Andréanne Morin a appris à ramer dans la douleur.

Au bout du fil, la voix joyeuse de cette avironneuse olympique qui prépare une carrière en droit ne laisse pourtant rien paraître des souffrances de l’entraînement.

Portrait d’une athlète qui se rend jusqu’à la ligne d’arrivée, coûte que coûte.

À l’approche des Jeux Olympiques de Pékin, Andréanne Morin s’apprêtait à prendre sa retraite avec une médaille en poche pour se concentrer sur sa carrière de juriste; elle qui vient de terminer sa deuxième année de droit à l'université de Montréal.

Aux JO 2008. Andréanne est la 2ème en partant de la droite
Aux JO 2008. Andréanne est la 2ème en partant de la droite
Les quelques centièmes de secondes qui ont fait rater le podium à son équipage l’ont poussé à revoir son plan de carrière.

« Je n’ai pas annoncé ma retraite tout de suite après Pékin, même si j’avais décidé de me dédier corps et âme au droit. Au cours de mes études à l’université de Montréal, j’ai vite compris que j’avais encore la passion de mon sport. Je me suis entraînée très fort pendant toute l’année scolaire.»

Au troisième coup, on gagne?

À bientôt 29 ans, et à son troisième cycle olympique, elle est à l’âge où la plupart des avironneuses connaissent leurs meilleurs moments.

Elle se concentrera donc sur l’aviron jusqu’aux Jeux de Londres, en 2012.

Au Henley 2010. Andréanne est la 4ème en partant de la droite
Au Henley 2010. Andréanne est la 4ème en partant de la droite
« Dès mon retour, j’ai eu de bons résultats en sélection. Nous avons une très bonne formation en huit de pointe. Nous venons de remporter le Henley et nous avons gagné l’argent à la Coupe du monde à Lucerne. C’est le moment de prendre une pause dans les études et de m’entraîner en vue des Jeux de Londres. J’irai en huit ou en deux de pointe, ça reste une possibilité. »

Pas question de s’accrocher, cependant.

Londres sera sa dernière occasion de décrocher une médaille olympique.

« Il n’y aura pas de 4e cycle olympique. À un moment donné, il faut passer à autre chose : la famille, la carrière, les enfants. C’est impossible d’être à la fois athlète olympique et avocate. »

L’aviron, un sport d’endurance

Au contraire d’un Usain Bolt, qui célèbre sa victoire au 100 m en dansant, les avironneurs semblent souffrir atrocement lorsqu’ils terminent une course.

Quelle est cette sensation et d’où vient-elle?

« À la fin d’une course, nous manquons d’oxygène dans les muscles. Nous avons l’impression qu’ils vont éclater. Moi, j’ai aussi un mal de tête immédiat. Après la course, nous sommes trop épuisés pour célébrer. C’est une sensation que nous recherchons, même si elle n’est pas agréable : cela veut dire que nous avons repoussé nos limites. »

L’aviron demande aussi beaucoup de synchronisme et une technique sans faille.

« À la ligne de départ aux Jeux Olympiques, toutes les équipes ont la même capacité physique. À ce niveau, c’est l’aspect technique et surtout l’aspect mental qui fait la différence au cours de l’épreuve. C’est extrêmement important d’être synchronisé », dit Andréanne Morin.

Andréanne l’athlète, Andréanne l’avocate

Le jour de l’entrevue avec Droit-Inc, Andréanne Morin a eu trois séances d’entraînement.

Au total, elle a parcouru 36 kilomètres en aviron et 8 kilomètres à pied, en plus d’une session de poids.

C’est pour elle une journée ordinaire qu’elle vit trois fois par semaine.

Ce régime spartiate est incompatible avec une carrière d’avocate.

Pourtant, Andréanne Morin croit que l’avocate et l’athlète se dissocient difficilement.

« Je veux rester dans le milieu sportif dans ma pratique, dit-elle. J’ai développé une expertise dans le sport de haut niveau. J’aimerais donc faire de l’arbitrage, travailler pour une organisation sportive ou travailler sur les questions de dopage. »

Outre la passion de l’entraînement, Andréanne Morin croit que l’aviron lui transmettra une capacité de répondre à des attentes élevées.

« Je suis habituée à mettre la barre haute et à me rendre à la ligne d’arrivée », dit-elle.

Comme tous les jeunes avocats, elle devra ramer pour réussir à se tailler une place. Cela ne devrait pas lui poser problème.