Pierre Arcand, recruteur juridique, répond à vos questions
Pierre Arcand, recruteur juridique, répond à vos questions
Bienvenu dans un nouveau concept qui remplace la défunte « Question au recruteur ».

Le nouveau concept se définit simplement par une chronique dans le cadre de laquelle j’aborderai des sujets qui interpellent les juristes, jeunes et moins jeunes, que je crois dans ma pratique de recruteur. Les sujets pourraient aussi venir de problématiques que je note, de tendances que je vois venir ou encore de propositions que vous pouvez toujours me faire en m’écrivant directement ou par l’intermédiaire de droit-Inc.

Je débute donc cette chronique avec un sujet d’actualité qui a évolué suite à la pandémie, mais qui continue et continuera d’évoluer: Le télétravail.

Les avis sont partagés, les avantages sont nombreux, les risques et inconvénients sont plus difficiles à identifier et surtout à quantifier. Dans le fond, chaque situation est différente.

Les avis sont partagés

Du côté des employés, les avis sont moins partagés. La majorité est en faveur d’une liberté d’action, d’un libre choix impliquant le moins d’entrave possible à la possibilité de travailler de la maison comme du bureau, en fonction des réalités et besoins de chacun. Certaines professions ou métiers, de par leur nature, sont moins propices au télétravail tel que les infirmières, médecins, garagistes, soudeurs, etc… Pour les juristes, les obstacles au présentiel sont plus nuancés, facile alors de comprendre pourquoi les tenants du télétravail n’y voient que des avantages.

Par contre, les gestionnaires ne sont pas tous au diapason. Oui, on veut s’adapter, on veut rendre nos gens heureux et on ne veut surtout pas paraître comme un dinosaure rébarbatif aux changements. Ceci dit, plusieurs s’interrogent sur les effets du télétravail à moyen et long terme sur l’esprit d’équipe, le sentiment d’appartenance, la rétention des employés, l’isolement et la détresse psychologique...

D’autres ont une vision plus mercantile, qu’en est-il de la production, est-ce que les gens travaillent pour vrai, est-ce qu’ils flânent, font leur lessive, jouent avec les enfants ou tondent leur gazon ? Si je ne peux pas les surveiller, il est évident que j’y perds en productivité. Les avis sont partagés, avec raison, je dirais.

Les avantages du télétravail

Il y a eu plusieurs études, sondages, recherches et analyses sur le sujet. Sans m’en attribuer le mérite, je ne reprendrai ici que les avantages qu’on retrouve dans l’ensemble des documents que j’ai consultés.

Pour les employés :
  • Amélioration au niveau de la flexibilité de l’horaire et de la conciliation travail / vie personnelle.
  • Diminution des dépenses reliées au travail (essence, stationnement, lunch, titre de transport, etc).
  • Gain en temps sur le voyagement
  • Flexibilité de l’endroit du travail (maison, chalet, sud, Europe).
  • Calme et tranquillité, meilleure concentration, car moins d’interruption.
Pour les employeurs :
  • Réduction des coûts (loyer, équipement, système téléphonique, etc)
  • Gain général de temps (temps de déplacement, discussion de machine à café, etc)
  • Réduction des problèmes internes (conflits, irritants, frustrations)
  • Bassin de candidats plus large, car non limité à la région immédiate et même au pays.
  • Réduction du taux d’absentéisme (plusieurs études le confirmeraient)
  • Augmentation de la motivation chez les employés (ici aussi les études sont quasi unanimes).
Ces avantages sont assez faciles à identifier et généralement reconnus, sauf peut-être les deux derniers chez l’employeur (absentéisme et motivation) qui peuvent être sujet à débat sur le moyen et long terme, notamment en regard des risques et des inconvénients. Qu’en est-il justement des risques et des inconvénients ?

Les risques et inconvénients du télétravail :

Pour les employés :
  • Risque d’isolement (professionnel ou personnel)
  • Absence de démarcation entre vie professionnelle et personnelle pouvant mener à un épuisement professionnel.
  • Diminution des rétroactions de la part des gestionnaires
  • Sédentarité accrue
Pour les employeurs :
  • Difficultés à maintenir ou créer un sentiment d’appartenance, un esprit d’équipe.
  • Difficultés logistiques (confidentialité des données, documents en support numériques, etc.).
  • Défis pour l’intégration et la formation des nouveaux employés
  • Difficultés de cohésion entre différentes équipes.
  • Difficultés de supervision et de communication pour les gestionnaires.
  • Impacts des inconvénients subis par les employés (isolement, épuisement, etc).
Que peut-on en conclure ?

La liste des bénéfices et avantages est claire, et ce, tant pour les employeurs que pour les employés, à plus forte raison dans un domaine comme la profession juridique. De plus, les gens ont déjà commencé à en bénéficier et, par conséquent, il serait difficile de revenir en arrière. Et même si on le pouvait, aurions-nous un avantage à revenir au bureau à temps plein ? Je ne crois pas.

Là où il faut tempérer, c’est dans la fréquence du télétravail. Bien qu’il soit possible de travailler en permanence à distance, la liste des risques et des inconvénients nous oblige à y réfléchir. L’humain est une bête fondamentalement sociale, il a besoin d’être entouré. Il a peut-être une famille aimante, des amis présents et un environnement sain à la maison.

Mais ce n’est peut-être pas le cas, de façon ponctuelle ou plus permanente, tout n’est pas toujours rose dans nos sphères personnelles. Les conséquences de l’isolement, de l’épuisement et de la sédentarité peuvent être aussi dommageables pour l’employeur que pour l’employé. Parallèlement, développer un esprit d’équipe et un sentiment d’appartenance au sein de ses troupes est en haut de la liste de priorités d’un bon gestionnaire, ce n’est pas sans raison.

Comme employé, on veut avoir le plus de libertés possible. Comme gestionnaire, on doit avoir des employés performants, à court, moyen et long terme. Pour ce faire, il faut qu’ils restent heureux et en bonne santé.

Je pense qu’un juste équilibre entre le travail à distance et celui à la maison est la meilleure des solutions. Maintenant, il reste à voir comment on pourra l’appliquer dans nos environnements respectifs, et ce, en fonction des réalités de chacun. La dimension de l’entreprise, le type de mandats, l’industrie dans laquelle on évolue et une multitude d’autres éléments feront partie de l’équation. Il est impossible d’avoir une solution unique.

En lisant cette chronique, vous vous dites peut-être que je ne vous ai rien appris, que c’est du cas par cas. C’est bien vrai, mais ce n’était pas le but.

Cette chronique s’adresse aux candidats qui me disent qu’ils peuvent aller au bureau 1 ou 2 fois par mois si nécessaire et que pour le reste, ils sont autonomes.

Cette chronique s’adresse aussi aux employeurs pour qui le télétravail est une aberration et représente une baisse de productivité.

Dans notre société rendue malheureusement si drastique dans ses positions extrêmes, le télétravail est un élément qui doit être modulé avec doigté. Ni exigé, ni refusé, on doit l’aborder en tenant compte de tous les facteurs interreliés, pas seulement ceux qui nous touchent aujourd’hui individuellement, mais tous ceux qui affectent les gens qui nous entourent. L’entreprise et les individus s’en porteront simplement mieux.

C’est mon humble opinion, et si ce texte amène à des gens de remettre en question leur position, il aura atteint son but.

Sur l'auteur

Pierre Arcand s'est spécialisé en recrutement juridique après avoir pratiqué le droit pendant une douzaine d'années. Ayant été associé au sein de cabinets boutiques ainsi que d'un important cabinet de Montréal, il connaît bien la communauté juridique et les enjeux reliés à la pratique du droit tant en cabinet qu'en entreprise. Arcand et Associés, une entreprise spécialisée dans le recrutement de cadres et de professionnels, a été fondée en 1999. Pierre Arcand et son équipe apporte un soutien professionnel tant aux entreprises qu'aux cabinets qui cherchent à recruter les meilleurs candidats disponibles.