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Des honoraires coupés en deux!

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Élisabeth Fleury

Élisabeth Fleury

2025-11-19 15:00:01

Aie! Quand un cabinet pousse trop loin sa facturation, la Cour intervient. Une décision qui rebat les cartes des montants pouvant être réclamés par les grands bureaux…


Roland-Luc Béliveau - source : Journal de Montréal


La Cour du Québec a coupé de plus de la moitié les honoraires réclamés par Bélanger Sauvé à l’ancien maire de Lacolle, Roland-Luc Béliveau.

La décision a été rendue le 27 octobre par la juge Nathalie Chalifour.

Le cabinet réclamait initialement 47 265,01 $ en honoraires professionnels impayés, mais M. Béliveau ne paiera finalement que 19 421,86 $, confirmant ainsi une partie des arguments de la défense.

Le cabinet était représenté par un de ses avocats, Me François Peter-Edmond Rivard, alors que l’ex-maire de Lacolle se défendait seul.

Une vieille saga

L'affaire remonte en mars 2016 lorsque M. Béliveau, alors maire de Lacolle, mandate Bélanger Sauvé pour le représenter à la suite de plaintes pour manquements éthiques et déontologiques devant la Commission municipale du Québec (CMQ).

Selon le Code municipal du Québec, une municipalité a l'obligation légale d'assumer la défense de ses élus dans ce type de procédure. C'est pourquoi Lacolle a payé les honoraires de Bélanger Sauvé dès le début du mandat.

François Peter-Edmond Rivard - source : Bélanger Sauvé

Cependant, en mai 2018, Lacolle a adopté une résolution pour cesser de payer les honoraires de M. Béliveau, qui souhaitait contester une seconde décision de la CMQ devant la Cour supérieure.

Bélanger Sauvé a alors introduit un recours au nom de M. Béliveau pour forcer Lacolle à reprendre les paiements. M. Béliveau a accepté la responsabilité des frais liés à ce seul litige secondaire.

En avril 2020, la Cour supérieure a donné raison à Lacolle, estimant que l'obligation légale ne l'obligeait pas à payer des honoraires disproportionnés et déraisonnables. M. Béliveau a décidé de poursuivre ses démarches judiciaires à ses frais.

C'est sur cette période de transition (arrêt de paiement par Lacolle et poursuite des démarches par M. Béliveau) et la facturation subséquente que portait le litige soumis à la juge Nathalie Chalifour.

Les positions des parties

Bélanger Sauvé réclamait la totalité du montant impayé, estimant que les versements partiels totalisant 12 000 $ effectués par M. Béliveau entre novembre 2020 et février 2021 constituaient une reconnaissance de dette et donc une interruption de la prescription de toutes les dettes, y compris les factures antérieures adressées à Lacolle.

De son côté, Roland-Luc Béliveau reconnaissait devoir 19 421,86 $, soit le montant final de la condamnation en lien avec les factures qui lui avaient été personnellement adressées, incluant celle du litige secondaire.

M. Béliveau arguait ne rien devoir pour le reste, soulevant deux moyens de défense principaux :

  • le recours de Bélanger Sauvé pour les factures adressées à Lacolle est prescrit;
  • les factures non adressées à lui, mais à Lacolle, ne lui sont pas exigibles.
La décision du tribunal
Nathalie Chalifour - source : archives

Pour trancher, la juge Chalifour a analysé deux questions clés : la prescription et l'identité du véritable débiteur pour les sommes impayées.

Le recours de Bélanger Sauvé devait être introduit dans les trois ans suivant la naissance de son droit d'action, en vertu du Code civil du Québec (C.c.Q).

La juge Chalifour a rejeté l’argument de Bélanger Sauvé voulant que les paiements partiels de 12 000 $ effectués par M. Béliveau aient interrompu la prescription de toutes les factures, y compris celles de 2018 adressées à Lacolle.

S'appuyant sur la présomption de normalité des choses, la juge a conclu qu'il était improbable et illogique que M. Béliveau ait voulu payer des factures antérieures adressées à Lacolle, alors qu'il venait de recevoir deux factures totalisant près de 23 000 $ qui lui étaient personnellement adressées (mars 2019 et juillet 2020).

En l'absence de reconnaissance de dette applicable aux factures initiales, le recours de Bélanger Sauvé a donc été jugé prescrit pour toutes les factures adressées à Lacolle entre février et juin 2018.

Mais même sans l'enjeu de la prescription, le tribunal a statué que M. Béliveau n'était pas redevable des factures destinées à Lacolle.

La juge Chalifour a noté que Bélanger Sauvé lui-même n'a pas considéré M. Béliveau comme responsable de ces soldes impayés, car les factures qui lui ont été adressées par la suite ne comptabilisaient aucun solde antérieur dû par Lacolle.

Le tribunal a aussi statué que le cabinet ne pouvait pas exiger du maire des frais que la Cour supérieure avait jugés déraisonnables pour la municipalité.

Selon la juge Chalifour, il serait « étrange de conclure que ce qui était déraisonnable pour Lacolle ne l’est pas pour M. Béliveau ».

Puisque M. Béliveau n'était pas responsable des anciennes factures de Lacolle, Bélanger Sauvé a erronément appliqué l'article 1572 C.c.Q sur l'imputation des paiements. Les 12 000 $ devaient être imputés sur les trois factures dont M. Béliveau acceptait la responsabilité, a tranché le tribunal.

C’est donc en tenant compte de la reconnaissance de dette (19 421,86 $) et des 12 000 $ déjà versés que le tribunal a condamné le défendeur à payer 19 421,86 $ au cabinet.

Les intérêts contractuels avant l'introduction du recours ont été refusés.

Bélanger Sauvé n’a pas souhaité commenter la décision de la juge Chalifour.

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