Nouvelles

Le juge Galiatsatos désavoué en Cour d’appel

Main image

Radio Canada

2025-06-09 10:15:21

Un juge de la Cour du Québec a été désavoué par la Cour d'appel. Voici pourquoi…

Dennis Galiatsatos - source : Radio Canada


Le juge Dennis Galiatsatos n'avait pas la compétence pour déclarer « inopérant » l'article 10 de la Charte de la langue française (aussi appelée « loi 101 ») en ce qui a trait à la traduction obligatoire de certains jugements de l'anglais vers le français, conclut la Cour d'appel du Québec.

Le tribunal a rendu sa décision sur le banc mardi dernier. Le jugement écrit n'a pas encore été publié, mais Radio-Canada, qui n'était pas présente à l'audience, a pu prendre connaissance des conclusions de la Cour grâce aux bandes audio conservées au greffe de Montréal.

Les magistrats qui ont entendu l'appel du Procureur général du Québec – Yves-Marie Morissette, Patrick Healy et Lori Renée Weitzman – ont accueilli l'argument central de la requête, selon lequel le juge Galiatsatos, de la Cour du Québec, « n'avait pas la compétence pour prononcer le jugement qu'il a prononcé ».

Les motifs de leur décision seront « abondants », si bien que la version écrite de leur jugement ne sera pas produite avant « plusieurs semaines », ont-ils ajouté.

L'affaire a été tranchée au terme d'une audience qui n'aura duré que quelques heures, les parties impliquées ayant été invitées l'été dernier à fournir leurs arguments par écrit à la Cour d'appel.

Cette affaire concerne le nouvel article 10 de la Charte de la langue française qui, depuis le 1er juin 2024, exige qu’« une version française » (soit) jointe immédiatement et sans délai à tout jugement rendu par écrit en anglais par un tribunal judiciaire lorsqu’il met fin à une instance ou présente un intérêt pour le public.

Deux semaines avant son entrée en vigueur, le 17 mai, le juge Galiatsatos avait, dans le cadre d’une affaire pour conduite avec les facultés affaiblies et pour négligence ayant causé la mort, déterminé que cette mesure était « inopérante » en droit criminel.

Le magistrat avait notamment justifié sa décision par le fait que les délais de traduction inhérents au respect de cette nouvelle disposition auraient pu donner des arguments à l'accusée, Christine Pryde, pour obtenir un arrêt des procédures en vertu de l'arrêt Jordan de la Cour suprême.

Il avait aussi souligné que le droit criminel est de compétence fédérale.

Le Procureur général du Québec avait aussitôt porté cette décision en appel. Sa demande de sursis avait été rejetée, mais l'affaire devait toujours être tranchée sur le fond.

Mise en œuvre compliquée

L'application de l'article 10 de la Charte de la langue française, qui s'est malgré tout amorcée comme prévu le 1er juin 2024, avance cahin-caha depuis lors.

Malgré le fait que cette mesure ait été adoptée deux ans plus tôt, le milieu juridique avait semblé pris de court au moment de son entrée en vigueur, si bien que les premières traductions s’étaient fait attendre. Et des irrégularités – pour reprendre l'expression du ministre Jolin-Barrette – persistent encore aujourd'hui.

Des recherches effectuées par Radio-Canada, dont les résultats ont été diffusés la semaine dernière, ont permis de recenser une cinquantaine de jugements écrits de fin d'instance qui, au cours de la dernière année, ont été rendus en anglais d'abord, sans traduction française.

Aucun des magistrats à l'origine de ces décisions n'a cité le juge Galiatsatos. Le Parti québécois (PQ), cela étant, s'est permis une mise en garde le jour de la publication de nos recherches, invitant la magistrature à ne pas tomber dans le « militantisme judiciaire ».

Joint par Radio-Canada, le cabinet du procureur général du Québec et ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, s'est réjoui d'avoir remporté une « victoire importante » en Cour d'appel, limitant ses commentaires en raison du fait que la disposition contestée « fait toujours l’objet de recours devant les tribunaux ».

« Soyez assurés que nous continuerons de défendre fermement notre position, a-t-il néanmoins ajouté, plaidant que la justice [doit] être accessible en français au Québec ».

À l'inverse, le jugement rendu par la Cour d'appel la semaine dernière constitue en quelque sorte une rebuffade pour le juge Galiatsatos, qui avait récidivé dans une autre cause, en décembre dernier.

« Suivant la décision que j’ai rendue (le 17 mai 2024), les présents motifs sont rédigés en anglais seulement, étant donné qu’il s’agit de la langue du procès », avait-il écrit en bas de page, spécifiant que « la traduction en français (serait) ordonnée dès que le jugement (serait) versé au dossier de la Cour ».

Le magistrat avait en outre indiqué qu'il s'agissait de la pratique adoptée par « la plupart des juges de la chambre criminelle de la Cour supérieure du Québec, dans le district de Montréal », une observation que les tribunaux n'ont pas voulu commenter et que Radio-Canada n'a pas réussi à valider.

1270
1 commentaire
  1. Diane
    bravo
    Une belle victoire contre l'anglo-normativité et la suprématie anglophone.

Annuler
Remarque

Votre commentaire doit être approuvé par un modérateur avant d’être affiché.

NETiquette sur les commentaires

Les commentaires sont les bienvenus sur le site. Ils sont validés par la Rédaction avant d’être publiés et exclus s’ils présentent un caractère injurieux, raciste ou diffamatoire. Si malgré cette politique de modération, un commentaire publié sur le site vous dérange, prenez immédiatement contact par courriel (info@droit-inc.com) avec la Rédaction. Si votre demande apparait légitime, le commentaire sera retiré sur le champ. Vous pouvez également utiliser l’espace dédié aux commentaires pour publier, dans les mêmes conditions de validation, un droit de réponse.

Bien à vous,

La Rédaction de Droit-inc.com

PLUS

Articles similaires