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Frais de remboursement anticipé : autre rejet d’une action collective au stade de l’autorisation

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Guy J. Pratte, Patrick Plante Et Amanda Afeich

2024-10-31 11:15:26

Guy J. Pratte, Patrick Plante et Amanda Afeich, les auteurs de cet article. Source: BLG
Guy J. Pratte, Patrick Plante et Amanda Afeich, les auteurs de cet article. Source: BLG
Focus sur une récente décision de la Cour supérieure du Québec en matière d’action collective…

Le 15 octobre 2024, la Cour supérieure du Québec, sous la plume de l’honorable juge Christian Immer, j.c.s., a rendu un jugement important en matière d’action collective (« Haroch 2 ») dans le cadre d’un litige bancaire institué contre la Banque Toronto-Dominion (« TD ») et d’autres banques.

Mise en contexte

Katy Haroch et Claude Vaillancourt (les « Demandeurs ») sollicitaient pour la deuxième fois l’autorisation d’intenter une action collective, contestant les clauses relatives aux frais de remboursement anticipé (« FRA ») exigés par les banques et la méthode de calcul du différentiel de taux d’intérêt (« DTI ») sur les prêts hypothécaires à taux fixe.

Une première demande d’autorisation d’exercer une action collective avait été rejetée par la juge Chantal Corriveau de la Cour supérieure le 19 juillet 2019 (« Jugement Corriveau », un rejet confirmé par la Cour d’appel le 4 octobre 2021 (« Haroch 1 QCCA »)). Dans cette nouvelle demande, les Demandeurs reprochaient à présent l’utilisation d’un escompte appliqué au taux affiché dans la méthode de calcul du DTI.

Sommaire du jugement

Le juge Immer, rappelant que le tribunal doit analyser le caractère soutenable du syllogisme juridique proposé par les Demandeurs, a rejeté la demande d’autorisation d’exercer une action collective, concluant que la cause d’action avancée était insoutenable en droit (art. 575(2) C.p.c.) et qu’elle ne présentait aucune question commune pour tous les membres du groupe proposé (art. 575(1) C.p.c.).

Les banques plaidaient que, malgré leurs prétentions, les Demandeurs dans Haroch 2 ne se limitaient pas au seul effet du « rabais » dans le calcul du DTI, mais s’attaquaient de nouveau à la formule du DTI dans son ensemble, sur la base qu’elle entraînerait systématiquement une surcompensation des banques par rapport à leur perte « réelle ».

Le juge Immer, après analyse du critère de l’article 575(2) C.p.c. et en appliquant la règle du stare decisis, estime que les jugements rendus précédemment énoncent l’état du droit quant à la validité de la méthode de calcul du DTI et rendent le syllogisme avancé en l’instance insoutenable. Le juge Immer conclut également que les Demandeurs ne sont pas en mesure de prouver que les méthodes de calcul des FRA selon le DTI les désavantagent, ni évidemment qu’elles le font de façon excessive ou déraisonnable.

Poursuivant son analyse, le juge Immer retient qu’un argument visant à démontrer le caractère abusif de la clause des FRA calculés sur la base du DTI mène nécessairement à l’atomisation du débat et qu’il n’y a donc pas de question commune à trancher pouvant satisfaire au critère de l’article 575(1) C.p.c.

Points à retenir

Ce jugement réaffirme le sérieux du principe de l’autorité de la chose jugée, énoncé à l’article 2848 C.c.Q., qui empêche de remettre en cause un jugement lorsque les questions ont déjà été tranchées, à condition que les trois identités (parties, objet et cause) soient réunies.

La Cour supérieure rappelle également l’importance du stare decisis, un principe certes moins exigeant que la chose jugée, mais qui permet néanmoins de déclarer une action irrecevable si le précédent invoqué porte sur l’ensemble du débat et apporte une solution complète, certaine et définitive.

Dans le cas présent, les Demandeurs ont tenté de remettre en cause une question déjà tranchée par la jurisprudence, notamment dans Haroch 1 QCCA, sans justification valable, rendant ainsi leur syllogisme insoutenable et leur action irrecevable.

À propos des auteurs

Guy J. Pratte est avocat-conseil chez BLG au sein des bureaux de Montréal, Ottawa et Toronto.

Patrick Plante se spécialise en litige commercial et agit dans le cadre de nombreux recours en matière de responsabilité civile et contractuelle chez BLG.

Amanda Afeich est avocate au bureau de Montréal de BLG. Elle pratique dans le groupe de Litige commercial. Elle est également membre du groupe de pratique des Appels et du Droit Public.

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