Me Yan Paquette, souhaite que le travail de son équipe soit mieux connu et surtout mieux compris par la communauté juridique.
Me Yan Paquette, souhaite que le travail de son équipe soit mieux connu et surtout mieux compris par la communauté juridique.
L’archétype du fonctionnaire, c’est l’employé qui baigne dans une routine, travaillant dans un cadre peu stimulant et dans lequel les défis se font rares.

Me Yan Paquette, sous-ministre associé du ministère de la Justice, souhaite que ce cliché soit enrayé de la direction générale des affaires juridiques, législatives et de l'accès à la justice, où il dirige plus de 450 juristes.

« C’est tellement différent de cette vision! On imagine des journées prévisibles, où l’on sait ce qui va se passer du matin au soir. La réalité, c’est qu’il y en a pour tous les goûts. »

Rencontré au bureau du contentieux du Palais de justice de Montréal par Droit-Inc, le sous-ministre associé souhaite que le travail de son équipe soit mieux connu et surtout mieux compris par la communauté juridique.

En embauche continue pour combler des départs à la retraite, il veut que les juristes considèrent son ministère avant de rêver aux grands cabinets.

Pourquoi résister aux gros salaires que promettent les géants du monde du droit pour rejoindre le gouvernement?

« Il y a des attraits importants lorsqu’on travaille ici, dit-il. Les avantages sont intéressants. Les gens peuvent regarder le salaire, il n’est pas inintéressant. Moi, quand j’étais en pratique privée, je n’avais pas de fonds de pension, ni les avantages sociaux que j’ai ici. »

Des avantages différents, mais des défis tout autant intéressants attendent les juristes qui choisiront la voie publique, estime le sous-ministre associé .

« Pour quelqu’un qui est motivé, le défi sera de savoir s’arrêter parce qu’on a une tonne de défis ici, à tous les niveaux. »

Portefeuille d’expertises

Le sous-ministre associé rappelle que son ministère, c’est 20 divisions d’affaires juridiques et 25 000 mandats par année.

Passant de la rédaction législative de lois importantes, à la défense de ces lois devant les tribunaux, jusqu’à la participation à des commissions d’envergure, les mandats y sont variés.

« Les plus grands dossiers, on les fait. Nous sommes impliqués dans des actions collectives, des recours, des transactions commerciales… notre contentieux englobe une tonne d’expertises! »

Éducation, santé, famille, environnement, transport, culture, finance, affaires municipales…

Tous ces départements travaillent conjointement dans cet environnement où les expertises s’allient.

« On a besoin de tous les profils. Ce qui est génial, c’est qu’on a la capacité de plaire à une grande diversité de candidats. Quelqu’un qui préfère avoir un horaire de 35 heures par semaine pourra le faire ici, et dans ce 35 heures-là, rien n’indique qu’il n’aura pas des dossiers intéressants. »

De pitbull à chef d’orchestre

Me Yan Paquette croit que les étudiants en droit ne connaissent pas du tout les activités de son contentieux. D’ailleurs, si on lui avait lorsqu’il était à l’université qu’il travaillerait un jour au gouvernement, l’aurait-il cru lui-même?

« Pas du tout! Vraiment, pas du tout! En sachant que ça existe, les gens pourront mieux choisir le chemin qu’ils veulent prendre. »

À sa sortie de l’Université de Montréal en 1999, Me Paquette entame sa carrière chez McCarthy Tétrault. Près de six ans après y être entré, il passe à l’Autorité des marchés financiers, où il reste également six ans.

Il retourne ensuite dans le domaine privé, chez Langlois.

« Quand je me suis joint à un bureau de pratique privé, ça m’a aspiré, ça m’a étonné. Je n’aurais pas pensé que ça m’amènerait où je suis. »

Pourtant, moins de trois ans plus tard, le futur sous-ministre associé rejoignait le ministère de la Justice.

« Ce sont les défis qui m’ont attiré, un sens de l’État et un désir d’y participer, explique-t-il. J’ai l’impression que quand je me lève le matin, je ne défends pas des intérêts particuliers, mais le bien commun. Le sentiment de vouloir faire la différence m’anime chaque jour. »

Plusieurs personnes doivent tout de même trouver étrange que celui qui était comparé à un pitbull, en raison de son attitude en tant que plaideur, se trouve à la tête d’une aussi grande équipe.

« J’y allais à fond. Je me disais que tous les coups étaient permis… mais en réalité, la fin ne justifie pas les moyens, raconte-t-il. Je voyais ça avec un aspect romantique, c’était comme duel dans lequel le meilleur gagne. »

Petit à petit, le plaideur passionné a réalisé qu’ils croiserait à nouveau ses adversaires dans d’autres contextes, et qu’il était primordial pour lui de mieux canaliser sa passion afin de travailler dans le respect.

Aujourd’hui, il serait plus juste de le qualifier de chef d’orchestre.

« Je suis plus rassembleur. Je veux que mes juristes se développent au maximum, leur donner les conseils les plus adaptés. On est comme un grand orchestre : il faut créer de la musique et non de la cacophonie.»

Virage technologique

Le ministère de la Justice mène présentement un projet de transformation de la justice. L’objectif est de rendre celle-ci plus accessible, innovante et efficiente.

Ce sont 500 millions de dollars qui ont été partagés entre le ministère de la Justice, le Directeur des poursuites criminelles et pénales et le ministère de la Sécurité publique, qui ont comme objectif un virage technologique complété en 2022.

Un défi de taille considérant la vétusté des équipements actuels dans les palais de justice au Québec, dans lesquels une majeure partie de la communication s’effectue par fax.

« Pour avoir des outils technologiques, il faut avoir des infrastructures technologiques adaptées. À type d’exemple, si votre ordinateur a 15 ans et que vous essayez de mettre en place de nouvelles technologies dessus, ça ne fonctionnera pas. »

Parmi les changements visés, il y a le plumitif, qui date déjà de 1975. « Quelqu’un qui n’a jamais consulté le plumitif risque de ne pas comprendre ses informations », dit-il.

Le sous-ministre associé explique que celui-ci ne sera pas nécessairement modernisé, mais qu’une nouvelle technologie sera créée, qui sera plus accessible et compréhensible pour le citoyen.

Changer le droit

En plus de procéder à des changements technologiques majeurs, le ministère de la Justice veut intégrer des pratiques innovantes à son quotidien.

« On veut évaluer comment seuls les dossiers qui méritent d’être traités par notre système de justice le soient. »

La surjudiciarisation des dossiers concernant la toxicomanie et de santé mentale est notamment visée.

« Le droit doit évoluer. Il n’a pas peut-être pas évolué aussi vite qu’on l’aurait aimé. Avec ce qui c’est passé avec les délais en matière criminelle et pénale, avec certains arrêts de procédure, on doit maintenant faire les choses autrement. »

Et s’il n’en tient qu’à Me Paquette, la direction générale des affaires juridiques, législatives et de l'accès à la justice a un grand rôle à jouer dans ces changements.

« On participe à l’élaboration des lois. Nous aussi, on peut mettre en oeuvre les mesures alternatives. C’est sûr que maintenant, on doit faire la justice autrement ! »