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Technicienne juridique pendant 20 ans, et puis avocate!

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Florence Tison

2020-09-11 15:00:00

Une ex-technicienne juridique sera assermentée comme avocate en octobre, et commencera alors une pratique à son compte. Entrevue avec l’improbable...

Mélissa Plourde a toujours voulu être avocate. Photo : Courtoisie
Mélissa Plourde a toujours voulu être avocate. Photo : Courtoisie
Mélissa Plourde a toujours voulu être avocate, mais a commencé par être technicienne juridique pendant 20 ans.

À 33 ans et deux enfants (plus celui de son conjoint), elle a replongé dans les études en droit pour réaliser son rêve... et a eu un autre enfant entre-temps!

La future avocate sera finalement assermentée le 2 octobre prochain. Droit-inc lui a parlé.

Droit-Inc : Qu’est-ce qui vous a poussée à retourner aux études après 20 ans comme technicienne juridique?

Mélissa Plourde : En fait, c’est que depuis que je suis toute petite, je veux être avocate. Mais à la fin de mon secondaire, je n’avais pas envie de faire un DEC en sciences humaines et un bac en droit, et n’avoir aucune option si je n'aime pas ça. Avec un DEC en sciences humaines, on ne peut pas faire grand chose!

Et puis j’avais trop hâte de faire du droit tout de suite. Je me suis dit que j’allais faire un an d’études de plus au cégep et faire les techniques juridiques. Mon plan était de poursuivre le bac en droit après.

Mais ce n’est pas ce qui est arrivé...

J’ai décidé de faire mon stage à la fin de la technique dans un bureau d’avocats pour voir si ça vaut la peine d'investir du temps et de l'argent pour faire un bac.

J’ai aimé ça, j’ai aimé mon équipe. J’avais 19 ans, et ma conclusion a été de continuer en tant que technicienne en droit. J’étais super bien chez Joli-Coeur Lacasse. J’étais prête à travailler et vivre ma vie d’adulte. J’ai mis le bac en veilleuse et j’ai fondé une famille.

Vous avez finalement passé 20 ans en tant que technicienne juridique!

Oui! Après 11 ans chez Joli-Coeur Lacasse, j’ai eu une opportunité de poste permanent au DPCP. Là, j’ai été plus à même d'aller en cour, alors qu’en bureau privé, je travaillais plutôt à l'arrière scène. J’allais très peu en cour.

J’ai vraiment vu comment ça se passait. Plaider, je voyais ça beaucoup plus gros que c'était. J’étais gênée quand j'étais petite! (Rires)

J’ai eu l'occasion de voir des procès devant jury, et j’ai eu la piqûre : c'est ça que je veux faire, c’est le défi défi dont j'ai besoin.

C’est là que vous avez décidé de retourner aux études?

J’ai été beaucoup poussée par mes employeurs et mes collègues des travail : « Va faire ton bac! ». Ils m’ont motivée.

J’avais 33 ans, j’avais deux enfants, et mon conjoint avait un enfant aussi. J’ai quand même commencé mon bac en droit à l'université Laval en 2014, à une heure et quart de route.

Avez-vous continué de travailler en tant que technicienne juridique pendant vos études?

J'avais la chance d'avoir un poste permanent au DPCP, alors j’ai pu prendre un congé pour fin d'études. Je n’étais plus au DPCP, mais je gardais mon lien emploi.

Entre-temps, j’ai eu un poste d’enseignante en techniques juridiques au Collège Ellis. J'enseignais quatre cours sur deux jours, je suivais quatre cours sur deux jours à l’université, et le cinquième jour je le passais à étudier et à préparer mes cours. La fin de semaine, je la consacrais à la famille.

Ouf, toute une organisation!

J’avais vraiment des cases horaires sur chaque jour, et le bénévolat à travers de ça! J’ai siégé au sein du conseil d’administration la Coop Santé de Sainte-Gertrude pendant neuf ans.

En cours de bac j’ai eu la naissance de mon 3e enfant. J’ai terminé mon bac à cinq jours d'accoucher, en plein concours de plaidoirie Pierre-Basile-Mignault. L’université Laval était l’hôte cette année-là. Mon conjoint était là au cas où que j’accouche, et j’avais aussi une collègue en back up pour plaider à ma place.

En congé de maternité, avec un bébé de six mois, j’ai fait mon Barreau en quatre mois à monter à tous les jours de Trois-Rivières à Québec.

Vous vous en êtes sortie?

Le gros sprint final, ça a super bien été. J’avais un stage prévu au DPCP, alors je suis revenue avec l’équipe de travail avec laquelle je suis habituée. Ça a été un très beau stage.

Je vais être assermentée le 2 octobre prochain. Je suis dans les derniers miles!

Savez-vous où vous allez pratiquer?

Le contexte de la COVID-19 ne favorise pas vraiment le début de ma carrière. Les opportunités d’emplois ne sont pas vraiment nombreuses. J’ai toujours voulu partir mon cabinet, mais ce n’est jamais l’avenue la plus facile! J’ai toujours eu une fibre entrepreneuriale.

Là, je vais pratiquer avec deux autres avocats d'expérience, alors il va y avoir un transfert de connaissances.

Est-ce que vous lancez un cabinet avec eux?

On n’est pas associés, je suis vraiment à mon compte. On loue un bureau et on partage les dépenses. On n’a pas de nom officiel, mais j’imagine qu’on va répondre : Richard Melançon Plourde au téléphone!

Comment vous les avez rencontrés, ces avocats?

Quand j'ai débuté ma carrière en droit, j’ai été impliquée bénévolement au sein du Jeune Barreau de la Mauricie même si je n’étais pas avocate. Il n’y a pas beaucoup de jeunes avocats en Mauricie.

J’ai été appelée à organiser beaucoup d’événements, et j’ai été à même de connaître les avocats de la Mauricie. Mario Melançon, je l’ai rencontré dans ces événements-là, et l’autre avocat en acceptant d'aller pratiquer dans leur bureau.

Diriez-vous qu’il faut s’impliquer pour développer une carrière quand on est un jeune avocat?

Moi, c'est ce que je pense. Il faut être connu, c’est le bouche à oreille qui fait son chemin et qui fait en sorte qu’on développe une clientèle.

Mais j’ai 20 ans derrière moi en droit, les gens savent ce que j'ai fait. Ce n’est pas comme si j’avais 23 ans et que je sortais de l’université.

Je ne me suis pas impliquée non plus dans le but de monter ma carrière d’avocate. Je fais du bénévolat depuis que jai 19 ans. Je n’avais même pas le projet de faire mon bac en droit à l’époque. C’est vraiment parce que j'ai toujours eu la fibre du bénévolat, de donner au suivant, aux autres organismes.

Vous offrirez aussi des services juridiques à la Coop Santé de Sainte-Gertrude, où vous avez siégé sur le CA.

Je vais faire du développement de clientèle de ce côté-là. D’un côté, il y a un besoin dans cette région-là. Il n’y a pas d’avocat à Bécancour, Ste-Angèle, Ste-Gertrude, Daveluyville, etc.

La Coop a été créée là-bas parce qu’il n’y a pas de services de santé de proximité. C’est la même réalité pour les avocats.

Je vais donc offrir des services juridiques aux gens qui n’ont peut-être pas les moyens de transport pour aller à Trois-Rivières. En étant membre de la Coop, les gens ont des avantages grâce à une cotisation annuelle, comme des rabais sur les centres d'entraînement.

Moi, je vais offrir une consultation gratuite par membre par année, et si on me donne le mandat de faire les démarches judiciaires, il y a 20% de rabais offert sur mon taux horaire.

C’est un avantage qui leur permet de rester membre de la Coop. C’est un peu donnant-donnant, et ça répond à un besoin.

Vous n’auriez pas pu travailler au DPCP?

Il n’y a pas d’ouverture! À moins qu’il n’y ait des nominations à la magistrature ou des départs à la retraite, il n’y a aucun poste ouvert.

Mais j’ai quand même passé 11 ans en droit civil chez Joli-Coeur Lacasse. C’est quelque chose que j'aime, le droit civil, le droit de la famille, le droit des enfants, moi qui en ai quand même quatre. J’ai besoin d’aider, de veiller à leurs intérêts. C’est le droit de la jeunesse qui vraiment m'intéresse.

J’aimerais aussi développer un côté d’accompagner les gens dans leur dossier aux petites créances, de préparer leur dossier, trouver la jurisprudence, pour qu’ils se sentent en confiance avant d'aller devant les tribunaux.

J’ai toujours voulu aider, faire valoir leurs droits peu importe la situation. Je veux représenter la clientèle vulnérable, et je vais accepter les mandats de l’aide juridique.

Le droit du travail, aussi, j'en ai fait quand j'étais chez Joli-Coeur Lacasse.

Alors, même après le DPCP, pas de droit criminel pour vous?

Je vais vous avouer que j’ai de la difficulté à me concentrer sur un seul droit. Je les aime tous!

Je vais être pas mal généraliste pour débuter ma carrière. Bien des avocats le disent : c’est la carrière qui nous spécialise. J’en profite un peu pour exploiter tout ça et pour mieux me positionner sur ce que je veux spécialiser.
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2 commentaires

  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 3 ans
    Bravo Mélissa!
    Merci pour ce beau partage et bonne chance!

  2. Parajuriste et heureux de l'être
    Parajuriste et heureux de l'être
    il y a 3 ans
    Idée pour prochaine chronique
    Bonjour,

    Mes félicitations à Mme. Plourde. Honorable de réaliser un rêve et quel courage, bravo!

    Il serait intéressant d'aussi proposer des chroniques/articles mettant de l'avant un/une parajuriste qui est content de l'être et qui ne rêve pas d'être avocat. On demande et on assume souvent des parajuristes que ce sont des avocats qui ne le sont pas devenu ... je doute qu'on demande cela constamment aux infirmières/infirmiers. Être parajuriste est une discipline et une profession à part entière, pourtant le narratif dans l'espace public est souvent raconté dans l'optique que cette personn aurait dû, pourrait, devrait ou voulait être avocat. Je vous assure, ce n'est pas le cas de tout le monde!

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