Procès civil : Gilbert Rozon dit que les demanderesses se sont « inventé une vérité »

Radio Canada
2025-07-03 13:15:35

Pour Gilbert Rozon, ce sont l’appât du gain et la vengeance qui ont motivé neuf femmes à intenter une poursuite civile pour des agressions sexuelles dont elles lui attribuent la responsabilité.
Le fondateur de Juste pour rire, qui s’est soumis devant une salle comble à son contre-interrogatoire, mercredi au palais de justice de Montréal, a soutenu que les demanderesses se sont « inventé une vérité ».
Gilbert Rozon est visé par des allégations d'agressions sexuelles par neuf femmes dans ce procès civil. Sept autres femmes ont parlé à titre de témoins de faits similaires, dont Julie Snyder et Pénélope McQuade.
Les demanderesses en question réclament 14 millions de dollars à l'ex-producteur pour le préjudice que ce dernier leur aurait fait subir.
M. Rozon a présenté sa version des faits, notamment lors d’une audience qui a fait grand remous la semaine dernière. Les demanderesses avaient aujourd’hui l'occasion de l'interroger sur ses allégations.
Or, lorsque l’avocat des demanderesses, Me Bruce Johnston, a demandé au fondateur de Juste pour rire s’il croyait que chacune d’elles avait menti dans leurs témoignages respectifs, celui-ci a rétorqué qu’elles s'étaient «inventé une vérité» autour d’un «énorme enjeu financier» et qu’elles avaient «fini par se croire».
M. Rozon a ainsi soutenu que le véritable motif de cette poursuite est l’argent et un désir de vengeance, plus spécifiquement en rapport avec un rejet ou une perte d’emploi, dans le cas de certaines demanderesses.
« Ce sont toutes des amies »
L’ex-producteur a affirmé que les demanderesses s'étaient liguées contre lui, tout comme les intervenantes qu’elles ont appelées à la barre.
« Ce sont toutes des amies. […] Elles ont des raisons personnelles de s’inventer cette vérité ou de mentir, ou [des raisons] professionnelles. Certaines mentent, d’autres se sont inventé une vérité.»
Il a d'ailleurs lié l’intervention de l’animatrice Julie Snyder à une vengeance à la suite de la perte d’un important contrat à l'occasion du 375e anniversaire de Montréal, dont il était commissaire, et d’une cabale qu’elle menait contre lui et Éric Salvail pour se tailler une place à la station de télévision V.
Son ancienne conjointe, Véronique Moreau, dont la sœur Sophie est au nombre des plaignantes, est venue témoigner de faits similaires par solidarité avec sa sœur.
« Je ne sais pas si elle partage [l’argent des dommages que pourrait éventuellement accorder le tribunal aux plaignantes] avec sa sœur », a-t-il dit.
Dans le cas de la comédienne Salomé Corbo, il affirme que son témoignage de faits similaires a été «inventé pour soutenir sa belle-mère», la plaignante Danie Frenette.
Rozon se dit victime de #MoiAussi
Gilbert Rozon allègue en outre être devenu un bouc émissaire pour le mouvement #MoiAussi, le motivateur sociologique de la poursuite, selon lui.
Il a répété qu'il se battait en justice contre ce qu’il qualifie de légalisation de l’extorsion par une coalition de demanderesses.
«Je défends la vérité», a martelé Gilbert Rozon. «Vos clientes ont changé depuis le début, toutes sans exception, leur version», a-t-il ajouté, spécifiant que sa version était la «seule à ne pas avoir changé».
Pour la directrice générale de Juripop, Sophie Gagnon, le témoignage de Gilbert Rozon pourrait porter un sévère coup à la poursuite si la version des faits présentée lors de son contre-interrogatoire était retenue.
Me Sophie Gagnon a dit voir dans la tentative de regrouper plaignantes et témoins de faits similaires dans une coalition « une autre manière de tenter de miner la crédibilité des demanderesses » et « des témoins ».
«Dans la version des faits de M. Rozon, il y a eu une stratégie, une concertation en demande avec des motivations variées comme la vengeance, l'envie, la non-reconnaissance et le désir d'obtenir de l'argent, alors si cette version est retenue, ça pourrait miner la crédibilité des demanderesses», estime Sophie Gagnon.
Cependant, précise-t-elle, même si Gilbert Rozon a été acquitté d'une accusation au criminel dans un procès civil, «le fardeau de la preuve est différent, il est effectivement moins exigeant. C'est le fardeau de preuve de la balance des probabilités et c'est un fardeau qui continue d'appartenir aux demanderesses.»
«Il a raison d'affirmer qu'il a été acquitté de cette accusation-là. Par contre, on peut être acquitté d'une accusation au criminel mais voir sa responsabilité civile retenue pour des faits similaires», nuance-t-elle.
Le contre-interrogatoire se poursuivra la semaine prochaine, mais les plaidoiries sont prévues à l'automne.