Une juge refuse d'entendre une femme portant le hijab
La Presse Canadienne
2015-02-27 13:00:00

À son arrivée à la barre, la juge Eliana Marengo lui aurait demandé pourquoi elle portait un "foulard" sur sa tête, ce qui aurait surpris Mme El-Alloul.
La séance fût alors ajournée pour une trentaine de minutes. Au terme de cette pause improvisée, la juge aurait pris la parole affirmant que les tribunaux sont des lieux où les symboles religieux n'ont pas leur place.
Pour appuyer ses propos, elle s'est réfèrée à l'article 13 des règles de pratique de la Cour du Québec. Selon cette règle, toute personne qui se présente en cour doit être "convenablement vêtue", souligne la juge, qui ajoute que Mme El-Alloul ne respecte pas cet article.
Le diffuseur public a mis la main sur l'enregistrement audio de l'audience, où la juge explique sa position à Mme El-Alloul.
« Selon moi, les tribunaux sont séculiers. Il n'y a pas de symboles religieux dans cette salle, ni sur les murs, ni sur les gens », peut-on entendre en anglais sur l'enregistrement sonore de la séance.
La juge a poursuivi en affirmant que sa décision serait identique si une personne portant une autre pièce de vêtement se présentait à elle.
« Je ne vous entendrai pas si vous portez ce foulard, tout comme je ne permettrais pas qu'on porte un chapeau ou des lunettes ou tout autre accessoire qui ne convient pas en cour », entend-t-on sur l'enregistrement obtenu par Radio-Canada.
Rania El-Alloul a refusé de retirer son foulard. La juge lui a alors offert un report de la cause, afin que Mme El-Alloul puisse consulter un avocat.
Le bureau de la juge en chef du Québec, Elizabeth Corte, a fait savoir à Radio-Canada qu'il n'existe pas de directives quant au port de symboles religieux au tribunal. La tenue qu'il est convenable de porter est laissée à la discrétion de chaque juge.
Me Stéphane Lacoste
il y a 10 ansIl m'apparait évident que l'honorable juge s'est trompée, au point de rendre un décision qu'on aurait qualifié de "manifestement déraisonnable" avant l'arrêt Dunsmuir. Sa décision est clairement contraire à la jurisprudence de la Cour suprême du Canada (voir http://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2012/2012csc72/2012csc72.html?searchUrlHash=AAAAAQAFbmlxYWIAAAAAAQ&resultIndex=1) par laquelle elle est liée. et à la Charte québécoise et à la Charte canadienne.
Je note en passant que ce n'est pas la Cour suprême du Canada qui a permis à une femme de prêter serment de citoyenneté avec un niqab mais bien la Cour fédérale, dont les décisions ne lient aucunement la Cour du Québec, et que la décision ne portait pas sur la Charte canadienne mais seulement sur l'interprétation d'une loi et d'un règlement (incidemment, je considère que cette décision est solide).
La Juge en chef Corte a tout à fait raison d'être prudente dans ses commentaires. Comme Juge en chef, elle n'a pas (heureusement) l'autorité d'imposer aux juges de sa Cour comment interpréter ou appliquer des lois ou des règlements. Un juge en chef a des responsabilités et des pouvoirs administratifs, de coordination et de "leadership" seulement. Chaque juge est responsable de ses propres décisions qui doivent être conformes à la constitution, aux chartes des droits et aux lois et à la jurisprudence. C'est aux tribunaux d'appel, ou de contrôle judiciaire selon le cas, qu'il revient de renverser une décision erronée.
Il est d'ailleurs "normal" ou commun que des juges se trompent, commettent des erreurs, dans l'interprétation du droit; c'est justement pour cela, ou à cause de cela, que nous avons des tribunaux d'appel et de contrôle judiciaire.
Je ne connais pas tous les détails de l'affaire, mais il ne me semble pas que ce soit non plus une affaire qui relève de la juridiction du Conseil de la magistrature -- sauf si la juge était de mauvaise foi -- mais je suis persuadé que ce n'est pas le cas (je ne la connais pas). Le Conseil de la magistrature n'a pas compétence pour réviser ou autrement se prononcer sur la justesse des décisions des juges sauf cas très exceptionnels.
Bref, l'honorable Juge s'est trompée et a rendue une décision manifestement erronée et déraisonnable qui sera certainement renversée en appel, s'il est ouvert et qu'il y en a un, ou par voie de contrôle judiciaire, si une demande est présentée.
Ceci étant dit, cette affaire illustre bien que la formation des juges doit être améliorée sur ces questions de droits fondamentaux et d'accommodements raisonnables.
Il me semble donc que des commentateurs s'égarent lorsqu'ils font reproche à la Juge en chef son attitude ou attaque la juge Marengo personnellement plutôt que d'attaquer sa décision.
Anonyme
il y a 10 ansUn juge qui ignore la Cour suprême et fait sa propre loi mérite un blâme .... au minimum.
Me Stéphane Lacoste
il y a 10 ansIl m'apparait évident que l'honorable juge s'est trompée, au point de rendre un décision qu'on aurait qualifié de "manifestement déraisonnable" avant l'arrêt Dunsmuir. Sa décision est clairement contraire à la jurisprudence de la Cour suprême du Canada (voir http://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2012/2012csc72/2012csc72.html?searchUrlHash=AAAAAQAFbmlxYWIAAAAAAQ&resultIndex=1) par laquelle elle est liée. et à la Charte québécoise et à la Charte canadienne.
Je note en passant que ce n'est pas la Cour suprême du Canada qui a permis à une femme de prêter serment de citoyenneté avec un niqab mais bien la Cour fédérale, dont les décisions ne lient aucunement la Cour du Québec, et que la décision ne portait pas sur la Charte canadienne mais seulement sur l'interprétation d'une loi et d'un règlement (incidemment, je considère que cette décision est solide).
La Juge en chef Corte a tout à fait raison d'être prudente dans ses commentaires. Comme Juge en chef, elle n'a pas (heureusement) l'autorité d'imposer aux juges de sa Cour comment interpréter ou appliquer des lois ou des règlements. Un juge en chef a des responsabilités et des pouvoirs administratifs, de coordination et de "leadership" seulement. Chaque juge est responsable de ses propres décisions qui doivent être conformes à la constitution, aux chartes des droits et aux lois et à la jurisprudence. C'est aux tribunaux d'appel, ou de contrôle judiciaire selon le cas, qu'il revient de renverser une décision erronée.
Il est d'ailleurs "normal" ou commun que des juges se trompent, commettent des erreurs, dans l'interprétation du droit; c'est justement pour cela, ou à cause de cela, que nous avons des tribunaux d'appel et de contrôle judiciaire.
Je ne connais pas tous les détails de l'affaire, mais il ne me semble pas que ce soit non plus une affaire qui relève de la juridiction du Conseil de la magistrature -- sauf si la juge était de mauvaise foi -- mais je suis persuadé que ce n'est pas le cas (je ne la connais pas). Le Conseil de la magistrature n'a pas compétence pour réviser ou autrement se prononcer sur la justesse des décisions des juges sauf cas très exceptionnels.
Bref, l'honorable Juge s'est trompée et a rendue une décision manifestement erronée et déraisonnable qui sera certainement renversée en appel, s'il est ouvert et qu'il y en a un, ou par voie de contrôle judiciaire, si une demande est présentée.
Ceci étant dit, cette affaire illustre bien que la formation des juges doit être améliorée sur ces questions de droits fondamentaux et d'accommodements raisonnables.
Il me semble donc que des commentateurs s'égarent lorsqu'ils font reproche à la Juge en chef son attitude ou attaque la juge Marengo personnellement plutôt que d'attaquer sa décision.
Mtre
il y a 10 ansI hope that a hijab wearing lawyer takes on her case - pro bono.
GBS
il y a 10 ansLes gens ici qui supportent la juge: assumez-vous que la juge aurait fait la même chose à une religieuse catholique?!
"Mère Blandine, vous allez m'enlever votre voile tussuite, sinon je vous entends pas! On a des règles ici au Québec, et vous allez m'enlever ce voile gris right now!
Et vous, le prêtre dans le fond, vous êtes mieux d'enlever votre col romain parce que sinon, c'est dewors!"
Hypocrisie à l'état pur. Le Québec continue de s'attaquer à sa cible préférée: les madames musulmanes qui portent le voile. Pathétique.
Anonyme
il y a 10 ansencore plus grave, avant de se prononcer comme elle l'a fait, la juge s'est retirée 30 minutes pour réfléchir... à quoi au juste ??
Anonyme
il y a 10 ansElle a réfléchie à «comment je vais justifier ma haine des musulmanes qui porte un voile sur la tête» sans passer pour une raciste.
GBS
il y a 10 ansElle s'est donnée 30 min. pour essayer de trouver une base légale pour discriminer cette madame.
Puisqu'elle n'avait rien trouvé après 30 min., elle a improvisé!
Parajuriste
il y a 10 ansUn juge n'est-il pas maître de sa salle de cour?
Casquette, chapeau, foulard, tuque... en voyez-vous dans les salles de cour?
Et en passant, le racisme n'est pas en cause ici. L'islam n'est pas une race. C'est une religion.