Le juge Michel Girouard
Le juge Michel Girouard
Le Conseil canadien de la magistrature (CCM) conteste la décision de la Cour fédérale, qui estime être de juridiction pour effectuer un contrôle judiciaire de sa recommandation de destituer le juge Michel Girouard, de la Cour supérieure, selon ce que rapporte Le Citoyen Val-d’Or.

Le juge abitibien est suspendu avec solde depuis janvier 2013, sous enquête pour avoir présumément acheté de la cocaïne à un réseau de trafiquants.

Le 7 septembre, le CCM a déposé un avis d’appel d’une décision rendue par la Cour fédérale le 29 août. Le Conseil maintient que la Cour fédérale n’a pas compétence pour examiner ses recommandations concernant des juges en chef des cours supérieures du Canada.

Dans une décision de 95 pages, le juge Simon Noël de la Cour fédérale a rejeté les quatre requêtes en radiation déposées par le Conseil canadien de la magistrature.

Selon la Cour fédérale, le CCM ne peut être qualifié de juridiction supérieure, comme il le prétend. «Le rapport avec ses conclusions et recommandations de révocation à la ministre équivaut à ce que le CCM reconnaît être une ‘’peine capitale’’. Un rapport ayant un effet si dévastateur sur la carrière du juge et sa famille est révisable par une demande de contrôle judiciaire», ajoute le juge Noël dans sa décision, selon ce que rapporte Le Citoyen Val-d’Or.

La Cour fédérale du Canada a rejeté la requête du conseil canadien de la magistrature, le CCM, qui demandait à ce que la demande de révision judiciaire de Michel Girouard soit rejetée.


Le juge Girouard peut donc contester sa destitution devant la Cour fédérale du Canada.

«Le Conseil continuera de faire pression pour que des réformes législatives soient entreprises dans ce domaine afin d’assurer la confiance et l’efficacité du public dans un processus rigoureux de révision de plaintes concernant la conduite judiciaire», précise de son côté, par voie de communiqué, le CCM.

Une interminable saga

L’affaire du juge Michel Girouard, nommé à la Cour supérieure en octobre 2010, est une véritable saga judiciaire.

Il a fait l’objet de deux comités d’enquête du Conseil canadien de la magistrature. Il a été blanchi par le premier comité, même si certains membres ont remis en question la fiabilité et la crédibilité de sa version des faits.

Puis en février dernier, le Conseil canadien de la magistrature a recommandé qu’il soit démis de ses fonctions.
Le Conseil suivait ainsi la recommandation du comité d'enquête qui avait été chargé de faire la lumière sur les possibles inconduites du juge Girouard.

Quelques jours plus tard, trois juges dissidents du Conseil canadien de la magistrature ont demandé l’annulation des procédures contre le juge Girouard. Ils refusaient de recommander la destitution… pour une question d’ordre linguistique. Certains juges n’étaient en effet pas bilingues.

Le 2 mars, les avocats du juge Girouard, Me Gérald Tremblay de McCarthy Tétrault et Me Louis Masson de Joli-Coeur Lacasse, ont déposé une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale, à Québec, afin que la décision du CCM soit déclarée nulle et invalide et d’ordonner que les procédures à son égard soient abandonnées.

Acheter du temps

Selon le professeur en droit constitutionnel à l'Université Laval, Patrick Taillon, cette décision de la Cour fédérale du Canada permet au juge Girouard de gagner du temps puisque si la décision est maintenue par la Cour fédérale, il pourrait ensuite la contester devant la Cour suprême du Canada.

« On est vraiment face à une espèce de guérilla procédurale où le juge Girouard a décidé de prendre tous les moyens pour se défendre, le cas est très inusité, hors du commun », dit-il.

« Généralement, les juges, lorsqu'ils sont dans une situation embarrassante comme celle-là, vont volontairement démissionner avant qu'on les force à le faire. Ici, on a affaire à un juge qui s'entête à déclarer son innocence, et sur le plan éthique et légal, son comportement ne pose aucun problème. »

-Avec Radio-Canada