Air Transat aurait profité de la grève d'Air Canada

Thomas Vernier
2025-08-26 13:15:37
Une action collective réclame des millions pour « prix abusifs et excessifs » que la compagnie aurait facturés aux passagers en détresse. Les avocats?

Une action collective allègue qu'Air Transat a exploité de manière « honteuse » la grève d'Air Canada en août 2025, facturant des prix « gonflés, excessifs et abusifs » aux passagers coincés, selon une poursuite que les demandeurs ont déposée à la Cour supérieure du Québec le 21 août.
Les cabinets LPC Avocats et Renno Vathilakis Inc. ont déposé cette requête, alléguant qu'Air Transat a « traité le conflit de travail d'Air Canada comme sa piñata personnelle » en augmentant ses tarifs à la minute pour « presser le maximum d'argent » des voyageurs vulnérables.
Les avocats Joey Zukran (LPC Avocats) et Michael Vathilakis (Renno Vathilakis Inc.) présenteront la demande d'autorisation devant la Cour supérieure du Québec à une date que le tribunal fixera. Air Transat n'a pas encore répondu publiquement à ces allégations.
L'affaire emblématique concerne Carol, qui aurait payé 5 355,52$ pour deux billets aller simple de Barcelone à Montréal le 16 août 2025 – soit près du double du prix de ses billets aller-retour initiaux Montréal-Rome-Barcelone-Montréal (2 784,62$) qu'elle avait achetés avec Air Canada.
« Cinq fois plus cher » qu'Air Canada pour un service inférieur
Les demandeurs dénoncent une disproportion « grotesque » entre les prix que la compagnie aurait facturés et le service offert. Selon la demande, Air Transat aurait chargé « 5 fois plus » qu'Air Canada pour des billets économiques, alors que ses avions « n'ont même pas le wi-fi et sont beaucoup moins confortables ».
« Aucune personne raisonnable n'aurait payé ce montant pour voyager avec Air Transat », affirme la requête. « La seule raison pour laquelle Air Transat a pu gonfler ses prix est que la demanderesse et les membres du groupe se trouvaient coincés à cause du conflit de travail d'Air Canada. »
Les demandeurs soutiennent que ces pratiques violeraient l'article 8 de la Loi sur la protection du consommateur ainsi que les articles 7 et 1437 du Code civil du Québec concernant la bonne foi et les clauses abusives.
Une exploitation systémique dénoncée
L'action collective vise « toutes les personnes dans le monde qui ont réservé un vol avec Air Transat depuis le 14 août 2025 et qui ont payé un prix gonflé ou excessif par rapport aux prix historiquement chargés par Air Transat pour des itinéraires similaires ».
Les demandeurs estiment conservativement le nombre de membres du groupe « dans les dizaines de milliers », tous dispersés à travers le Canada et le monde.
Selon la demande, Air Transat aurait mis en place « une politique d'augmentation de prix pendant la crise » qui était « de mauvaise foi » et qui a touché tous les membres du groupe. Les coûts opérationnels de la compagnie n'avaient pas augmenté pendant la grève d'Air Canada pour justifier « une augmentation aussi grotesque des prix des billets d'avion dans tous leurs systèmes ».
Des dommages multiples réclamés
Les demandeurs sollicitent :
- Une réduction du prix payé selon l'article 272 de la Loi sur la protection du consommateur
- Des dommages-intérêts punitifs pour une conduite qu'ils qualifient d'« intentionnelle, hautaine, cupide et de mauvaise foi »
- Le remboursement des frais de bagages « bruts et exorbitants » que la compagnie aurait facturés en plus des tarifs abusifs
La requête fait référence à d'autres cas similaires, notamment des vols depuis d'autres villes européennes vers le Canada coûtant plus de 3 000$ le billet avec Air Transat, et cite un précédent de la Cour supérieure du Québec dans l'affaire Dumlao c. Fido Solutions inc. (2024 QCCS 558).
Un contexte de vulnérabilité exploité
Le cas de la demanderesse illustre la détresse des passagers : elle et son mari n'avaient plus suffisamment de médicaments pour prolonger leur séjour de six jours supplémentaires comme le proposait Air Canada suite aux annulations.
« Air Transat était très bien au courant » de cette situation et « a choisi de gonfler les prix et d'en tirer profit », allèguent les demandeurs dans les documents judiciaires.
La demande souligne qu'Air Transat « augmentait ses prix à la minute » pour maximiser ses profits pendant la crise, tout en sachant que les passagers « n'avaient aucun autre choix » pour rentrer chez eux.
Cette action collective survient dans la foulée de la grève des agents de bord d'Air Canada qui avait paralysé le transport aérien canadien à la mi-août 2025. Elle soulève la question de l'éthique commerciale des compagnies concurrentes en période de crise.