus extrêmement lourd
Du côté de Trudel Johntson & Lespérance, on ne fait pas de secret quant à l'importance de l'action collective dans le modèle d'affaires.
« Quand nous avons débuté, on se disait qu'avec cinq demandes par année, on arriverait avec 25 causes au bout de cinq ans. On estimait que les premières causes se régleraient dans ce délai », explique Philippe Trudel, associé et cofondateur du cabinet éponyme.
Philippe Trudel, associé et cofondateur du cabinet éponyme
L'action collective est un processus extrêmement lourd, et qui peut s'avérer complexe. Les nombreux recours intentés contre les grandes institutions financières, ou contre les cigarettiers, s'étirent sur des années et requièrent des ressources importantes. « Il faut donc une pratique parallèle pour assurer ses arrières » dit-il, ajoutant qu'à ses débuts, à la fin des années 1990, TJL ne déposait qu'une demande aux 2 ans environ. Puis, le volume a augmenté en 2008, alors qu'on en a déposé environ 3, parfois 4 par an. Une vitesse de croisière qui se maintient aujourd'hui, alors que l'action collective compte pour 80 % environ des activités de TJL.
À lire demain: y a-t-il une industrie des actions collectives?
Méthodologie
Droit-Inc a extrait du Registre des actions collectives toutes les demandes d'autorisation inscrites depuis le 1er janvier 2009, afin d'identifier les plus importants cabinets et les plus prolifiques avocats de la demande.
Notre analyse, tant des cabinets que des avocats qui pratiquent en action collective, se limite aux inscriptions au registre, et ne portent que sur le volume de demande et l'identité des demandeurs principaux, avocats et cabinets et, pour chacune des demandes.
Notre analyse ne porte pas sur une recension des actions remportées, réglées ou plaidées.
Nous avons recensé 596 demandes déposées entre le 1er janvier 1998 et le 16 novembre 2017 et inscrites au registre. Les demandes d'autorisation déposées contre Gilbert Rozon et contre Apple ne sont donc pas dans notre échantillon.
Les statistiques de la Cour supérieure ne donnent pas la mesure précise de l'action collective : d'une part, le registre a été créé en 2009, et l'inscription au registre n'est systématique que depuis 2016.
Droit-Inc a extrait du Registre des actions collectives toutes les demandes d'autorisation inscrites depuis le 1er janvier 2009, afin d'identifier les plus importants cabinets et les plus prolifiques avocats de la demande.
Notre analyse, tant des cabinets que des avocats qui pratiquent en action collective, se limite aux inscriptions au registre, et ne portent que sur le volume de demande et l'identité des demandeurs principaux, avocats et cabinets et, pour chacune des demandes.
Notre analyse ne porte pas sur une recension des actions remportées, réglées ou plaidées.
Nous avons recensé 596 demandes déposées entre le 1er janvier 1998 et le 16 novembre 2017 et inscrites au registre. Les demandes d'autorisation déposées contre Gilbert Rozon et contre Apple ne sont donc pas dans notre échantillon.
Les statistiques de la Cour supérieure ne donnent pas la mesure précise de l'action collective : d'une part, le registre a été créé en 2009, et l'inscription au registre n'est systématique que depuis 2016.
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