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Concours de Time: la Cour suprême juge en faveur d'un Québécois
La Presse Canadienne
2012-02-28 11:15:00
Les organisateurs de loteries publicitaires de type "sweepstake" devront y penser à deux fois avant d'écrire à quelqu'un qu'il a gagné le gros lot et est millionnaire.
Dans un jugement unanime rendu mardi, le plus haut tribunal du pays a jugé que les documents publicitaires envoyés à un consommateur québécois par le magazine Time donnaient l'impression générale qu'il avait remporté une importante somme d'argent, alors que ce n'était pas le cas.
Selon la Cour, les documents de Time ont été "conçus expressément dans le but de tromper".
Le consommateur n'est pas tenu de faire une lecture attentive et de décortiquer les documents: s'il conclut après une "lecture générale" qu'il a gagné un million $, il s'agit d'une publicité trompeuse, estime la Cour.
De plus, la Loi sur la protection du consommateur ne vise pas à protéger les consommateurs prudents et avertis, ont précisé les neuf juges.
"Les qualificatifs 'crédule et inexpérimenté' expriment donc la conception du 'consommateur moyen' qu'adopte la loi. Cette description du consommateur moyen respecte la volonté législative de protéger les personnes vulnérables contre les dangers de certaines méthodes publicitaires".
En 1999, un Lavallois, Jean-Marc Richard, a reçu une enveloppe envoyée par la revue Time, contenant plusieurs feuillets rédigés en anglais dont l'un est intitulé "avis officiel de sweepstake".
Après avoir lu les documents, M. Richard en a conclu qu'il avait gagné une somme de 833 337 $ US.
Il a alors rempli le coupon-réponse et s'est abonné à la revue Time, après avoir partagé la bonne nouvelle avec ses proches et ses collègues de travail.
Ne recevant pas son prix, M. Richard a contacté la revue et apprend qu'il ne recevra pas de chèque puisqu'il ne détenait pas le numéro gagnant.
Time lui explique alors que les documents ne constituaient qu'une "invitation" à participer au sweepstake et que, pour gagner, il devait avoir reçu l'"Entrée gagnante du Grand Prix" (ce qui n'était pas le cas) et l'avoir retournée à temps.
M. Richard intente alors une action en dommages contre le magazine. Il allègue des violations d'obligations contractuelles ainsi que des contraventions à la Loi québécoise sur la protection du consommateur.
La juge de première instance a rejeté la portion du recours fondée sur la responsabilité contractuelle. Elle estime que selon une lecture littérale du texte en litige, il était impossible de conclure qu'il s'agissait d'une offre ferme de payer 833 337 $US.
Elle a toutefois jugé que le texte contenait plusieurs fausses représentations au sens de la Loi sur la protection du consommateur et qu'il était rédigé dans le but de tromper le lecteur.
Elle a donc condamné le magazine à payer à M. Richard 1 000 $ à titre de dommages moraux _ pour l'humiliation subie auprès de ses collègues de travail _ et 100 000 $ à titre de dommages exemplaires.
La Cour d'appel n'était pas du même avis et avait renversé la décision. Selon elle, le consommateur moyen qui aurait lu le même texte aurait compris qu'il ne s'agissait que d'un "jeu à saveur publicitaire".
La Cour suprême a maintenu la condamnation pour le 1 000$, mais a réduit les dommages exemplaires à 15 000 $.
"Ce montant (...) sanctionne la conduite des intimés (le magazine) de façon assez sérieuse pour les inviter à abandonner les pratiques interdites qu'elles ont utilisées, si ce n'est pas déjà fait", écrit la Cour.
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