Séance ciné : à deux, c’est mieux ?

Céline Gobert
2012-07-20 17:00:00
Pour les avocat(e)s qui ne croient pas au mariage

Très vite, arrivent les gestes routiniers, les matins, toujours les mêmes, les soirs, des armées de clones infatigables. Les élans effrénés laissent alors place au confort des habitudes, la folie des débuts à un long fleuve tranquille.
Le couple. Voilà ce que scrute la talentueuse Sarah Polley dans ce deuxième film, sorte d’écho (de jeunesse) au duo vieillissant de son poignant Away from her.
Ici, elle s’intéresse de plus près aux tourments de Margot (Michelle Williams, nouvelle icône indé), jeune femme fantaisiste et insatisfaite, qui lorgne du côté du beau voisin, parce que son mari (épatant Seth Rogen, dans un rôle plein de sobriété) ne lui offre plus les frissons des prémisses.
De son hésitation (tromper ou pas sa moitié ? Préférer l’excitation du neuf face à l’ennui du connu ?), la cinéaste canadienne livre un joyau de mise en scène, juste de A à Z, abouti, maîtrisé, et profond.
Take this waltz, titre issu d’un morceau de Leonard Cohen- utilisé par ailleurs dans l’une des plus belles séquences du film, s’affirme comme l’un des sommets cinématographiques de l’année.
Sarah Polley esquive toutes les erreurs (trop de mélo, du romantisme cliché), et livre une alliance parfaite entre comédie, réalisme et tragique. Ses peintures (l’intimité d’un couple, les tiraillements intérieurs, le quotidien d’une vie en couple) sont crédibles, bâties sur des détails essentiels, parsemés avec acuité.
Jusqu’à la conclusion ironiquo-cruelle et dérangeante, sa valse est enlevée, piquante, créative, et lève le masque sur une amère réalité: l’incapacité de son héroïne au bonheur.
V comme Variations
Pour les avocat(e)s qui ne croient pas à la fidélité

En quatre histoires, portraits de couples et variations sur le même thème (l’infidélité), il saupoudre son cru annuel de ses ingrédients habituels : humour corrosif, alliance d’absurdités folles (un anonyme devient subitement célèbre, un croque-mort se mue en ténor sous sa douche) et d’instantanés cruels (une épouse BCBG hantée par le dévergondage, un mec lambda tenté par la meilleure amie de sa copine).
Porté par des acteurs au top (Alec Baldwin, Penelope Cruz, Roberto Benigni ou encore Ellen Page), Rome mon amour, s’il est loin d’être le meilleur Allen (la comparaison avec son dernier long-métrage lui serait même fatal), se révèle plus intéressant que ne laissent supposer les marivaudages en cours.
Le couple, comme toujours chez le cinéaste, n’est pas épargné : derrière ses sourires, son entrain et son ton comique, le film cache des canines bien acérées, qui dissèque les cœurs pour poser sur la table certaines vérités.
Parmi elles : les bienséances sociales, le désir insatiable d’accéder à la célébrité, les penchants de l’humain (homme ou femme) pour l’interdit, les supercheries de l’amour.
La musique est guillerette, le soleil romain étincelant, la bonne humeur contagieuse, mais on est chez Woody Allen, et la rose cache- forcément- ses épines.
Au final, ce sont ces éclairs-là qui offrent au cru Allen 2012, des accents amers délectables.