Miriam Ikhlef. Source: LinkedIn
Miriam Ikhlef. Source: LinkedIn
Miriam Ikhlef, une jeune Québécoise d’origine algérienne a été congédiée du Service de police de la Ville de Montréal durant l’été 2021. Jusqu’à aujourd’hui, la jeune femme ne connaît toujours pas les raisons de son renvoi.

L'affaire a fait grand bruit dans la presse généraliste. Le Devoir a notamment mis en lumière « le combat difficile et sans réponses » de Miriam Ikhlef tandis que le chroniqueur Yves Boisvert de la Presse se demande comment une personne peut se défendre quand elle ne sait pas de quoi elle est accusée…

Tout commence en avril 2020. Celle qui est diplômée d’un baccalauréat en sécurité publique et en études policières de l’Université de Montréal est embauchée par le SPVM à titre de préposée aux communications d’urgence.

La jeune femme dépose ensuite sa candidature en janvier 2021 dans le cadre du Programme de policiers conventionnels. Ce programme vise à faciliter le recrutement de personnes d’origine autochtone ou issues de minorités visibles, au sein de la police.

Son avocate, Me Marzia Frascadore, explique que Miriam Ikhlef a passé toutes les étapes de recrutement sans problème… jusqu'au moment d’arriver à l’étape de l’accréditation sécuritaire « à son grand étonnement, on lui explique qu’elle ne peut pas être policière et elle est aussitôt congédiée ».

Et pourtant, la jeune femme avait vu son accréditation sécuritaire acceptée lorsqu’elle avait été embauchée à titre de préposée aux communications d’urgence.

Miriam Ikhlef, qui n’a aucun antécédent judiciaire, dépose alors un grief et se présente devant la Cour supérieure afin d’obtenir une réintégration à son poste au SPVM.

Une décision « nébuleuse » et « surréaliste »

Dans un jugement rendu le 29 décembre dernier, le juge Michel Pinsonnault qualifie les circonstances justifiant le renvoi par le SPVM comme étant « fort nébuleuses ».

Et pour cause, le tribunal reconnaît que « la demanderesse ignore toujours les raisons exactes ayant provoqué le retrait immédiat de son accréditation sécuritaire ».

Mes Julien Delisle, Marie Cossette et Megda Belkacemi. Source: Norton Rose Fulbright
Mes Julien Delisle, Marie Cossette et Megda Belkacemi. Source: Norton Rose Fulbright
Le SPVM est représenté, avec la Ville de Montréal, par Mes Julien Delisle, Marie Cossette et Megda Belkacemi du cabinet Norton Rose Fulbright.

Pour Miriam Ikhlef, le fait d’avoir été congédiée pour la « sécurité nationale », lui fait croire que c’est son lien familial avec Mourad Ikhlef qui est en cause.

En effet, la jeune femme est la nièce d’un immigrant algérien qui fut expulsé du Canada en 2002 pour des suspicions d’activités terroristes. Néanmoins, celle-ci assure n’avoir aucun contact avec son oncle.

Questionnée sur un probable lien entre le renvoi de la jeune femme et l’expulsion de son oncle du territoire canadien, Me Marzia Frascadore rétorque « qu’au Québec, on n’est pas coupable par association ».

Finalement, si le juge Michel Pinsonnault a exprimé sa sympathie à l’endroit de la demanderesse en raison « des circonstances pour le moins surréalistes » entourant la fin de son emploi au SPVM, celui-ci constate dans son jugement que les avocats des défendeurs ont raison sur un point: La Cour supérieure n’a pas compétence à traiter de ce dossier.

Le Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montréal ayant déjà déposé en juillet 2021, au nom de Miriam Ikhlef, un grief visant à atteindre les mêmes objectifs que ceux inscrits dans cette poursuite, la jeune femme ne peut légalement saisir la Cour supérieure pour les mêmes motifs.

Miriam Ikhlef va donc devoir régler cette affaire devant un arbitrage géré par le syndicat, au mois d’octobre prochain.

Me Marzia Frascadore déplore, quant à elle, que les avocats du SPVM et de la ville de Montréal refusent catégoriquement de communiquer les motifs de son renvoi « Il y a une indifférence totale et c’est inacceptable ».

Contacté par Droit-inc, le SPVM s’est exprimé par le biais de l’une de ses avocates, Me Marie Cossette « En raison de la nature confidentielle des dossiers des employés et ex-employés, et par respect du processus judiciaire en cours, nous ne ferons aucun autre commentaire d’ici à ce que les instances appropriées se soient prononcées sur le fond du litige ».