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Retards dans la réfection du palais de justice de Rouyn-Noranda

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Radio-canada Et Cbc

2024-01-22 13:30:10

L’avocat Bernard Barrette, le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, et l’avocat Michel-Étienne Parayre.
Plusieurs intervenants de la communauté juridique critiquent les retards dans la réfection du palais de justice de Rouyn-Noranda…

La Société québécoise des infrastructures (SQI) ignore à quel moment sera terminée la réfection du palais de justice de Rouyn-Noranda. L’édifice devait pourtant être revampé de bout en bout d’ici 2027. Cette situation risque de déplaire à la communauté juridique, tandis que plusieurs intervenants alertent les autorités sur la dangerosité des lieux depuis une décennie en matière de sécurité.

« Compte tenu de tout ce qui est mentionné ci-dessus, nous croyons sincèrement que ce n’est qu’une question de temps avant que ne survienne un événement malheureux au palais de justice. Un tel événement viendra exposer davantage l’actuelle situation d’urgence ».

Ces mots auraient pu être écrits aujourd’hui, mais ils datent plutôt d’une mise en garde transmise en septembre 2015 au directeur des palais de justice de Rouyn-Noranda et de Ville-Marie ainsi qu'à la directrice régionale des services judiciaires de l'époque.

Le document d’une dizaine de pages, obtenu par Radio-Canada, a été préparé par le Comité pour la mise aux normes du palais de Justice de Rouyn-Noranda.

Ce comité était à l’époque composé de six pointures judiciaires, dont Marc Lemay, ancien Bâtonnier du Barreau de l’Abitibi-Témiscamingue, et Nancy McKenna, ancienne juge de la Cour du Québec en Abitibi-Témiscamingue–Eeyou Istchee–Nunavik. Il est encore à ce jour présidé par l’avocat Bernard Barrette.

Immobilisme et attentisme

Près de 10 ans plus tard, peu de choses ont changé à Rouyn-Noranda. Des travaux avaient été annoncés en 2021, mais la SQI, gestionnaire du projet, est aujourd’hui incapable d’en révéler les détails.

« Le projet d'agrandissement et de restauration du palais de justice de Rouyn-Noranda est toujours en planification. L'échéancier et la nature précise des travaux ne sont pas connus pour l'instant », indique l’organisation par courriel, sans expliquer cet apparent changement de cap.

Les signataires du document obtenu par Radio-Canada identifiaient 16 carences et lacunes à corriger de façon urgente. La situation est telle qu'ils pointent du doigt les autorités.

« La présente dénonciation de la situation d’urgence qui prévaut actuellement au palais de justice fait en sorte que votre direction, vos supérieurs, les ministères concernés et le gouvernement seront directement tenus responsables d’un drame ou d’une tragédie qui pourrait se produire au cours des prochains mois ou des prochaines années dû à l’immobilisme ou à l'attentisme d’agir rapidement dans ce dossier », mentionne un paragraphe de la mise en garde.

Le document brosse un historique des travaux apportés au palais de justice depuis sa fondation en 1954 et écorche au passage le manque de vision inhérent à ceux-ci.

« Force est de constater que les travaux réalisés antérieurement ont été exécutés pour répondre à des besoins ponctuels, sans vision à moyen ou à long terme de ce que pourraient représenter les besoins globaux qui sont nécessaires à notre époque pour une saine administration de la justice dans cet édifice », complète une autre section.

Rencontré à son bureau de Rouyn-Noranda, Me Bernard Barrette soutient lui-même avoir de la difficulté à obtenir des accusés de réception de la part du ministère de la Justice.

« Je n’ai pas été informé de l’état d’avancement des travaux concernant la rénovation et la mise aux normes du palais de justice de Rouyn-Noranda malgré mes relances par courriels. On ne demande pas de secrets d'État. On demande juste de savoir où en est le projet et quels sont les échéanciers prévus », précise-t-il.

Il ajoute: « Jusqu’à quel point ce dossier fait-il partie des priorités du ministère? La question se pose à Rouyn-Noranda pour la communauté juridique ».

Le dernier courriel reçu en mai 2023 lui expliquait seulement qu’un nouveau responsable était à la tête du projet. Il affirme ne pas avoir obtenu de réponses de la nouvelle responsable.

« C’est un palais de justice qui ne répond plus aux normes de sécurité. Rappelons-nous l’événement de Longueuil survenu ces dernières semaines. À Rouyn-Noranda, cela peut arriver encore plus facilement, car tout est ouvert », souligne Me Barrette.

Critiqué de toutes parts depuis l’attaque au couteau survenue au palais de justice de Longueuil, le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, rétorque que tous les palais de la province sont sécuritaires.

« Il est important de rassurer les citoyens et de répéter que nos palais de justice, pour l’ensemble du Québec, sont des lieux sécuritaires. Les constables spéciaux et les agents de sécurité sont sur le terrain dans les palais de justice au Québec pour s’assurer de la sécurité des lieux », soutient le cabinet du ministre Bonnardel par courriel.

Constables spéciaux recherchés

D’un avis contraire, le Barreau de l’Abitibi-Témiscamingue souhaite à court terme que plus de constables spéciaux guettent les palais de justice de la région.

La présence en sous-effectifs de ces professionnels chargés de sécuriser les édifices gouvernementaux soulève d’ailleurs bien des enjeux à Rouyn-Noranda, mais aussi à Val-d’Or, à Amos et à Ville-Marie.

« À la Cour supérieure, il n’y a pas de constables spéciaux attitrés d’emblée dans les salles de cour de la région. Quand il y a des auditions en matière familiale, où ça peut parfois brasser, il n’y a pas de constables spéciaux d’emblée dans la salle », signale Me Tremblay.

Le ministère de la Sécurité publique a entre-temps exprimé son intention de former 144 constables spéciaux de plus au Québec.

Des constables avant les détecteurs

Comme Me Tremblay, l’avocat Michel-Étienne Parayre voit les constables spéciaux comme une avenue intéressante, bien avant le recours aux détecteurs magnétiques.

« C’est le problème principal, croit-il. Ça peut être très variable d’une journée à l’autre, même s’ils sont présents la majorité du temps. »

Me Parayre évoque une situation qu’il a vécue, où un juge s'est tourné vers la Sûreté du Québec pour pallier l’absence de constables spéciaux dans sa salle de cour. « Il voulait que les policiers soient présents avant de rendre sa décision. Cela demeure quelque chose de quand même très rare. »

Défis logistiques

L’avocat Bernard Barrette estime qu’il est toujours possible d’entreprendre et de terminer dans les temps la réfection du palais de justice de Rouyn-Noranda, à condition de se lancer dès maintenant. « Il faut aller en appel d’offres cette année pour permettre le début des travaux en 2025 et une livraison en 2027 », détaille-t-il.

Me Barrette souhaite également que le comité qu’il préside puisse prendre part à la planification des travaux ainsi qu'aux réflexions et discussions liées au projet.

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