Client floué par un ex-courtier : La TD ira-t-elle en appel?

La porte-parole de la maison de courtage affiliée à la Banque Toronto Dominion, Annick Laberge, a indiqué à Rue Frontenac vendredi que la TD évalue le jugement de la Cour supérieure et la possibilité de le porter en appel.

«Nous étudions le dossier et aucune décision n’a encore été prise», a-t-elle dit.

La TD est condamnée solidairement avec son ex-courtier Stéphane Rail. L’institution financière n’a d’ailleurs pas nié son statut et sa responsabilité de commentant lors du procès, même si les gestes qui ont mené à sa condamnation sont du fait de son ex-employé Rail.

Projet trop risqué pour la TD

M. Cloutier a déposé sa poursuite contre Stéphane Rail et la TD en 2002, après avoir perdu les 3 M$ qu’il avait confiés au courtier avec lequel il était en relation depuis 10 ans.

C’est M. Rail qui a sollicité M. Cloutier, en 2000, afin que ce dernier prête les 3 M$ à l’homme d’affaires Luc Verville pour un projet de transport aérien qui n’a jamais décollé.

Ce que M. Cloutier ne savait pas, c’est que la TD avait refusé au préalable un prêt similaire à M. Verville, partenaire d’affaires et aussi client de M. Rail, parce que l’institution financière le jugeait trop risqué.

«M. Rail n'a pas agi avec prudence en sollicitant M. Cloutier. Il n'a pas été honnête à son égard en lui cachant la raison pour laquelle TD avait refusé ce financement…», tranche le juge Bernard Godbout.

«Peu importe les connaissances et l'expérience de M. Cloutier en matière de placements et de valeurs mobilières, M. Rail profite de la confiance que M. Cloutier éprouve à son sujet pour ne pas lui dire toute la vérité à l'occasion du prêt de 3 M$ et ainsi contrevenir à ses obligations de prudence et de loyauté à son égard», ajoute le magistrat.



Faux documents

Qui plus est, le courtier a tenté de fourvoyer le tribunal en produisant de faux documents pour se disculper, dont un portant la fausse signature de M. Cloutier et dégageant M. Rail de toute responsabilité au sujet du prêt de 3 M$, ainsi que des documents de 1995 et 1998 signés par un comptable mort en 1994 !

«… M. Rail n'est pas crédible!» écrit le juge Godbout. «Son témoignage ne peut être retenu étant donné que la preuve non contredite démontre de façon prépondérante qu'il a fabriqué de faux documents…, qu’il a menti à son employeur le 22 juin 2000… et qu'il n'a pas dit la vérité lors de son témoignage à l'audience le 5 mai 2009 au sujet du décès de M. Bouchard et des signatures de celui-ci...»

La TD a exigé le départ de Stéphane Rail le 26 avril 2001 après avoir mené une enquête interne au sujet de sa relation avec son client Cloutier. L’institution financière lui a donné le choix de démissionner ou d’être congédié et s’est prêtée de bonne grâce à une opération visant à occulter publiquement les raisons de ce départ.

«Cette manœuvre de "camouflage" de la part de TD, une institution bancaire (souligné du juge), quoique déplorable, n'a aucun lien avec les actes illicites commis par M. Rail...», précise cependant le juge Godbout.

Après son départ de Valeurs mobilières TD, M. Rail s'est retrouvé chez Canaccord Capital, où il travaille toujours à titre de courtier, aux dernières nouvelles.

Les avocats au dossier

Me Serge Létourneau
Me Antoine Motulsky
Létourneau Gagné (casier 158)
Procureurs des demandeurs

Me William Noonan
Me David Lacoursière
Hickson Noonan (casier 2)
Procureurs du défendeur, monsieur Stéphane Rail

Me William Atkinson
Me Frédéric Pérodeau
Me Gene Kruger
McCarthy Tétrault
Procureurs de la défenderesse, Valeurs mobilières TD inc.

Cet article a été publié sur Ruefrontenac.com. Il est reproduit ici avec l'autorisation de l'auteur.