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Faut-il payer les stagiaires ?

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Amélia Salehabadi

2011-02-09 13:15:00

Amélia Salehabadi a troqué sa robe d'avocate pour celle de reporter, pour s'intéresser cette fois-ci à la rémunération des stagiaires des cabinets juridiques. Doivent-ils être payés ? Si oui, combien ?

La course aux stages pendant laquelle les cabinets rivalisent de courbettes vis-à-vis de ces jeunes adultes encore étudiants pour la plupart, va bientôt démarrer.

Dans ce marathon, les grands cabinets proposent de leur payer, en plus d’un salaire qui frise les 65 000-70,000 $ par an, les frais de scolarité à l'École du barreau pour qu'ils puissent se concentrer sur leurs études.

Mais après ce cocooning frénétique, soudain il n’y a plus rien.

« Merci, au revoir. » Pas d'emploi disponible, excepté un ou deux cabinets qui garantit un contrat d’un ou deux, après le stage.

Certes, cette façon de faire peut susciter de nombreuses questions quant à la légitimité de cette course aux stages et au ballet qui l'accompagne, mais aussi sur la finalité du stage.

D'où ma question : faut-il payer les stagiaires ?

Une question légitime

S'il y a un sujet tabou dans le milieu juridique montréalais, c'est bien celui-là.

Plusieurs grands patrons de Montréal ont répondu à la question, mais à quelques exceptions près, c’était « off record ».

Certains se sont offusqués : « Ça se pose ça, comme question ? Ça me paraît évident qu’il faut les payer », a répondu du tac au tac un grand joueur montréalais.

« Y a-t-il un débat autour de cette question ? Quelle est la nature du problème ? Depuis la fin des années soixante, je n'ai personnellement pas connu de stagiaires qui n'étaient pas rétribués dans les gros cabinets montréalais », a déclaré un autre.

Or si nous retournons à l'étymologie du mot qui vient du latin « stage » - une résidence - et de « stare » - être debout - le stagiaire signifie celui qui va résider pour un apprendre debout un métier (sans avoir la prérogative de s'asseoir). C'est donc celui qui a l’immense privilège d'apprendre un métier auprès d'un maître certifié. Il a été choisi ou si vous préférez, sélectionné pour apprendre. C'est là sa seule récompense.

l’Académie française définie le terme « stage » de la manière suivante : C’est une « période de préparation par laquelle doivent passer ceux qui aspirent à certaines professions, pour être admis à les exercer ». Les stagiaires sont donc dans une phase d'apprentissage pendant laquelle ils sont formés en contrepartie de leur travail. Il n'est nullement question ici de gratification, ni pour le maître de stage ni pour le stagiaire.

Or la réalité pour les stagiaires québécois en droit est tout autre. Bien que certains maîtres de stages aient exigé dans le passé, une contribution de la part de stagiaires pour les former (plusieurs m'ont parlé d'un mini-scandale à ce sujet il y a quelques années), la plupart des stagiaires sont payés au Québec.

Cela varie en moyenne entre 30 000 $ à 70 000 $ par an pour une rétribution de 6 mois de stage.

Qu'en pense le Barreau?

Nous avons vérifié auprès du Barreau : il n'y a aucune obligation de paiement en faveur d'un stagiaire, ni par règlement, ni officieusement.

Pour le Barreau, tout l'aspect de la rémunération est régi par le Règlement sur les normes du travail et décrit avec moult détails dans le Guide du stage disponible sur le site Web de l'École du Barreau sous ce lien (page 23 et suivantes) : [http://www.ecoledubarreau.qc.ca/stages/Guide-du-stage.pdf]

Le salaire minimum ne s'applique donc pas aux stagiaires. En revanche, dans la mesure où le stagiaire a droit à une rémunération, il peut bénéficier de certains des avantages octroyés par la loi sur les normes du travail, dont certains articles sont d'ordre public.

Qu'en pensent les Patrons?

Rassurez-vous, il semble y avoir un consensus dans le milieu : oui, il faut payer les stagiaires.

Pour Me Pierre-André Themens, patron chez Davies, il est inconcevable de ne pas les payer. Bien qu'il reconnaisse le côté pédagogique d'un stage, il insiste sur le fait que « ce sont là des gens qui travaillent très fort et qui contribuent au cabinet ».

D'autres concèdent qu'il faille absolument les payer, mais se questionnent sur les montants.

« La question plus difficile est de savoir ce qui constituerait une compensation adéquate », m'a répondu un ponte du milieu.

Plusieurs m'ont indiqué que puisque le travail des stagiaires était facturé aux clients et qu’ils rapportaient ainsi au cabinet, il était juste de les rémunérer.

Sur ce point, d'autres se posent la question de savoir s'il faut facturer le travail des stagiaires aux clients du cabinet, dans la mesure où ce sont là des professionnels en devenir.

Peut-on facturer le travail des stagiaires ? Voilà le sujet d'un prochain article ! Promis ! Juré !
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