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D’Avocats sans frontières à Juripop

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Élisabeth Fleury

2025-08-07 14:15:41

Une avocate passe de la coopération internationale au communautaire avec le même objectif: améliorer l’accès à la justice.


Élyse Desjardins


Me Élyse Desjardins a oeuvré pendant 15 ans dans le domaine de la coopération internationale, dont une douzaine chez Avocats sans Frontières.

Elle a notamment passé près de deux ans en Colombie, où elle a travaillé avec des avocates et des avocats sur des cas de violations graves de droits humains pendant le conflit armé.

Celle qui a fait son stage du Barreau au Comité international de la Croix-Rouge, à Genève, a par la suite été plongée dans les activités d’Avocats sans frontières au Mali, principalement dans le contexte du conflit armé et des violences massives qui ont eu lieu à partir de 2012.

Dans l’organisation, elle a occupé des postes de conseillère juridique, puis de gestionnaire de programmes, un rôle qui lui a permis d’avoir une vision globale sur les actions de l’organisme en Afrique de l’Ouest, en Amérique latine et en Haïti.

En avril dernier, Élyse Desjardins a rejoint Juripop à titre de directrice des services juridiques. Une suite logique pour celle qui a toujours vu le droit comme un outil de changement social.

Comment son expérience en coopération internationale peut-elle être un atout pour Juripop? Quels sont les principaux défis et enjeux qui l’attendent au sein de cette organisation? Entretien.

Qu’est-ce que votre expérience chez Avocats sans frontières vous a apporté?

Ça m’a profondément marquée comme humaine, comme professionnelle. C’est fondamental dans mon parcours. J’ai appris beaucoup des défenseurs et des défenseuses des droits humains avec lesquels j’ai collaboré dans différents pays, avec ces avocates et ces avocats qui risquent leur vie pour faire leur travail. C’est sûr que c’est une inspiration.

Vous êtes chez Juripop depuis avril, quel est votre mandat exactement?

Mon rôle, c’est de m’assurer du bon déroulement de nos services juridiques à la population qui sont fournis par nos avocats et nos spécialistes cliniques, et de m’assurer qu’ils sont alignés avec la planification stratégique 2024-2027 de l’organisation.

Pourquoi avoir choisi Juripop? Quel parallèle faites-vous entre les deux organisations?

Depuis le début, même avant Avocats sans frontières, la raison pour laquelle je suis allée en droit, ça a toujours été dans l’idée de faire quelque chose d’utile. Je voyais le droit comme un outil de changement social, un outil pour la population qui n’a pas accès à un avocat, aux tribunaux. Et je voyais le droit avec des valeurs féministes, qui étaient très fortes chez moi.

Quand j’étais chez Avocats sans frontières, je me disais qu’il y avait aussi beaucoup de choses qui se passaient au Québec en parallèle, comme le mouvement #MoiAussi. On mettait des choses en place chez Avocats sans frontières en termes de mécanismes d’accès à la justice, de façons de rejoindre les gens dans leur communauté, de les mettre en contact avec le monde juridique et judiciaire. J’ai senti que c’était un bon moment pour moi de transférer ces apprentissages-là au Québec. Et j’avais envie aussi de me reconnecter avec le monde juridique au Québec. Quand le poste s’est ouvert chez Juripop, une organisation que je connaissais, ça a donc été assez naturel pour moi.

Comment avez-vous reçu le jugement dans l’affaire Hockey Canada?

Ce n’est pas un jugement qui est nécessairement facile à lire quand on fait le travail qu’on fait, pour les raisons pour lesquelles on le fait, et ça ne va pas nécessairement dans le sens qu’on espérait. Mais en même temps, c’est un seul dossier, il y en a bien d’autres. Et moi, ça me donne aussi envie de me relever les manches et de me dire: ok, qu’est-ce qu’on fait? Les personnes victimes et survivantes continuent d’avoir besoin de justice. Et la justice, ce n’est pas seulement le système judiciaire: il y a aussi un travail d'éducation et de sensibilisation à faire.

Quels sont les défis qui vous occupent chez Juripop?

Près de huit ans après le début du mouvement #MoiAussi, il y a eu de grandes avancées au Québec, mais il y a encore énormément à faire — l’actualité nous le rappelle chaque jour — pour l’accès à la justice, pour les personnes victimes de violence conjugale ou de violence sexuelle. Il faut voir comment on peut poursuivre ce travail-là dans un contexte qui a quand même évolué, comment on se positionne. C’est une grande réflexion qui est en cours dans l’organisation.

Et comme on est toujours très connecté à l’actualité et aux grandes crises sociales, il y a aussi toute la question du droit au logement qui est un enjeu pour Juripop. On travaille de très près avec les comités logements pour développer de nouveaux services. Je ne peux pas en dire plus parce qu’il va y avoir des annonces très prochainement, mais disons qu’on travaille de près sur cette question.

Parmi les autres défis qui m’occupent, il y a le développement de partenariats avec des organismes qui travaillent en première ligne avec des populations en situation de vulnérabilité. Il faut s’assurer, comme organisation de deuxième ligne, que nos services les rejoignent, qu’ils sont adaptés.

Avez-vous l’impression que le gouvernement en fait assez pour des organismes comme Juripop?

Depuis mon arrivée, j’entends le téléphone sonner tout le temps. Ce sont des dizaines d’appels qu’on reçoit chaque semaine dans différentes matières de droit et auxquels on doit souvent dire non. Les besoins sont très très grands.

Il y a de grands pas qui ont été faits au Québec en termes d’accès à la justice, beaucoup autour de l’information juridique, des conseils juridiques, mais les gens ont quand même besoin d’être représentés par des avocates et des avocats. Et ça, ce sont des services qui sont difficiles à faire financer parce que c’est plus coûteux, plus long. Nous, la population qu’on dessert, c’est la population qui n’est pas admissible à l’aide juridique et qui n’a pas les moyens de se payer les services d’un avocat. Et cette classe-là, c’est beaucoup de gens.

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